Lundi, 26 novembre 2007 – 34ème
semaine, année impaire
Daniel 1, 1…20 ; Luc 21, 1-4
Abbaye de Soleilmont
Homélie
Tout au long de
cette semaine, la dernière du cycle liturgique, c’est le Livre de Daniel qui
nous accompagnera comme première lecture à la Messe. C’est un écrit qui, tout en ayant des
éléments historiques, appartient au genre apocalyptique. Il fut écrit dans un temps de persécution, au
moment de la résistance des Maccabées. S’y révèle un messianisme qui nourrit
l’attente d’un sauveur désigné comme le « Fils de l’Homme ». Ce qui nous prépare déjà à l’Avent.
De
même, tout au long de la semaine, les Évangiles, tirés des derniers chapitres
de l’Évangile de Luc, nous parlerons de la fin des temps. Et l'une des
caractéristiques de cette fin des temps selon l'Évangile, sera le renversement
des situations: Ceux
qui auront été sous-privilégiés et opprimés en cette vie seront dans la joie,
et les privilégiés de ce monde qui auront vécu sans compassion pour les moins
fortunés seront dans les douleurs. C'est
le contexte dans lequel il faut entendre l'Évangile de ce matin.
On y trouve un contraste
entre les riches qui déposent des sommes importantes dans le trésor du
Temple.et la pauvre veuve qui y dépose sa toute petite pièce d'argent.
Les touristes bien fortunés
qui voyagent dans les pays du tiers-monde ont souvent l'occasion de donner de
la monnaie aux pauvres, surtout aux enfants pauvres qui courent après eux.
C'est un geste certainement recommandable.
En même temps, j'ai toujours trouvé qu'il y avait quelque chose de
choquant à cette situation. La veuve de
l'Évangile, au contraire est une pauvre qui donne aux pauvres. Elle donne de son essentiel et non de son
superflu.
Et cela nous enseigne
quelque chose de très beau sur Dieu. Si Dieu était un riche, donnant de son
abondance, il serait mieux représenté par les riches de notre Évangile que par
la veuve déposant son obole. Mais ne peut‑on pas dire que Dieu nous
donne non de sa richesse, mais de sa pauvreté?
Oui, parce que Dieu s'est révélé en Jésus‑Christ,
qui s'est fait pauvre avec nous et pour nous.
En Jésus de Nazareth Dieu ne nous est pas apparu comme un riche touriste
lançant de la monnaie à des enfants pauvres, mais comme un pauvre partageant
avec nous sa vie.
Si l'Évangile n'était
qu'une condamnation des riches, nous pourrions nous sentir bien, puisque la
plupart d'entre nous pouvons nous considérer sinon comme des pauvres, du moins
pas précisément comme des riches. Et
donc, les paroles dures (ou au moins exigeantes) de l'Évangile à l'égard des
riches ne sont pas pour nous. Mais là
n'est pas le vrai message: Le message de
Jésus est qu'il attend que nous donnions non pas tellement de ce que nous avons
(peu ou beaucoup) mais de ce que nous sommes, de notre propre vie; que nous
vivions au service de ceux qui nous entourent ou qui se trouvent sur notre
chemin.
Et
c’est là l’âme de toute vie communautaire.
Mardi, 27 novembre 2007 -
34ème semaine, année impaire
Daniel 2, 31-45; Luc 21,
5-11
Abbaye de Soleilmont
Homélie
Durant cette dernière semaine de l'année liturgique, le lectionnaire nous tient en quelque sorte en suspense sur deux plans à la fois: aussi bien dans les prophéties du Livre de Daniel que dans l'Évangile où nous avons aujourd'hui et dans les jours suivants diverses parties successives du grand discours eschatologique de Jésus qui, dans l'Évangile de Luc est évidemment centré sur Jérusalem et plus particulièrement le Temple.
Dans la première lecture, Daniel explique au roi Nabuchodonosor le songe prémonitoire qu'il a eu. On y perçoit la faiblesse innée de tous les empires et de toutes les grandeurs humaines. L'être humain est né de l'argile et retournera à l'argile, malgré tous les revêtements d'argent ou d'or dont il peut s'orner durant son existence terrestre. Heureusement, il y a en cet être humain un esprit, une âme qui transcende aussi bien cette caducité que cette gloire. Il a en lui une semence d'éternité et cette semence d'éternité est la seule qu'il vaille vraiment la peine de cultiver.
Le sens plénier de l'Évangile d'aujourd'hui ne nous sera révélé qu'à la fin du récit. Ne faisons donc pas come ceux qui, en lisant un roman, vont voir tout de suite à la fin pour voir comment l'histoire se termine. Contentons-nous de méditer sur la partie du discours qui nous est livrée aujourd'hui. Le récit commence par l'admiration des disciples. Ils admirent deux choses, d'abord la beauté matérielle du temple puis les dons des fidèles. Jésus leur dit alors que tout cela sera détruit un jour, ce qui, pour un Juif, signifiait la fin des temps. C'est pourquoi les disciples demandent à Jésus deux choses: a) quand est-ce que cela arrivera et b) quel en sera le signe précurseur.
Nous verrons plus tard, cette semaine, que Jésus ne l'entend vraiment pas de la fin du monde au sens où l'univers serait anéanti et cesserait d'exister. Dans sa première réponse, à laquelle nous nous arrêtons aujourd'hui il les met simplement en garde contre toutes les fausses prophéties qui pourraient annoncer le retour du Messie et la fin des temps. N'en croyez rien dit Jésus.
Bien plus Jésus les met en garde contre la tentation de voir l'annonce de la fin du monde dans les guerres et les cataclysmes naturels. Il faut que tout cela arrive dit Jésus. Mais ce n'est pas cela la fin du monde.
Mais alors que signifie l'expression « fin du monde » ? La suite du texte nous en donnera la réponse au cours des prochains jours. Attendons avec patience !
28 novembre 2007 – Mercredi
de la 34ème sem. impaire
Daniel 5, 1...28 ; Luc
21, 12-19
Abbaye de Soleilmont
Homélie
Chères
Sœurs et Frères,
La première lecture, nous montre le
jeune Daniel prisonnier à la cour du roi de Babylone, non seulement plein de
Sagesse reçue d’en haut, mais aussi totalement dépourvu de peur. Il ose parler avec force et courage au plus
puissant des rois de la terre, lui reprocher ses crimes et lui annoncer le
démantèlement de son royaume, tout comme Jean-Baptiste, plusieurs siècles plus
tard osera parler avec courage et clarté au roi Hérode. Ce sont des hommes sans peur parce qu’ils
n’ont rien à perdre. Nous avons peur des
autres et des circonstances lorsque nous avons des illusions de pouvoir, des
ambitions, des rêves ou des trésors à protéger.
Si nous sommes pauvres, de la pauvreté des béatitudes, sans rien à
défendre et à protéger et donc sans rien à perdre, alors nous pouvons être
libérés de toute peur.
De même, dans l’Évangile, Jésus ne
cesse de répéter à ses disciples « N’ayez pas peur ». Dans la partie du grand discours
eschatologique que nous lisons aujourd’hui, toujours dans la version de Luc,
Jésus, après avoir annoncé la destruction du Temple de Jérusalem, continue en
annonçant les difficultés, les persécutions et les souffrances qu’auront à
subir ses disciples.
Il les prévient que lorsqu’ils
seront traînés devant des tribunaux et des juges. Ils seront livrés par leurs
parents, leurs frères, leurs familles et leurs amis. Certains seront condamnés
à mort. Cependant il les avertit de ne pas se préoccuper de préparer leur
défense, car c’est d’en haut qu’ils recevront, comme Daniel, les paroles de
sagesse dont ils auront besoin. Ces
paroles de sagesse ne les empêcheront pas, en plusieurs cas, d’être mis à
mort ; mais même alors ils seront entre les mains de Dieu. Alors l’absence
de peur ne suffira pas ; il leur faudra la persévérance, et celle-ci sera
leur planche de salut : « C’est par votre persévérance que vous
obtiendrez la vie. »
Nous n’avons pas à affronter des
situations aussi dramatiques que celles décrites dans ce discours
apocalyptique, mais nous avons tous à affronter à certains moments de notre vie
des situations difficiles de diverses natures.
Demandons au Seigneur d’être alors toujours dépouillés de toute crainte,
et surtout d’être munis de cette persévérance qui nous conduise à la vie
éternelle.
29 novembre 2007 – Jeudi de la 34ème sem. impaire
Daniel 6, 12-28 ; Luc 21, 20-28
Abbaye de Soleilmont
Homélie
Chères Sœurs et Frères,
Nous poursuivons notre lecture du
Livre de Daniel. Hier nous avons vu
celui-ci interpréter pour le roi Darius les mots miraculeusement écrits sur le
mur de sa salle à manger. Aujourd’hui
nous le voyons victime de la jalousie de certains et jeté dans la fosse aux
lions, pour en ressortir miraculeusement protégé. La scène se termine cependant par une
tuerie. Le roi Darius après avoir fait sortir
Daniel de la fosse aux lions y fait jeter ses accusateurs avec leurs femmes et
leurs enfants. On est assez loin d’une
morale évangélique, et du respect des innocents sans parler du respect de la
vie humaine tout court. Il faut
interpréter ce récit comme faisant partie d’une longue histoire où le Peuple
d’Israël fait l’expérience d’un Dieu tout proche, qui prend part à sa vie, à
ses luttes, à ses défaites et ses victoires.
Il faudra attendre le Nouveau Testament pour avoir la révélation d’un
Dieu d’amour et de justice.
En ce qui concerne la Révélation de
la « fin des temps » dont parle Jésus dans son grand discours
eschatologique, je vous invite à prendre dans son ensemble le reste du
discours, d’autant plus que la lecture en sera interrompue demain par la fête
de saint André avec ses lectures propres.
La « fin des temps » pour Jésus,
surtout si l’on prend l’ensemble de ses prophéties à ce sujet dans les trois
évangiles synoptiques, ne signifie pas un moment où l’univers créé sera détruit
et cessera d’exister. Cette expression
signifie plutôt le but, la finalité ultime vers laquelle tend toute la marche
de l’histoire. Elle signifie
l’achèvement ultime de l’univers tel que prévu par le créateur et non sa
destruction. Il y aura des guerres, mais
ce ne sera pas cela la fin. Il y aura
des tremblements de terres et des cataclysmes naturels, mais ce ne sera pas la
fin. Il y aura des persécutions, mais
cela ne sera pas non plus la fin.
Finalement l’Évangile sera annoncé à toutes les nations et le Fils e
l’Homme apparaîtra dans toute sa puissance et sa gloire. Alors la fin, le but ultime de la création
sera réalisé. Les hommes pourront
relever la tête car leur libération sera arrivée.
Tous les grands récits apocalyptiques
tendent non pas vers une destruction, mais une pleine réalisation du mouvement
de retour de l’univers créé vers Dieu des mains duquel il est sorti.
Réjouissons-nous, faisons taire toutes nos
peurs et vivons non dans l’attente de la destruction du monde mais dans
l’attente d’un plein achèvement et de chacun de nous et de toute la
création. Dieu ne détruira jamais ce
qu’il a créé par l’amour, mais le transformera en faisant croître en plénitude
la semence de vie divine qu’il y a placée.