VIIIème
Partie : Le monastère et
le monde
A-Clôture
et sorties (RB 66, 67 et 51)
Le
Portier du monastère (RB 66)
Traditionnellement,
le monastère se caractérise par une clôture ; il est un lieu entouré,
séparé d’un certain monde. Les Frères mènent la vie commune dans son enceinte,
en marge de la vie du siècle. Les cénobites vivent, dans la solitude du lieu,
une vie en commun.
Le ch. 66
ne se contente pas de mentionner les qualités requises du Portier du monastère
et ses obligations (vv. 1-5), mais il insiste sur le fait que le monastère doit
posséder autant que possible, tout ce qui est nécessaire à la vie commune afin
que les Frères n’aient pas à sortir du monastère (vv. 6-7).
Une note
finale (v. 8) prescrit la lecture fréquente de la Règle ; cela laisse
supposer que s’achevait là le Règle primitive, dans sa première rédaction.
L’importance
du Portier ne doit pas être sous-estimée. Il occupe une place délicate dans le
monastère. Il est l’intermédiaire entre le monde et le cenobium. Il est
le gardien de la paix des moines et, en même temps, le représentant de
la communauté auprès de ceux qui se présentent à la porte du monastère.
Certaines qualités lui sont nécessaires :
Ø
Etre
« ancien » : ce qui doit normalement le préserver de donner
libre cours à ses passions, l’expérience lui ayant appris ce que sont les
hommes ;
Ø
Etre sage
(sapiens), c’est à dire suffisamment astucieux pour accueillir et
transmettre avec discernement les messages reçus, sans les déformer.
Ø
Etre mûr,
prudent, suffisamment équilibré pour ne pas vaquer çà et là, et perdre son
temps (v. 1).
Ø
Etre
empressé, prompt, diligent, gardant cependant son intériorité.
Trois
mots caratérisent le Portier idéal , selon S. Benoît: l’empressement
(festinanter), la crainte de Dieu ou l’esprit de foi (cum omni
mansuetudine timor Dei), la ferveur de la charité (cum feruore caritatis).
Il aura
donc dû, pour acquérir ces qualités avoir passé d’assez longues années de
probation au sein de la communauté. Ce sera donc plutôt un
« ancien ».
A la fin
du ch. 4, il est précisé que c’est dans l’enceinte du monastère que le moine
doit s’exercer à « l’art spirituel » (RB 4, 78). C’est pourquoi ev RB
66, 6 il est ajouté que le monastère doit être doté de tout le nécessaire
qui, pour le VIème s., consiste en
-
eau,
-
pain
(grain moulu, ce qui suppose un moulin),
-
jardin
(pour avoir sous la main fruits et légules),
-
et
ateliers (menuiserie, forge...),
afin que les Frères n’aient pas à
sortir du monastère puisque cela « ne convient absolument pas à leurs
âmes » (quia omnino non expedit animabus eorum).
Le grand
S. Antoine disait qu’ « un moine hors de son monastère est comme un
poisson hors de l’eau » (Vita Antonii 85, Apophtegma Patrum,
Antoine 10).
Les
voyages (RB 67)
Les
sorties sont cependant parfois inévitables. Et Benoît en parle précisément
après le ch. 66 où il montre tout le profit qu’il y a à « demeurer »
au monastère.
Le
premier chapitre additionnel est consacré aux Frères en voyage par décision de
l’Abbé (De Fratribus in uia directis).
Cela ne
constitue pas une dérogation à la loi de la clôture, mais plutôt le
contraire : les moines envoyés en voyage constituent l’exception
qui confirme la règle. Tout le ch. 67 ne fait que mettre en garde contre les
dangers auxquels s’expose le moine qui quitte son environnement qui l’incite à
chercher Dieu. C’est pourquoi, avant de se mettre en route, les moines se
recommanderont à la prière de l’Abbé et de toute la communauté (v. 1).
Absents,on les mentionnera à la dernière prière de l’Office (v. 2). Le jour
même de leur retour, ils se prosterneront aux pieds de tous, sur le sol de
l’oratoire, pour que Dieu leur pardonne les fautes commises en cours de route
« par les yeux ou les oreilles » (VV. 3-4).
Benoît se
montre soucieux d’éviter de contaminer la communauté par le rapport indiscret
de ce que les Frères voyageurs ont vu et entendu. Il sait que le monastère est
une extraordinaire caisse de résonance pour la bonne parole comme pour la
mauvaise... Ces indiscrétions possibles sont qualifiées de « grandes
ravageuses » (voir v. 5, plurima destructio). Si quelqu’un osait
procéder ainsi, « on le soumettrait à la discipline régulière ». Ce
n’est pas une innovation : les Réglements pachômiens mentionnent de telles
dispositions (Regula 57 et 86). De même pour ce qui suit : nul ne
peut quitter la clôture sans l’ordre de l’Abbé (cf. Regula Pachomii 84).
De façon générale,
celui qui entreprendrait même une petite chose sans l’ordre de l’Abbé, devrait
être sanctionné. Car toute présomption doit être compensée par un acte
d’humilité qui lui corresponde.
Notons
enfin qu’en ce chapitre 67 se trouve, sous-jacente, toute une doctrine de la
connaissance par les sens (yeux, oreilles...). La pédagogie bénédictine à créer
chez les moines des habitus vertueux, leur permettant, après un certain
exercice (askèsis) de « faire le bien comme naturellement»,
et de « courir, dans la douceur de l’amour, sur le chemin des
commandements » de Dieu, expression de sa volonté (cf. Prol. 49).
Les
sorties de moindre importance (RB
51)
Ce
chapitre est rédigé sous forme de « note brève ». Il concerne un
moine, isolé, alors que RB 67 vise plusieurs moines. C’est qu’habituellement,
il était rare qu’un moine s’absente seul ; on partait à deux, au minimum,
afin d’éviter les risques de dépravation par ce réconfort mutuel. Il était
aussi recommandé au « sortant » de ne rien manger à l’extérieur, s’il
rentrait au monastère le jour même.Le partage de la table est signe de
communion ; elle ne peut se manifester avec nimporte quel
« monde ». L’Abbé, là encore, jugera de ce qui expédient (v. 2).
La
contrefaçon impliquerait châtiment (v. 3) dans le sens de la reprise de
conscience du bien fondamental qu’est la « communion des choses sacrées et
des saints » (communio sanctorum).
B-L’accueil
des hôtes (RB 53 et 56)
Il est
traité dans ces deux chapitres de l’hospitalité monastique.
La Sainte
Ecriture – référence première de tout agir chrétien – insiste vivement sur
l’accueil de l’hôte comme représentant un des aspects fondamentaux de la
charité fraternelle : le chrétien ne peut jamais se considérer « en
règle » devant le devoir d’hospitalité requis ; il est toujours en
dette d’amour mutuel (cf. Rm 13, 8).
Ce
mystère de l’hospitalité a été mis en lumière par le Christ lui-même en Mt 25,
35-43 ; à travers l’hôte accueilli c’est le Christ lui-même que l’on
accueille. Depuis les origines chrétiennes – et même antécédemment -,
l’hospitalité a toujours été considérée comme sacro-sainte (cf. Rm 12,
13 ; voir Cassien, Conf. 2, 26 ; Rufin, Histoire des moines d’Egypte,
n°8 ; Règle Pachômienne...).
1- RB
53 : Des hôtes à recevoir
S. Benoît
se montre un digne héritier de cette tradition. Un profond esprit de foi et une
ardente charité, mais aussi beaucoup d’humanité transparaît dans ce chapitre
(cf. A. de Vogüe, « Honorer tous les hommes », le sens de
l’hospitalité bénédictine, RAM 40 – 1964 -, pp. 129-138).
Du point
de vue rédactionnel, le chapitre s’articule en deux parties :
Ø
vv.
1-15 : l’expression « Tous les hôtes qui surviennent seront
reçus comme le Christ» (omnes supervenientes hospites tmquam Christus
suscipiantur), marque le début et le terme de cette section. La construction
de cette partie est harmonieuse et équilibrée, à peine perturbée par cette
sorte d’inclusion des vv. 8-9 sur la « conduite des hôtes à la
prière ». C’est le principe biblique de l’accueil des hôtes et pèlerins
qui est ici reproduit, et dont l’Historia monachorum de Rufin est une
belle illustration.
Ø
vv.
16-24 : seconde partie très différente tant du point de vue littéraire que
du contenu. Il est fait état ici de la perturbation possible du climat
communautaire du fait de l’accueil d’hôtes. Il est légiféré de telle sorte que
cela ne soit pas perturbant pour la paix monastique. Manifestement, Benoît a
rédigé cette seconde partie postérieurement à la première. Son expérience lui a
révélé que des problèmes naissent du fait de l’accueil des hôtes. Il tente d’y
remédier tout en sauvegardant le principe biblique non remis en cause.
2- Théologie de l’hospitalité bénédictine ; la
réception des hôtes (RB 53, 1-15)
« J’étais
pèlerin et vous m’avez donné l’hospitalité » (Mt 25, 35). Le logion évangélique
inspire manifestement RB 53. Le Christocentrisme de la RB s’y trouve confirmé.
C’est dans la lumière du Christ reconnu dans les pèlerins que ceux-ci sont
accueillis tamquam Christus (v. 1), car c’est « en eux que le
Christ est adoré et reçu ».
Par ce
procédé de la répétition – très fréquent dans la RB -, la notion chrétienne de
l’hospitalité est peu à peu inculquée aux moines : accueillir un pèlerin
équivaut à accueillir le Christ en personne. Toute la suite procède de cet acte
de foi initial : tous seront donc reçus, encore qu’il y ait une certaine
gradation en fonction du degré d’appartenance au Christ :
-
d’abord
les « Frères dans la foi » (les domestices fidei) ;
-
puis, les
« pèlerins » (les peregrines) ; et les
« pauvres » (pauperes).
-
Enfin,
les « riches », puisque « la peur qu’ils inspirent porte
d’elle-même à les honorer » (v. 15).
Il s’en
suit que tous seront reçus
Ø
« avec
tout ce qu’implique le devoir de charité (officium caritatis) – v.
3;
Ø
« en
toute humilité »,(v.6) ;
Ø
« avec
beaucoup d’humanité » (v. 9).
Charité,
humilité, humanité : on est là au cœur de l’Evangile !
On
pourrait comparer ce concept d’hospitalité interprété par S. Benoît avec
l’interprétation qu’en fait S. Augustin dans le Sermon 355, 2 par
exemple : pour l’évêque d’Hippone, la référence biblique normative est
pour lui Ac 2 et 4 (deux premiers « somaires » décrivant la première
communauté de Jérusalem. Pour Benoît, c’est Mt 25, 31-46. L’hospitalité
bénédictine repose peut-être moins sur le fait que l’hôte est reconnu comme un
frère, aimé dans le Christ, que dans l’acte de foi qui sert dans l’hôte reçu le
Christ en personne.
La
paranomase humilitas/humanitas n’est pas qu’un jeu de mot (juego de
palabras, giocco di parole), mais procède de l’acte de foi et
l’explicite : l’humilité est la porte d’accès à la pleine humanité (cf. A.
de V., Commentaire, p. 678).
3- Organisation de l’hospitalité (RB 53, 16-24)
Les hôtes
« ne manqueront jamais au monastère » (53, 16).
Tous
doivent être reçus mais, cependant, sans que la vie conventuelle en soit
perturbée (v. 16). D’où la cuisine à part pour l’Abbé et les hôtes. Le
supérieur rompra même le jeûne par égard pour l’hôte, chaque fois que cela sera
possible, c’est à dire en dehors des jours où le jeûne ne peut être violé (uiolari
non possit).
Dans la
RB apparaît la cella hospitum, l’hôtellerie, confiée à un Frère sensé et
craignant Dieu : deux vertus majeures pour l’hôtelier, celles du sage, car
« la Maison de Dieu doit être sagement administrée par des sages »
(v. 22).
En tous
cas, la vie du moine ne devrait souffrir d’aucune façon du contact avec le
monde extérieur (cf . RB 66, 7 ; 67, 4-5).
Le moine
rencontrant un hôte le saluera et lui demandera sa bénédiction (usage ancien),
mais sans entamer la conversation, et il poursuivra son chemin (v. 24).
Tous ces
détails dénotent des expériences ponctuelles qui inclineront Benoît à établir
une sorte de jurisprudence le conduisant à réglementer l’exercice
del’hospitalité monastique en laquelle s’harmonisent l’esprit de foi, la
sagacité des hôteliers et le nécessaire environnement spirituel dû à la
présence des moines. Le trouble et ses causes seront combattus, afin que la
Paix (Pax) prévale. Hospitalité, oui ! Caravansérail (parador),
non !
4– La table de l’Abbé (RB 56)
« Séparer
l’Abbé de ses Frères en un moment aussi significatif de la vie de la communauté
qu’est « la réfection quotidienne », constitue le prix que S. Benoît
se tient comme obligé de payer pour que l’exercice de l’hospitalité ne trouble
pas le déroulement des observances monastiques » (Colombas/Aranguren).
Note
additive, ce ch.56 n’est pas sans intérêt.
L’Abbé a
donc sa propre table, comme il a sa propre cuisine... C’est un seigneur !
Ses commensaux habituels sont les hôtes et les pèlerins, ceux qui viennent de
loin, les « étrangers » au pays. Sa table est un peu meilleure que la
table commune, et, lorsqu’il n’y a pas d’hôtes (ce qui semble en contradiction
avec 53, 16), l’Abbé pourra inviter des Frères, ceux qu’il voudra et qu’il
jugera plus méritant... Le v. 3 semble indiquer que ce sera surtout des anciens
ou « sympectes » (RB 27, 2) puisqu’il recommande de laisser toujours
au moins « un ou deux anciens avec les Frères, pour le bon ordre » (propter
disciplinam).
La table
de l’Abbé se trouvait-elle dans le réfectoire commun des Frères ? Malgré
38, 9 où l’Abbé peut intervenir au cours de la lecture faite au réfectoire – ce
qui semble indiquer sa présence -, RB 56, 3 paraît exclure cette possibilité.
On remarquera qu’en 38, 9 il n’est pas question de l’Abbas mais du Prior
(voir A. de V., Commentaire, pp. 1285-86). De plus RB 38 commence par cette
note : « A la table des Frères, la lecture ne doit jamais
manquer ». C’est donc que la « table des Frères » est distincte
de celle de l’Abbé. Les deux menses se trouvent donc dans un lieu
particulier.
Solitude
et communion : le mystère est ici suggéré. Oui, la recherche de Dieu en
commun est vraiment paradoxale. Il faut concilier ce qui paraît
inconciliable : « Honorer tous les hommes » (RB 4, 8), et tout à
la fois « chercher vraiment Dieu » (RB 58, 7). Seule une communauté
dans la mouvance de l’Esprit peut le réaliser, là où « par l’unité et la
concorde tout ce qui est à chacun appartient à tous, et tout ce qui est à tous
appartient à chacun » (per unitatem et concordiam, quidquid est
singulorum, hoc est omnium, et quidquid est omnium, hoc est singulorum)
Aelred de Rievaulx, Serm. 23, in omnibus sanctis, PL 195, 347.
C.- La manière de recevoir des frères (RB 58)
Comment
se recrutent les moines pour assurer la survie de leurs
communautés ?;Comme tout organisme, il convient de se rénover pour
subsister.
C’est du
monde extérieur souvent corrompu et corrupteur que peut seulement venir cet
apport. S. Benoît exprime vis à vis de « ce monde » toute la méfiance
dont les moines anciens faisaient preuve à son égard. On est ici très loin de
la perspective fondamentalement optimiste et positive de la Constitution sur
l’Eglise dans le monde de ce temps, Gaudium et Spes. Intégrer dans la
communauté quelqu’un qui est pétri de slogans et de coutumes mondaines peut
être périlleux pour la communauté. Cela ne peut se faire sans conversion à
consentir des deux côtés : de la part du postulant, et de la part des
moines qui accueillent un frère potentiel. Il faudra au postulant vivre un
« grand Carême » pour se déprendre des idées et habitudes du siècle.
D’où la nécessité d’une période probatoire. Ce n’est qu’après que le postulant
pourra entrer au noviciat et participer déjà à la vie de la famille monastique,
sans y être encore totalement intégré.
C’est
donc tout un processus qui est décrit ici et qui va de la
« conversion » à la « profession » (cf. Colombas, « El
monacato primitivo », T.2, pp.112-141).
Beaucoup
de points sont repris de Cassien (Inst. 4, 3-7) :
Ø
réception
des postulants (dans les monastères d’Egypte) : 10 jours passés à la porte
du cenobium pendant lesquels sont mises à l’épreuve la patience et
l’endurance du postulant ; les injures même ne lui sont pas épargnées (in/iuria
= ce qui n’est pas conforme au droit, et qui est offensant) ;
Ø
une fois
entré, le postulant est dépouillé de ce qu’il porte : ses habits sont
cependant gardés au vestiaire, au cas où il ressortirait rapidement.
Ø
Les
postulants sont confiés à l’ « ancien » qui s’occupe des hôtes (chez
Cassien). Durant un an complet, ils l’aideront à servir les hôtes avec humilité
et patience. S’ils sortent indemne de cette épreuve, ils formeront une
« décanie » et seront considérés comme membres de la communauté
cénobitique.
Dans ce
ch. 58, Benoît prend des libertés par rapport à Cassien, tout en adoptant son
schéma. Il s’inspire aussi d’autres auteurs, mais son mouvement lui est propre.
Il traitera dans les trois chapitres suivants des cas spéciaux d’entrée dans la
communauté : ce qui concerne les enfants (RB 59 : « Des
oblats, fils de notables ou de pauvres ») ; les prêtres (RB
60) ; et des moines étrangers (RB 61).
L’entrée (RB 58, 1-4)
Au
postulant séculier et adulte qui sollicite son admission comme moine, « on
ne lui accordera pas facilement cette entrée » (v. 1 : non ei
facilis tribuatur ingressus).
La
citation de « l’Apôtre » (qui est Jean, et non pas Paul !) donne
autorité à cette attitude : « Eprouvez les esprits pour voir s’ils
viennent de Dieu » (1 Jn 4, 1). Cependant Benoît réduit à 4 ou 5 jours
l’attente du postulant à la porte du monastère (les Règles anciennes sont beaucoup
plus sévères), pourvu que le postulant ait résisté aux difficultés faites à son
entrée (ingressus) – v. 3.
Alors, on
lui concèdera d’entrer (v. 4).
Le
Noviciat (RB 58, 5-16)
Les
postulants sont alors conduits à la cella nouitiorum ou Noviciat, lieu séparé
des locaux occupés par la communauté. Là, ils s’adonnent à la meditatio ;
ls y mangent et ils y dorment, c. à d. qu’ils y passent toutes les heures non
employées à l’Office divinet au travail.
Le verbe meditare
signifie sans doute pour S. Benoît « faire la méditation proprement
dite », apprendre de mémoire et réciter ce qui a été appris, et
« faire lectio diuina ». Donc, meditare, c’est
apprendre et étudier.
Les
novices sont placés sous la conduite d’un ancien (v. 6), le senior,
« apte à gagner les âmes », qui, plus tard, recevra le nom de
« Maître des novices » (magister nouitiorum). Quelles sont les
qualités requises ? D’abord une aptitude à gagner des âmes, c. à d. étant
à la fois un spirituel et ayant ce que les américains appellent une
« human touch », du « feeling », qu’il sente les choses
humaines ; ensuite, qu’il soit plein de sollicitude attentive (omnino
curiose intendat) pour veiller sur ceux qui lui sont confiés. En effet, il
ne faut ni les décourager par des rigueurs excessives, ni les retenir à tout
prix par des flatteries mensongères.
Le temps
du noviciat durait une année complète, divisée en 3 périodes : (1) une
première période de deux mois (v. 9) ; (2) ensuite, une période de 6 mois
(v. 12) ; (3) en fin, une période de 4 mois (v. 13).
Au terme
de chacune de ces périodes, la RB en son entier sera lue au novice « pour
qu’il sache à quelle fin il entre » (v. 12). Pour l’exégèse difficile où
l’on peut voir une contradiction entre le v. 5 (après quelques jours à
l’hôtellerie, le novice intègre la ‘maison des novices’ où ils mangent et
dorment), et le v. 11 (où après 2 mois, le novice est conduit ‘dans la susdite
maison des novices’), voir A. de V., Commentaire... pp. 1314-1318).
Pour la
RM, les deux mois sont passés à l’hôtellerie du monastère (cf. RM 88, 8).
Benoît laisse une équivoque dans sa formulation, si bien qu’on ne peut dire
avec certitude où séjourne le novice pendant ces deux premiers mois.
Le
noviciat, cella nouitiorum, et son senior, est une innovation de
Benoît, une création de la RB. Le terme nouitius prend un sens technique
particulier ; les nouitii deviennent une catégorie, un groupe, une
entité. Le Maître, par contre, ne considère le « novice », qu’au
singulier (voir A. de V., Commentaire, p. 1388, note 430).
La
méthode suivie au noviciat concerne deux catégories de personnes :
1.
les
éducateurs ou « accompagnateurs », c. à d. l’ancien (senior),
et, sans doute l’Abbé ;
2.
Le novice
lui-même, ou les novices.
Se
référant à la première catégorie, quelques indications sont données aux vv.
7-8. Le Maître des novices (avec le soutien de l’Abbé) examinera attentivement
si celui-ci « cherche vraiment Dieu » (si reuera Deum quaerit),
s’il s’applique avec zèle à l’Opus Dei, à l’obéissance, aux pratiques de
l’humilité (ad obprobria)... Qu’est donc « chercher
Dieu » ? (voir E. de Sainte-Marie, Si reuera Deum quaerit,
Vita Monastica 10 – 1956 -, pp. 173-177). La recherche de Dieu constitue
« une activité religieuse essentielle », qui se situe toujours, chez
les moines, en perspective eschatologique : c’est une ouverture de soi, de
son être, pour monter à la rencontre de Celui –qui-vient, une compromission
totale dans l’adhésion au Christ qui se traduit spontanément en prière. Aussi
est-il conséquent de voir dans l’empressement à l’Oeuvre de Dieu un signe
révélateur du propos de « chercher Dieu ».
De toute
façon, ce qui est requis du novice est moins une observance matériellement
parfaite, qu’une référence explicite et réitérée à Dieu,un dynamisme spirituel.
Le v. 8 souligne ce fait : on ne cachera pas au novice les dura et
aspera du parcours, « choses dures et âpres » par lesquelles
« on va à Dieu », et qui sont des chemins pour entrer dans une
relation priante continuelle avec le Dieu proche (cf. v. 11). Autres chemins
complémentaires : l’écoute des lectures répétitives de la RB qui seront
faites au novice (vv. 9.12 et 13), les délibérations personnelles que fera le
novice, jaugeant ses capacités d’observer cette loi proposée du service
chrétien (militia), toujours possible à qui persévère dans l’humilité.
Benoît ne
cache pas que certains défailleront en route : le noviciat est un lieu et
un temps de probation, donc d’essai (cf. vv. 11 et 13). Un temps d’espérance
aussi, et de connaissance de soi. L’admission dans la communauté pourra se
faire au bout d’un an complet, si le novice, considéré digne de cette
agrégation, promet d’observer la RB et d’obéir à tout ce qui lui sera enjoint
(vv. 14-16). Finalement c’est à « l’obéissant » (d’une obéissance
qu’est la foi) que s’ouvrent les portes, les bras et le cœur de la communauté
monastique. L’orgueilleux ne peut et ne doit pas entrer.
La
promesse définitive (RB 58,
17)
Vient
donc le moment, pour le novice, de mettre un terme à un « si longue
délibération » (tam morosam deliberationem), et de s’engager solennellement
et pour toujours à >Dieu par la médiation de la « profession
monastique ».
L’acte
transcendental de profession consiste à promettre stabilité (stabilitas),
conversion de la manière de vivre (conuersatio morum), et obéissance
(oboedientia).
La tradition
monastique voit dans cette triple formulation les trois vœux monastiques,
reprise des conseils évangéliques, explicités dans les vœux de pauvreté, de
chasteté et d’obéissance que prononcent ceux et celles qui s’engagent dans
« la vie consacrée ». Mais
Benoît n’entend pas là définir 3 vœux fondamentaux distincts. Il veut seulement
indiquer l’objet de la promesse : la marche à la suite du Christ,
au plus près (sequela Christi).
On
remarquera dans ce ch. 58 une prédilection pour les associations ternaires (58,
9.12-13 ; 58, 5.7.22 ; cf. RB 8, 1 ; 35, 17.18 ; 38, 3).
L’obéissance
se déduit des versets précédents (vv. 14-16). La stabilité et la
« conversion des mœurs » ont fait l’objet de multiples
interprétations.
Quel est
le sens authentique de la « stabilité » ? Il semble que
ce soit l’équivalent de la « persévérence » (cf. v. 9) : c’est
la permanence dans un état de vie déterminé (aux versets 11 et 13, le
verbe stare est utilisé). « La stabilité fait toute l’institution
bénédictine », disait Dom Guéranger (voir Jean Leclercq, « Autour de
la Règle »..., p. 197). Cette « stabilité » inclut
« conversion de mœurs et « obéissance ». C’est d’une stabilité
dans la conversion des mœurs et l’obéissance dont il s’agit, plus que de
« station » prolongée dans un lieu donné. Cependant, la permanence
dans le lieu peut être aussi un signe de la persévérance dans le propos
monastique (propositum).
La stabilitas
de la RB représente en fait « l’engagement monastique total » (el
compromiso monastico total ; Colombas/Aranguren), jusqu’à la mort. Cette
conversion monastique (conuersatio) comporte essentiellement le célibat
et la mise en commun des biens, c. à d. la totale désappropriation concrétisée
dans l’obéissance à la RB et au supérieur local. La « stabilié » fait
mystère. Benoît s’en explique à la fin du Prologue (Prol. 50), dans un contexte
christologique :
« Ainsi,
ne nous écartant jamais de son enseignement (celui de Dieu), persévérant en sa
doctrine dans le monastère jusqu’à la mort, nous participerons par la patience
aux souffrances du Christ pour être admis à partager son Règne » (cf. Ph
2, 8 ; 1 Pi 4, 13 ; Rm 8, 17).
Cela est
confirmé par le 4ème degré d’humilité (RB 7, 36) où le législateur
exhorte à la patience, citant Mt 10, 22 : « Celui qui persévérera
jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé ». Une sorte de martyre, de témoignage
de foi en Celui qui nous a aimés et s’est livré pour nous (cf. Ga 2, 20 ;
voir aussi Jean Leclercq, « Autour de la Règle », pp. 203-204).
« La
stabilité est la cristallisation d’une attitude purement spirituelle » (H.
Urs von Balthasar ; « Les thèmes johanniques dans la RB et leur
actualité », Collect. Cisterc. 37 – 1975 – pp. 3-10).
La vie
consacrée est un engagement pour toute la vie par lequel on entre en
« Christiformation ». Si le moine persévère dans le monastère, c’est
qu’il persévère dans son rapport existentiellement priant à Jésus Christ.
La
« conversion de mœurs », c’est la conversion monastique ou conuersatio,
le changement de vie, l’abandon progressif des habitudes du siècle. Conuersatio
dériverait de conuersare ( et non de conuersari), selon Christine
Mohrmann (cf. « La langue de S. Benoît »..., Maredsous, 1955). Ainsi conuersatio
ici est synonyme de conuersio. Cette stabilité engendre le progrès des
vertus acquises qui permettent de mener à bien la « conversion des
mœurs ». Alors, le cœur se dilate et « l’on court sur le chemin des
commandements de Dieu ». Voilà l’obéissance !
Le
rite de la profession (RB 58,
17-29)
L’engagement
tripartite examiné ci-dessus s’inssère dans le rite de la profession monastique
que S. Benoît décrit fort sobrement :
Ø
Le novice
fait sa promesse dans l’oratoire (ce que nous appelons l’église, aujourd’hui),
« devant tous », c. à d. en présence de tous les Frères et des
fidèles présents. A l’expression « devant tous » (coram omnibus)
répond le nécessaire complément : « devant Dieu et ses saints »
(coram Deo et sanctis eius). Le motif est évident : se détourner de
son engagement, c’est se moquer (inridere) et donc se condamner (se
damnare). Benoît entend conférer un caratère religieux et solennel au rite
de profession.
Ø
La
« demande » (petitio) est rédigée « au nom des saints
dont les reliques sont en ce lieu », ; cela marque encore davantage
le caractère sacré de l’acte, mais aussi le lien très souligné ici entre
l’Eglise de la terre et l’Eglise du ciel, par le sacramental des reliques.
Cette « pétition » est aussi rédigée
en mentionnant l’Abbé, pour actualiser l’insertion dans la Tradition
vivante et l’Histoire. La petitio est déposée sur l’autel : geste supplémentaire marquant le lien entre la terre et le ciel,
entre l’aspirant-moine et le Christ dont l’autel est le symbole.
Ø
Il n’est
pas explicitement dit que ce rite s’effectue à l’offertoire de la Messe, mais
c’est probable, car en RB 59, 2 et 8, le législateur demande, au cours du rite
de « l’oblation des enfants », d’unir la petitio et l’oblatio
(c. à d. le pain et le vin offerts par les fidèles). La mention de « la
nappe de l’autel » (palla altaris) en 59, 2 confirme cette
interprétation. Ainsi, tout dans ce rite prend un relief particulier ; la
profession monastique acquiert sa pleine dimension théologique. Elle exprime
dans le rite symbolique le don de soi-même au Christ (voir A. Borias, « Le
Christ dans la RB », Rben 82 – 1972 -, p. 133).
Ø
Le verset
116 du Ps 118, entonné par le novice et repris trois fois par la communauté,
est très significatif ; c’est comme le dit H. Urs von Balthasar, « le
passage pour le moine de l’anthropologie (spirituelle incluse), à la
Christologie » (‘Les Thèmes’..., p.6). « Le moine offre ainsi son
oblation personnelle à l’offrande eucharistique du Christ à son Père » (A.
Borias). Et le Seigneur présente l’offrande du moine à son Père unie à son
propre sacrifice. Tel est le sens de la profession monastique pour Benoît.
Ø
Le v. 23
est ecclésiologiquement parlant. Le néoprofès doit se prosterner aux pieds de
chacun de ses Frères « pour qu’on pris pour lui ». Et à partir de ce
jour, il sera considéré comme « membre de la communauté » (et
iam ex illo die in congregatione reputetur). La prière des Frères est donc
le premier secours (auxilium ) reçu par le jeune profès de sa
communauté : il n’y en a pas de plus souhaitable puisqu’elle est
communicatrice de grâce
Ø
Les vv.
24-25 sont une parenthèse sur la « désappropriation » et son caractère
extrême du fait de l’appartenance à Dieu et à la communauté ;
désappropriation qui va « jusqu’à son propre corps ». Or, la libre
disposition du corps est l’expression majeure dela liberté individuelle. Et
c’est à cela que renonce volontairement et librement le moine qui, dans le
Christ trouve la totale liberté (cf. Ga 5, 1 : « Si le Christ nous a
libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres »).
Ø
Le
dépouillement des vêtements du siècle et la vêture, sont eux aussi symbolique,
et une conséquence de la totale désappropriation.
Ø
L’Abbé
prend la petitio sur l’autel, signe de son acceptation par Dieu.
L’oblation transcende la durée puisqu’elle est scellée à celle du Christ. Elle
devient signe de la fidélité de Dieu à son Alliance.
Ø
Cependant,
la liberté du jeune-profès n’est pas entravée pour autant ? C’est
librement qu’il est entré et s’est offert. S’il décidait, « sur une
suggestion diabolique », dit RB, ou par motif de conscience, de
quitter le monastère, il pourrait reprendre ses vêtements du siècle et partir,
« chassé du monastère ». Mais sa pétition demeurera au monastère,
comme le gage de son appartenance à cette communauté. Benoît, dans une
délicatesse admirable, laisse la porte ouverte à un éventuel retour... (cf. Lc
15, 11-32).
L’entrée des enfants, des prêtres et des moines étrangers (RB 59-61)
L’oblation des enfants
(RB 59)
Chapitre
« peu libéral », voire « inhumain » ? On l’a prétendu.
Le lien établi par l’oblation était-il indissoluble ? L’enfant parvenu à
l’âge raisonnable pouvait-il se déterminer librement, soit à demeurer au
monastère, soit à le quitter pour retrouver le monde ?
La
comparaison des ch. 58 et 59 nous mettra sur la voie des réponses aux questions
énoncées ci-dessus.
Il y a
une véritable correspondance entre « la profession des adultes » et
« l’oblation des enfants ». Les précautions prises relativement aux
âges concernent la conduite future des parents, non celle des intéressés.
Rien ne
permet de supposer que S. Benoît prévoyait pour ces enfants
« offerts » une ratification consciente et libre de leur involontaire
consécration au service de Dieu dans la vie monastique. Au contraire, Benoît
les considère toujours comme de véritables moines, aussi petits qu’ils
fussent.
La
rudesse de cette page est un reflet de la mentalité du temps ; elle serait
aussi, selon A. de Vogüe, un reflet de « la tendance de l’Eglise
occidentale à sacrifier la liberté individuelle à une notion assez matérielle
de la consécration associée aux droits de la puissance paternelle »
(« Commentaire »..., pp. 1355-1368).
La RB
distingue les fils de nobles (vv. 1-6), les fils de gens moins riches (v. 7),
et les fils des pauvres (v. 8). La cédule de pétition est en chaque cas la
pièce essentielle. L’enfant est offert « passivement, comme le pain et le
vin à l’autel, non encore considéré comme personne, mais plutôt comme un
objet » (o.c. p. 1356).
Les
traits juridiques de cette page sont surabondants (vv. 3-6) ; ils nous
feraient pencher vers un certain reproche d’insensibilité adreesé à
Benoît ; il s’agit, selon le Droit de l’époque, de déposséder tellement
l’enfant, que tout chemin de retour vers le siècle lui soit fermé. La
persévérance de l’oblat est directement liée à la carence absolue et définitive
de biens matériels. Est-ce là « dureté de cœur » ou
« sagesse » provenant d’un puissant esprit de foi ?
L’admission
de prêtres et de clercs (RB 60)
Remarquons
l’ambiguité du titre : « Des prêtres qui désireraient habiter dans le
monastère » ; ce n’est ni complet, ni totalement explicite.
S. Benoît
distingue nettement « l’ ordre sacerdotal » (v. 1) et les clercs de
rang inférieur (v. 8). Mais s’agit-il d’autre chose que de prêtres ou de clercs
qui « désirent simplement vivre au monastère » ? Ou bien,
s’agit-il vraiment de ceux d’entre eux qui sollicitent leur incorporation dans
la communauté monastique ? Pour bien comprendre cette page, il convient de
la lire à la lumière de la tradition prébénédictine.
Fidèle à
la tradition et à l’essence même de la vie mpnastique, Benoît se refuse à céder
aux clercs en général le gouvernement du monastère. Il sait d’expérience, sans
doute, que la quête de pouvoir est parfois liée à la fonction cléricale. Il
faut donc s’en prémunir. Le Maître se refuse même à recevoir des prêtres sinon
en qualité de peregrini (hôtes –pèlerins). Benoît accepte, lui, de les
accueillir comme de véritables moines à certaines conditions :
-
d’abord
Benoît temporise ; aucune précipitation.
-
Si le
candidat persiste, qu’il sache qu’il lui faudra « servir sous toute la
discipline de la Règle » et « qu’on n’en relâchera rien pour
lui » (vv. 2-3). La citation de Mt 26, 50 - parole du Seigneur adressée à
Judas -, prend ici une force particulière : tout prêtre ou clerc serait-il
un traître qui s’ignore ? Une seule échappatoire pour un juste
discernement, un propos d’humilité de la part du candidat, c. à d.
l’observance stricte de la RB et une vraie stabilité (v. 9) .
Benoît ne
précise cependant pas si, admis, les prêtres ou les clercs doivent être
éprouvés comme les novices. La vie commune peut largement en tenir lieu. Il
n’exige que l’observance totale de la Règle et la stabilité. Les privilèges du
sacerdoce sont respectés par le législateur qui lui-même n’était pas
prêtre : leur concession et leur usage dépendront cependant de l’Abbé qui,
prêtre ou non-prêtre, a l’autorité dans le monastère puisqu’il y tient
« la place du Christ ».
Benoît ne
tolère aucune présomption de la part des prêtres. Il attend d’eux un exemple
d’humilité (v. 5) en restant à leur place ! c’est à dire à leur
rang d’entrée fût-il le dernier.
L’admission
des moines étrangers (RB 61)
Il s’agit
là d’une dernière sorte de postulants : celle des moines-pèlerins ou
étrangers.
Le
« moine-pèlerin » (monachus peregrinus) vient « de terres
lointaines » (v. 1). L’objet de son voyage n’est pas précisé, pas plus que
le genre de monachisme qui est le sien (cf. RB 1). A son arrivée au monastère,
il ne demande pas d’entrer en communauté, mais seulement d’être reçu comme hôte
(hospes) ; il pourra être reçu « autant de temps qu’il le
désire », pourvu qu’il se conforme aux coutume du lieu et s’en contente.
Les
exigences préalables sont de deux sortes :
1.
Ne pas
perturber les Frères par ses propres exifgences.
2.
Se
contenter de ce qu’il trouve dans ce lieu (vv. 1-3)
S’il fait
avec pertinence quelqu’observation « raisonnablement, et avec l’humilité
de la charité », on lui prêtera attention. Plein de foi en la Providence,
Benoît suggère à l’Abbé d’y voir un cas possible d’appel du Seigneur qui nous
parle par des médiations humaines.
Et le
moine étranger qui, comme hôte, s’est montré humble, pourra solliciter son
aggrégation dans la communauté ; la qualité de son comportement à
l’hôtellerie permettra déjà un sain discernement.
Ce qui
est avant tout recherché par le législateur, c’est le progrès spirituel des
Frères de la communauté qui peut se voir accru et stimulé par un apport de
choix, ou déterrioré par un sujet irrespectueux de la Règle et donc des Frères
(v. 10).
Le v. 11
peut faire difficulté : ne peut-on y voir une promotion qui pourrait faire
ombrage aux autres Frères ? L’Abbé a ce pouvoir, du fait de son charisme
de discernement et d’autorité, ayant en vue de récompenser l’humilité des
petits et d’abaisser l’orgueil des envieux (cf. v. 12 ; voir A. de V.
« Commentaire », pp.1381-83).
S. Benoît
se montre là encore homme spirituel et pasteur d’âmes plein de sollicitude et
de sagesse.