Célébration de la Vigile Pascale

(23 avril 2000)

Introduction à la bénédiction du feu

            Il y eut une nuit et il y eut un matin.

            L'obscurité dans laquelle nous sommes rassemblés est le symbole de la longue nuit au cours de laquelle l'humanité a marché dans le désert avant la venue du Messie.  La longue nuit de nos quêtes et de nos égarements.

            La flamme autour de laquelle nous sommes rassemblés est le symbole du matin de Pâques, du Christ ressuscité, qui apporte lumière et chaleur à notre monde souvent obscur et froid.

            En allumant chacun de nos cierges à l'unique cierge pascal, lui-même allumé à cette flamme, nous exprimons notre foi en Jésus Ressuscité, source de lumière, de chaleur et de vie pour nous tous.

Introduction à la liturgie de la Parole

            Lorsqu'un groupe d'amis, ou une grande famille, séparée par les circonstances de la vie, se retrouvent ensemble, ils aiment parler du temps passé – du bon vieux temps.  Ils aiment se rappeler le printemps de leur amitié et de leur amour.  Ils racontent les luttes et les épreuves qu'ils ont vécues ensemble, tout comme leurs jours de bonheur.

            C'est ce que nous ferons ce soir.

            En tant qu'enfants de Dieu et disciples du Christ, nous formons une grande famille ayant une longue histoire.  C'est l'histoire d'une relation d'amour avec Dieu - une relation qui, à cause de nous, a eu ses hauts et ses bas...

Première lecture

             Et tout d'abord écoutons comment tout cela a commencé (Gen 1,1-2,2)

Deuxième lecture

            Abraham est notre Père dans la foi.  Vivant au milieu de nations où les sacrifices humains étaient chose courante, et croyant que Dieu exigeait cela de lui, il était prêt à sacrifier son fils unique, le fils de la promesse.  Mais Dieu ne veut pas de sacrifices humains.

Troisième lecture

            Dans la mémoire collective d'Israël, la sortie d'Égypte est demeurée le symbole par excellence de l'intervention de Dieu en faveur de son peuple.  Il en fut de ce récit un peu comme des histoires de pêche où le poisson rallonge chaque fois  qu'on les raconte.  Dans les versions successives du récit les détails deviennent de plus en plus fabuleux.  L'essentiel est la conscience qu'avaient les Juifs d'avoir été délivrés par un Dieu qui les aimait.

Quatrième lecture

            Les Grands Prophètes d'Israël se sont plu à décrire les relations de Dieu avec le peuple d'Israël comme une relation pleine de tendresse entre des époux – une relation qui survit à toutes les tempêtes.  La lecture d'Isaïe que nous allons entendre en est un bel exemple

Cinquième lecture

            Oui, cette relation fut souvent rocailleuse! Cette autre lecture d'Isaïe est à la fois un appel à la conversion et un rappel de la fidélité indéfectible de Dieu.

 

Sixième lecture

            À  travers les prophètes, Baruch par exemple, Dieu enseigne à son peuple la Sagesse

 

Septième lecture

            À tous les problèmes d'infidélité de l'homme il n'y a finalement qu'une solution, c'est que Dieu lui-même lui enlève de la poitrine son coeur de pierre pour y mettre un coeur de chair et lui donne un esprit nouveau.

Epître de Paul aux Romains

            À la fin des temps, le Fils de Dieu est venu.  Il est mort et il est ressuscité.  Paul en tire les conséquences pour notre vie de tous les jours.

 

H O M É L I E

(La déchirure du voile du Temple)

            Cet Évangile (Marc 16,1-8) s'ouvre avec une touche toute féminine et une odeur de parfum.  Trois femmes sont allées acheter des parfums et viennent au tombeau pour embaumer le corps de Jésus.  Pour comprendre leur geste, replaçons-le dans son contexte.

            Au cours de la présente année liturgique, nous suivons en général l'Évangile de Marc.  C'est son récit de la Passion que nous avons lu dimanche dernier, et c'est sa description des événements du matin de Pâques que nous lisons cette nuit.  Les récits de Marc sont précis et concis; chaque phrase y est pleine de sens.  Il nous faut donc porter attention à tous les détails.

            Immédiatement après la mention de la mort de Jésus, Marc dit que le voile du Temple s'est déchiré en deux.  De quel voile s'agit-il?  Il ne s'agit probablement pas du voile qui se trouvait à l'entrée du Saint des Saints, où seul le Grand Prêtre pouvait entrer.  Il s'agit plutôt du voile qui séparait la partie principale du Temple, ouverte aux Juifs de sexe masculin, de la partie extérieure où étaient admis les Gentils et les femmes. 

            D'ailleurs, Marc ajoute tout de suite deux phrases qui nous orientent dans le sens de cette interprétation. Tout d'abord il relate les paroles de l'officier militaire romain, donc un Gentil, qui fait cet acte de foi:  "Vraiment cet homme était fils de Dieu", et une autre phrase au sujet des femmes présentes au Calvaire, et qui seront également témoins de la Résurrection.

            Selon la Loi d'Israël, les Païens étaient exclus du salut promis aux Juifs et le témoignage donné par une femme n'avait aucune valeur légale.  La déchirure du voile du Temple signifie que la pleine participation à la Communauté Chrétienne née du côté du Christ est ouverte à toute personne, sans égard aux différences de sexe, de nationalité ou de religion.

            Les disciples de Jésus formaient une grande famille, où chacun et chacune avait une relation particulière avec Jésus.  Il y avait des hommes, parmi lesquels trois avaient une relation privilégiée: Pierre, Jacques et Jean, qui furent les témoins de la Transfiguration et de l'agonie à Gethsémani.  Il y avait aussi plusieurs femmes.  À leur sujet Marc dit trois choses: a) qu'elles l'avaient suivi en Galilée;  b) qu'elles le servaient;  c) qu'elles étaient montées avec lui à Jérusalem. 

            "Suivre Jésus" veut dire être son disciple.  Le "servir" veut dire participer à sa diaconie, à son ministère.  Être "monté avec lui à Jérusalem"  veut dire avoir accepté toutes les conséquences de cette relation et être devenu témoin de sa mort et de sa résurrection. 

            Parmi ce groupe de femmes, trois avaient une relation toute particulière avec Jésus et eurent probablement un rôle important dans l'Église primitive.  C'étaient Marie de Magdala, Marie la mère de Jacques, et Salomé.  Nous les trouvons toutes trois aux pied de la croix, avec Marie mère de Jésus et Jean (alors que les autres Apôtres ont fui);  nous les retrouvons au tombeau le matin du premier jour de la semaine, avec leurs parfums.  Elles sont les premières à recevoir l'annonce de la Résurrection et les premières à en témoigner.

            La déchirure du voile du Temple est donc pleine de sens profond, même si on a constamment essayé de le recoudre au cours des siècles!...  Elle signifie que Jésus a fait tomber les barrières entre Israël et les nations, entre Juifs et païens, entre hommes et femmes.  Les mots de l'ange aux trois femmes mentionnent la chute d'une autre barrière – celle entre la chair et l'esprit, entre le corps et l'âme.  L'ange qui apparaît aux trois femmes semble s'efforcer de leur faire comprendre que le Christ ressuscité et glorieux qui leur apparaîtra bientôt, est bien celui qui reposait mort dans le tombeau.  Il leur indique l'endroit précis où son corps reposait. 

            De combien de particularités ne sommes-nous pas les esclaves: particularités de race, de sexe, d'éducation, de religion.  En cette nuit sainte, efforçons-nous de surmonter toutes ces barrières et de passer tous ensemble entre les pans déchirés du voile du temple, de pénétrer ensemble dans le Temple Nouveau à travers la porte ouverte dans le côté du Christ afin d'arriver un jour à être "un" comme lui et son Père sont Un.