4  janvier 2009 – Épiphanie du Seigneur

Is 60,1-6 ; Ép 3,2-3a.5-6 ; Mt 2,1-12

  

Homélie

 

            L’objet de la célébration d’aujourd’hui n’est pas différent de celui de la fête de Noël.  Dans l’une et l’autre fête, nous célébrons la manifestation (en grec : epiphaneia) de Dieu au coeur de notre histoire dans l’incarnation de son fils en Jésus de Nazareth. Une note importante est attachée cependant à la célébration d’aujourd’hui. C’est celle de l’universalité du salut.  Même si Jésus, né de Marie, est fils d’Israël, le salut qu’il apporte est destiné à toutes les nations de la terre, à tous les hommes et toutes les femmes de tous les temps.  C’est le thème central de chacune des trois lectures que nous venons d’entendre.

 

            Nos célébrations liturgiques des derniers jours, à partir de la Messe de Minuit de Noël, ont beaucoup utilisé le deux premiers chapitres de l’Évangile de Luc, dont nous avons déjà examiné tout le symbolisme et tous les sens cachés.  Aujourd’hui notre lecture de l’Évangile est tirée de l’Évangile de Matthieu qui, malgré une apparence plus factuelle et plus historique, nous parle à travers un langage tout aussi symbolique et mystérieux.

 

            Matthieu résume dans une seule phrase tout ce qu’il a à dire sur la naissance de Jésus : « Jésus – dit-il – était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand. »  Si nous portons attention aux détails de son récit, nous verrons que Matthieu fait la même chose que Luc : tous les détails dont il entoure le récit du seul événement qu’il raconte concernant la naissance de Jésus, annoncent les événements des derniers jours de Jésus.

 

            Matthieu fait d’abord apparaître le roi Hérode le Grand, qui préfigure déjà l’autre Hérode, son fils, devant qui Pilate fera comparaître Jésus lors de son procès.  Et tous ceux qu’Hérode convoque pour savoir où devait naître le roi des Juifs sont les mêmes – les chefs des prêtres et les scribes – qui se présenteront devant Pilate et l’autre Hérode pour demander la mort de Jésus en l’accusant de s’être déclaré roi des Juifs.  Quant aux Mages, ils représentent la foule qui criait « hosanna au fils de David, le roi d’Israël », mais une foule qui maintenant n’est plus seulement juive mais provenant de toutes les nations qu’ils représentent. Les quelques enfants de Bethléem dont Hérode ordonnera l’assassinat représentent les martyrs de la première génération chrétienne et ceux de tous les temps.

 

            Les chefs des prêtres et les scribes attendaient un messie glorieux et n’ont pu reconnaître le vrai Messie lorsqu’il est venu.  Le petit peuple, représenté par les bergers, et les nations païennes, représentées par les Mages ont su le reconnaître dans l’humble enfant dans les bras de sa mère. Ils l’ont adoré et lui ont offert leurs hommages sous la forme de présents.

 

            La dernière phrase de ce récit est mystérieuse et comporte sans doute de nombreuses significations qu’on n’aura jamais fini de découvrir. « Avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin ».  Le songe, dans la Bible, n’est jamais un simple rêve.  C’est une expérience spirituelle à travers laquelle quelqu’un découvre la volonté de Dieu sur lui en entrant profondément en lui-même.  De même que ce n’est pas en lisant les écrits juifs mais en contemplant le ciel étoilé que les Mages avaient appris la naissance du Sauveur ; de même c’est à travers une expérience d’intériorité qu’ils perçoivent la fausseté d’Hérode et poursuivront désormais leur route sans se préoccuper de l’Israël ancien,  retournant dans leurs propres pays, leurs propres cultures et leurs propres expériences spirituelles, porteurs de la découverte personnelle qu’ils ont faite du Salut apporté par Dieu à toutes les nations.

 

            Ainsi se réalise la prophétie d’Isaïe contemplant en vision toutes les nations convergeant  vers Jérusalem pour venir rendre hommage au Sauveur et en repartir. (cf. 1ère lecture). C’est cette disposition de la Providence, difficilement acceptable et même difficilement compréhensible pour les Juifs, que Paul, plus Juif que personne mais saisi par le Christ, appelle le « mystère » par excellence.  Ce mystère est que le salut est offert à tous les hommes et toutes les femmes de toutes les nations et de tous les temps, et qu’il faut le leur dire !

 

            L’Église – notre Église – qui avait cédé durant assez longtemps à la tentation de se replier sur elle-même tout en se faisant prosélyte, a soudain redécouvert admirablement au moment du Vatican II, ce que Paul appelle le « mystère ». Dans un des grands documents du Concile « Nostra aetate » elle a reconnu l’action de Dieu dans toutes les grandes religions de l’humanité, appelant à un esprit de fraternité et de dialogue. Plus de quarante ans après le Concile il est toujours tout aussi important que garder vivante notre foi en la possibilité et la nécessité d’un dialogue proprement religieux entre les croyants des diverses religions, c’est-à-dire un dialogue où sans jamais mettre sa foi entre parenthèses, on se rencontre au niveau de ce qui est le plus intime à notre vie, notre rencontre de Dieu, au delà de toutes les théologies et de tous les systèmes.  Aussi bien l’année paulinienne que cette belle fête de l’Épiphanie nous y invitent.

 

Armand Veilleux

Enfants de Gaza 2009

        

 "Cest Rachel qui pleure ses enfants..."

Au moins 75 enfants tués ces derniers jours...

"...quand vous l'aurez trouvé, avertissez-moi..." (Matt 2,8)

 

 

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