27 mars 2010 – Dimanche des Rameaux "C"

Is 50, 4-7; Ph 2, 6-11; Lc 22, 14-23,56

 

H O M É L I E

 

            Nous venons d’entendre le récit de la Passion tel qu’il a été raconté par l’Évangéliste Luc.  Luc, en plus d’être un excellent écrivain est un homme plein de tendresse et de bonté, qui fait toujours ressortir les aspects positifs des événements qu’il raconte, même lorsqu’il s’agit d’événements pénibles et douloureux. Tout au long de son Évangile, il nous décrit l’amour infini que Dieu nous a manifesté en Jésus, un amour qui se manifeste surtout à l’égard des pauvres, des malades, des marginaux, de tous ceux qui souffrent.  Il fait de même dans son récit de la Passion, où l’on peut percevoir la relation intime de Jésus avec son Père dans la prière, aussi bien sur la croix qu’à Gethsemani.  Jésus n’apparaît pas seul et abandonné sur le Calvaire, mais entouré d’amis. Il guérit le serviteur du grand prêtre à qui Pierre a coupé une oreille et il pardonne à tous. Il promet à l’un des deux larrons  crucifiés avec lui qu’il sera le jour même avec lui dans son royaume.  Il sert même à réconcilier entre eux les ennemis mutuels qu’étaient Hérode et Pilate. 

            Pourquoi relisons-nous ce récit, année après année ? Est-ce simplement pour accomplir un rituel ou pour commémorer encore une fois un fait passé ? Ce que Luc nous dit de Jésus dans ce récit est assez clair, même si nous n’aurons jamais fini d’en pénétrer toute la profondeur.  Je propose que nous l’écoutions aussi pour apprendre qui nous sommes. « Qui suis-je ? » est une question importante pour chacun de nous, comme elle l’était pour Jésus lui-même qui demanda un jour à ses disciples, avec insistance : « pour vous, qui suis-je ? » 

            Il y a une certaine similitude entre un texte comme celui-ci ou encore une parabole, et un songe.  Selon Karl Jung, le grand maître de l’interprétation des songes, ceux-ci nous révèlent à nous-mêmes qui nous sommes ; et, en général, nous sommes un peu chacun des personnages de chacun de nos songes. Voyons comment il en est de même de ce récit de Luc où un grand nombre de personnages sont bien campés. 

            Les apôtres, qui se querellent pour savoir qui est le plus grand, au moment même où Jésus leur parle de sa mort prochaine, c’est nous !  Combien de fois, même dans les circonstances les plus lourdes de conséquences, ne laissons-nous pas un peu nos ambitions, nos désirs de briller et de réussir, briser l’harmonie entre nous et ceux avec qui nous vivons ou avec qui nous travaillons ? 

            Judas, c’est aussi nous, parfois.  Judas ne voulait sans doute pas la mort de Jésus, et il était probablement convaincu qu’il s’en tirerait.  Mais la faiblesse de son amour, l’ardeur de sa cupidité, son ouverture à tous les compromis le font céder à un marché qui conduira Jésus et le conduira lui-même à la mort.  Ne cédons-nous pas parfois par égoïsme à des compromis qui ne semblent pas si graves, mais qui se révèlent lourds de conséquences pour notre relation d’amour avec Jésus ? 

            Pilate, qui essaie de sauver Jésus, qu’il sait innocent, mais quand même pas au point de nuire à sa propre carrière, n’est-ce pas aussi nous ?  Ne nous arrive-t-il pas de nous laver facilement les mains de situations inacceptables, que nous aurions pu changer, mais au risque d’y laisser notre peau ?

            Ne sommes-nous pas tantôt l’un, tantôt l’autre des deux larrons ? – ou bien reprochant à Dieu nos malheurs ou bien implorant humblement son pardon. 

            Pierre est vraiment – après Jésus -- le personnage privilégié de Luc dans ce récit. Ce  brave Pierre, tout feu tout flamme, prêt à donner sa vie pour Jésus – et sans doute très sincèrement – et qui dit, quelques instants plus tard, qu’il ne le connaît pas, dès qu’il se sent en danger. Mais Pierre est aussi capable de fondre en larmes de repentir dès que Jésus le regarde avec amour.  Tous ces aspects de Pierre, n’est-ce pas chacun de nous, dans notre vie quotidienne ? 

            Nous sommes tous ces personnages, mais au-delà de tout cela nous sommes appelés à être chaque jour de notre vie un peu plus le Jésus que nous révèle ce texte : un Jésus plein d’amour et de tendresse, plein de respect aussi bien à l’égard de Pilate que de Pierre, de Judas que de ses autres disciples.  Un Jésus qui trouve dans l’intimité avec son Père la capacité de demeurer fidèle par amour à sa mission assumée par amour.  Et par-dessus tout un Jésus qui pardonne tout et à tous. 

           Regardons-nous attentivement dans ce miroir du récit de la Passion, où nous pouvons nous voir, à la fois dans chacune des étapes de notre devenir, et voir en même temps le modèle que nous devons laisser se réaliser en nous.

 

Armand VEILLEUX

 

 

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