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26 janvier 2011– Solennité des Saints Fondateurs de Cîteaux
Homélie Il y a quelques semaines un soulèvement du peuple Tunisien
renversait
un
chef
d’état
qui
semblait
solidement
établi.
L’ampleur
et
l’efficacité
de
ce
mouvement
semble
avoir
pris
tous
les
experts
par
surprise.
Et
pourtant,
six
mois
auparavant,
un
politicien
tunisien
en
exil,
Moncef
Marzouki,
qui
travaillait
depuis
longtemps
à
la
conscientisation
de
son
peuple,
expliquait
pourquoi
il
conservait
l’espoir
en
un
avenir
meilleur.
Il
disait
qu’il
semait
dans
le
désert.
Et
il
expliquait
comment,
enfant,
il
avait
vu
son
père
semer
dans
les
sables
du
désert.
Que
fait-on
lorsqu’on
a
semé
dans
le
sable sec
du
désert.
On
attend.
On
peut
attendre
six
mois,
un
an
ou
deux
ans.
Mais
lorsque
vient
la
première
pluie,
tout
pousse
à
une
vitesse
incroyable
et
le
désert
reverdit. Je trouve cet image très belle, et je pense qu’elle s’applique
très
bien
à
ce
qu’ont
fait
les
Fondateurs
de
Cîteaux
–
Robert,
Albéric,
Étienne
et
leurs
compagnons.
Ils
ont
semé
dans
le
désert.
D’ailleurs,
le
document
primitif
de
l’histoire
de
l’Ordre,
appelé
le
« Petit
Exorde »,
décrit
Cîteaux
comme
un
« désert ». Non seulement le lieu était un désert, au moins par son
isolement,
mais
l’aventure
même
des
fondateurs
les
mettait
dans
une
grande
solitude.
En
quittant
Molesme,
un
monastère
florissant
se
situant
dans
la
lignée
de
la
grande
réforme
clunysienne,
et
une
communauté
respectée
par
les
grands
de
ce
monde,
aussi
bien
dans
la
société
civile
que
dans
le
monde
ecclésiastique,
ils
faisaient
le
vide
autour
d’eux.
Ils
avaient
coupé
les
ponts
derrière
eux
et
brûlé
leurs
bateaux. Ce n’étaient pourtant pas de jeunes aventuriers. Robert
avait
70
ans
et
la
plupart
de
ses
compagnons
pas
beaucoup
moins.
Ils
semèrent
dans
le
désert,
sans
savoir
quand
la
pluie
viendrait. Ils attendirent plusieurs années et, comme nous
le
savons,
la
pluie
est
tout
à
coup
venue
et
la
moisson
fut
abondante.
Nous
en
sommes
les
héritiers. Les siècles ont passé, avec leurs hauts et leurs bas, leurs
temps
de
gloire
et
les
rappels
à
l’humilité. Au sein de l’Ordre de Cîteaux comme au sein
de
l’Église,
il
y
a
eu
au
cours
des
dernières
décennies,
des
changements
climatiques
comme
on
en
constate
au
niveau
de
la
planète,
avec
des
pluies
abondantes
–
parfois
trop
abondantes
--
là
où
était
le
désert
et
de
nouveaux
désert
là
où
l’on
avait
connu
des
prairies
florissantes. Comme nos Pères de Cîteaux, nous sommes appelés à semer
dans
le
désert,
en
vivant
simplement,
en
toute
fidélité
et
en
tout
détachement,
ce
que
nous
avons
été
appelés
à
vivre
et
ce
que
nous
avons
choisi
librement
de
vivre.
Ce
désert
est
ce
qu’était
appelé
à
vivre
le
jeune
homme
riche
de
l’Évangile.
C’est
notre
forme
de
pauvreté
répondant
à
l’appel
de
Jésus
de
Nazareth.
Il
ne
nous
appartient
pas
de
déterminer
quand
viendra
la
prochaine
pluie,
et
le
prochain
reverdissement
du
désert. La recherche de succès immédiats et la nostalgie des moissons
du
temps
passé
sont
deux
formes
de
la
même
tentation. Il existe plusieurs façons de faire fleurir
artificiellement
le
désert
et
d’y
trouver
un
succès
numériquement
quantifiable.
Cela
ressemble
un
peu
à
ces
admirables
tours
que
l’on
construit
à
Dubai,
sur
des
îles
artificielles
faites
avec
du
sable
arraché
à
la
mer.
Ces
îles
resteront
toujours
artificielles
et
ces
tours
n’engendreront
jamais
rien
d’autre
qu’elles-mêmes. Demeurons fidèles à notre mission de semer dans le désert
qui
est
nôtre
et
qui
regorge
d’espérance.
Gardons
nos
yeux
tendus
vers
le
petit
nuage
qui
annonce
la
pluie
abondante
qui,
à
l’heure
de
Dieu,
fera
reverdir
tous
nos
déserts. Armand Veilleux |
Homélies pour la même solennité, les années précédentes : 1999
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