Solennité de la Pentecôte 2009
Ac 2,1-11; Ga 5,16-25; Jn 15,26-27; 16,12-15

 

H o m é l i e

            Jésus dit à ses disciples que lorsqu’ils auront reçu l’Esprit de Vérité, ils seront ses témoins – littéralement, ses martyrs.  

            Il y a quelques jours à peine, nous fêtions le 13ème anniversaire du témoignage – du martyre – donné par nos frères de Tibhirine, en Algérie.  L’une des raisons, peut-être la principale, qui les avait poussés à demeurer en Algérie malgré le danger était la nécessité qu’ils percevaient d’affirmer ce que Christian de Chergé appelait le « respect de la différence », et même le « droit à la différence ».   

            L’une des caractéristiques de toutes les formes de totalitarisme, qu’il soit politique ou religieux, est précisément de nier ce droit à la différence – de vouloir exiger de tous qu’ils pensent et agissent de la même façon. Cela conduit graduellement au mépris et au rejet de ceux qui sont différents : d’une autre langue, d’une autre ethnie, d’une autre nationalité, d’un autre continent.  Ce refus de l’autre – qui conduit au refus de l’Autre – semble une tentation particulièrement grande  ces dernières années dans notre monde, sous toutes les latitudes.  Aussi, le message de la Pentecôte est particulièrement d’actualité.  

           Jésus avait promis á ses disciples de leur envoyer l’Esprit qui les conduirait à la Vérité tout entière.  Il ne leur promet pas que l’Esprit leur enseignera la Vérité, mais qu’il les conduira à la Vérité. C’est ce que nous avons lu dans l’Évangile.  Et, dans le récit des Actes des Apôtres que nous avions comme première lecture, saint Luc décrit de façon symbolique l’effet de cette venue de l’Esprit sur eux.  Derrière son récit se trouve, comme en filigrane, celui de la tour de Babel.  Dans ce récit de l’Ancien Testament, la construction d’une tour qui avait la prétention d’atteindre le ciel représentait l’effort du pouvoir politique et militaire des Assyriens d’imposer une autorité unique à toutes les populations du monde connu et de leur imposer l’uniformité des coutumes et de la langue.  Dieu intervient alors pour assurer la diversité des langues.  Dans ce récit, encore ambigu, cette diversité peut cependant apparaître aussi bien comme une punition que comme une faveur. 

            Dans le récit de Luc dans les Actes des Apôtres, par ailleurs, la diversité apparaît au contraire comme une richesse.  Les Apôtres ne parlent pas une langue que tous comprendraient.  Ils parlent leur propre langue de Galilée ;  mais tous les entendent, chacun dans sa langue.  Les Juifs présents, qui sont venus de la diaspora pour célébrer la Pâque à Jérusalem, représentent toutes les cultures et toutes les races connues à l’époque.  Tous entendent le message des Apôtres chacun dans sa langue. 

            Déjà dans le récit de la création dans le Livre de la Genèse, l’Esprit – ou le Souffle -- de Dieu engendre la vie à travers le processus de la diversification.  C’est lorsque l’Esprit de Dieu plane sur le chaos initial, que la lumière se sépare des ténèbres, les eaux de la terre, que la vie animale se distingue de la vie végétale et qu’apparaît l’être humain, homme et femme. 

            Ce que décrit Luc dans le récit des Actes que nous avons lu, c’est la naissance de l’Église  Celle-ci est la communauté de tous ceux qui ont mis leur foi dans le Christ et son message.  Le fondement ultime de leur unité est cette foi commune.  Il n’y a de véritable unité qu’entre des personnes différentes.  Le respect de la différence est donc une dimension essentielle de l’unité.   

            L’approche des élections européennes nous rappelle que c’est là le grand défi de l’Europe, comme c’est le défi de chacun des pays qui la composent et aussi de chaque pays de notre planète.  C’est aussi le défi de notre Église universelle et de chaque Église locale, comme de chaque communauté et de chaque famille. 

            Demandons à l’Esprit que Jésus nous a envoyé de nous rendre capables de porter tout ce qu’il a à nous enseigner. Demandons-lui surtout de nous ouvrir aux autres – qu’ils nous soient proches ou lointains – et de nous rendre respectueux à l’égard de toutes leurs différences.  Qu’il nous rende respectueux de toutes nos différences, au sein de nos familles, de nos communautés, de nos pays et de notre humanité tout entière. 

 

Armand VEILLEUX

 

 

 

 

           

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