26 janvier
2007 – Solennité des Saints Fondateurs de Cîteaux
Si 44, 1.10-15;
Heb 11, 1-2; 8-16; Marc 10, 24b-30
Homélie
Pour bien comprendre le
sens de l’invitation de Jésus : « viens et suis-moi ! »,
il faut faut faire attention au moment de la vie de Jésus où cette scène se
situe. À ce moment précis, dans l’Évangile de Marc, Jésus rencontre de plus
en plus d’incrédulité et d’opposition de la part des Juifs, et il est en route
vers Jérusalem où il sera mis à mort, comme il l’a déjà annoncé à plus d’une
reprise.
Le jeune homme de notre
Évangile présente à Jésus une question vraiment importante que porte en son
coeur toute personne humaine : « Comment avoir en héritage la vie
éternelle ? » ou « Comment être sauvé ? » Cependant, il pose mal sa question, puisqu’il
s’adresse à Jésus en l’appelant « bon maître », le traitant donc
comme un rabbin entre d’autres. Il
veut simplement connaître l’opinion d’un maître entre d’autres, se réservant
sans doute le droit de juger si son enseignement lui plait ou non – le droit
de l’accepter ou de le rejeter.
En lui rappelant qu’il
n’y a que Dieu seul qui est bon, Jésus implique déjà que sa réponse ne sera
pas celle d’une école, mais un commandement divin qui exige une action plutôt
qu’une discussion sans fin.
Jésus rappelle au jeune
homme le noyau central de la Loi. Notons
en passant qu’Il laisse de côté les premiers préceptes du Décalogue se rapportant
à Dieu et ne cite que ceux qui se rapportent au prochain, indiquant ainsi
bien clairement que la vie éternelle qui l’intéresse n’est pas une vie après
la mort que l’on pourrait gagner par les mérites de ses actes, mais bien le
« règne de Dieu » commencé dès ici-bas dans la justice et la charité. Le jeune homme semble un peu piqué par cette
réponse de Jésus et, en bon pharisien, il ajoute : « J’ai fait tout
cela depuis ma jeunesse. » -- J’ai observé toute la Loi. J’ai une bonne conscience. (Dans la version
de Matthieu il ajoute aussi cette question sans doute plutôt rhétorique :
« Que me reste-t-il d’autre à faire ? »)
Cette attitude légaliste est fustigée par Jésus qui ajoute : « Une
seule chose te manque : va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres...
puis viens et suis-moi ».
À ce moment il devient
évident que les questions du jeune homme n’étaient qu’un paravent. Confronté avec les exigences de la foi, il admet
qu’il ne peut y faire face. Lorsqu’il
est invité à laisser de côté ses questions de caractère moral et légaliste,
pour rencontrer et suivre Jésus, il se retire. En définitive, croire et être sauvé signifient
s’attacher à la personne de Jésus... même lorsqu’il marche droit vers sa mort.
À ce premier thème s’en
rattache un second – un thème très cher à Jésus : celui que personne
ne peut s’attacher à Jésus s’il n’est pas détaché de tout
autre chose ou personne. Le jeune homme
en question ne pouvait pas s’attacher à Jésus parce qu’il avait de grandes
possessions et ne pouvait pas se résigner à les abandonner pour suivre Jésus.
La leçon de la première
strate de ce récit est que le salut est un don gratuit de Dieu. Aussi bien le jeune homme qui se présente à
Jésus que les disciples eux-mêmes à la fin du récit demandent : « Qui
peut être sauvé ? » La réponse
de Jésus est que cela est impossible aux hommes – qu’ils soient riches ou
pauvres. Ceux qui peuvent être sauvés
sont ceux que Dieu sauve. Aux hommes,
c’est impossible. À Dieu c’est possible
et il offre toujours ce don à tous.
Cependant, pour recevoir
ce don, on doit créer en soi un vide qui aspire à être comblé. Jésus répétera ce message en d’autres circonstances,
utilisant de nombreuses figures : « Amen, Amen, je vous le dis,
à moins qu’un grain de froment ne tombe dans la terre et meure, il demeure
seul ; mais s’il meurt il porte
beaucoup de fruit. »
Lorsque Jésus, en route
vers Jérusalem, dit à son aspirant disciple : « viens et suis-moi »,
il l’invite à partager ce mystère pascal. Mais cela présuppose le renoncement à toutes
les attaches et à tous les désirs. Il
l’avait mentionné aux autres disciples auparavant : ni or, ni argent,
ni cuivre dans vos ceintures, pas de sac pour la journée, pas de tunique de
rechange, pas de sandales, ni bâton.
Ce récit raconte l’histoire
de l’appel concret d’un homme par Jésus. Celui-ci appelle toujours chacun par son propre
nom. Chacun d’entre nous doit découvrir
ce qu’est exactement son appel personnel. Mais, parce que nous sommes tous appelés au
salut, nous sommes aussi tous appelés à atteindre sous une forme ou une autre
un authentique détachement du coeur.
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Homélies pour la même solennité, les années précédentes :
1999
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2000
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2002
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2006
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