1 janvier 2010

Solennité de Marie, Mère de Dieu / Journée mondiale pour la paix

Nb 6,22-27; Ga 4,4-7; Lc 2,16-21

Homélie

 

            Saint Luc et saint Paul sont deux auteurs bibliques aussi différents l’un de l’autre qu’on puisse l’imaginer. Luc manie la richesse et la profondeur du langage symbolique avec une extrême dextérité ; Paul se distingue plutôt par la rigueur de la pensée théologique.  Et pourtant nous avons, dans les lectures de la Messe d’aujourd’hui un très bel exemple de la façon dont chacun exprime de la manière qui lui est propre le même mystère. 

            Durant la Messe de Minuit nous avons lu le texte où Luc nous dit que lorsque les « temps furent accomplis » pour Marie, elle mit au monde le Fils, le Premier né (du Père éternel), dans la ville de Bethlehem et le déposa dans une mangeoire. Dans le même récit Luc racontait comment des anges en avaient averti d’humbles bergers qui paissaient leurs troupeaux dans la montagne. 

            Aujourd’hui, dans un texte d’une grande sobriété, il nous décrit ce que virent les bergers lorsqu’ils arrivèrent sur le lieu, c’est-à-dire comment le mystère de l’Incarnation se manifesta aux yeux des gens ordinaires.  Ils découvrent un jeune couple, une femme et un homme ayant chacun un nom : Marie et Joseph, et un nouveau-né couché dans une mangeoire, qui n’a pas encore de nom, mais qui le recevra huit jours plus tard, selon la Loi.  

            Lorsque les bergers racontent ce que les anges leur avaient annoncé et qui correspondait bien à ce qu’ils ont vu, tout le monde s’en étonne.  Il n’est pas dit à qui il racontent ces choses ; mais « tout le monde » – donc aussi Marie et Joseph – s’en étonne. L’attitude générale est donc l’étonnement, qui n’est pas très différente de l’admiration ; l’attitude propre des bergers est la louange – ils repartent en glorifiant et louant Dieu. Quant à Marie, elle s’étonne elle aussi, tout comme elle s’était étonnée lorsque l’ange Gabriel lui avait annoncé qu’elle serait mère de Jésus. Cependant elle retenait tous ces événements (ou ces paroles) et les méditait dans son coeur. (Le mot grec utilisé signifie aussi bien événements que paroles). 

            Le mystère que médite Marie sans pouvoir le comprendre c’est qu’elle a mis au monde le Fils du Père éternel.  Lorsque, au cours des siècles suivants, l’Église commencera à donner à Marie divers titres, elle exprimera ce même mystère en disant qu’elle est la Mère de Dieu, même si ce titre n’apparaît jamais comme tel dans le Nouveau Testament.  En effet, dans le Nouveau Testament Marie est toujours appelée, avec une certaine tendresse, « Mère de Jésus ». 

            Quant à saint Paul, dans toutes ses lettres, il ne parle de Marie qu’une seule fois – dans le texte que nous avions comme deuxième lecture -- et il ne mentionne même pas son nom.  Mais, dans ce texte capital, où il résume d’une façon extraordinairement dense toute sa théologie du mystère de l’Incarnation et de la Rédemption, il situe Marie au coeur de ce mystère. « Lorsque les temps furent accomplis », dit-il, utilisant la même formule que saint Luc, « Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme et sujet de la Loi ». Lorsque Paul dit que le Père a envoyé son Fils, né d’une femme, il dit exactement la même chose que Luc disant que Marie mit au monde son Fils, Le Premier Né. « Sujet de la loi » en Paul correspond au récit de la circoncision en Luc. 

            Paul pousse plus loin sa réflexion théologique.  Si Jésus est le premier-né, il est le premier-né d’une multitude de frères. Nous sommes tous ses frères et ses soeurs, et donc nous sommes tous enfants de Dieu.  Et le même esprit qui a fait naître la Parole dans le sein de Marie, ce même Esprit est en chacun de nos coeurs disant, à travers notre propre voix : « Abba ». Nous ne sommes donc plus des esclaves, mais des fils. 

            Cette grâce incompréhensible d’être tous « enfants de Dieu », nous la devons à celle qui a dit « Qu’il me soit fait selon ta Parole ».  Mère de Jésus, elle est notre Mère à tous.

 

Armand VEILLEUX

 

 

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