Vie religieuse en général
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Soyez parfaits comme
votre Père céleste est parfait
L’idéal de vie consacrée
à travers les siècles
« Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait » Cet
appel, Jésus l’a adressé à tous ses disciples ; c’est la vocation de tout
Chrétien. De certains de ceux qui le suivaient il a cependant exigé des gestes
radicaux qu’il n’a pas demandés à tous. Au jeune homme riche, par exemple, il a dit : « Va, vends tout ce que tu as et viens,
suis-moi. » Dès la première génération chrétienne des femmes et des
hommes ont senti l’appel à adopter ces attitudes radicales comme mode permanent de vie. Dès lors, ce qu’on appelle
aujourd’hui vie consacrée était né. Cette façon particulière de marcher à la
suite du Christ et de vivre les engagements du baptême a pris des formes très
variées tout au long des siècles et a reçu des noms divers, mais elle est aussi
vieille que l’Église et son fondateur n’est autre que le Christ.
Durant les
premières générations chrétiennes ceux qui choisirent de vivre le célibat pour
le royaume le firent généralement au sein de leurs familles et au service de
l’église locale ; mais certains vivaient dans la solitude en marge de
l’église locale mais en communion avec celle-ci. Aux femmes qui choisirent
cette forme de vie on donna le nom de vierges et aux hommes celui d’ascètes,
bien que les deux noms valaient aussi bien pour les unes que pour les autres.
Dès les premières générations chrétiennes les Églises locales eurent ces
ascètes et surtout ces vierges en grand respect. On prenait graduellement conscience qu’il y
avait dans leur mode de vie une façon particulière de vivre la fidélité au
Christ et aux engagements du baptême.
Cette
forme de vie se développa spontanément dans toutes les Églises d’Orient et
d’Occident. Elle fut un fruit de la
vitalité des Églises locale et non, comme le voudrait une vision répandue mais
sans fondement historique, en réaction à la perte de ferveur au sein de ces
Églises. Lorsque, vers le début du quatrième siècle, leur forme de vie eut
acquis un visage bien déterminé et une place reconnue au sein de l’Eglise, on
donna à ces hommes et à ces femmes le nom de moines et de moniales. Cependant
ce qu’ils vivaient n’était pas une réalité nouvelle mais restait en pleine
continuité avec l’ascétisme vécu dans l’Église au cours des siècles précédents
et qui devait son origine au Christ lui-même.
L’évolution
subséquente fut très différente en Orient et en Occident. L’Orient ayant une
vision plus globale de la réalité ecclésiale, le monachisme y joua tout au long
des siècles, et jusqu’à nos jours, les divers rôles pour lesquels des formes
nouvelles de vie consacrée se développèrent en Occident. Le droit occidental allait en effet connaître
durant quelques siècles une réduction de ces formes à une seule avant qu’un
mouvement inverse de diversification se développe.
Dans
l’Église latine les ascètes vivant en solitude ou en communauté, au sein de
l’Église locale ou dans le désert, trouvèrent durant plusieurs siècles leur
inspiration dans des documents spirituels qu’on appelait des
« règles ». À partir de la
grande réforme ecclésiale dite « carolingienne », à la fin du 8ème siècle, une de ces règles, dont la grande sagesse était universellement
reconnue, fut imposée à quiconque voulait vivre la vie monastique. La
législation ecclésiale ne reconnut plus dès lors, dans la pratique, comme forme
spéciale de vie chrétienne – on dirait aujourd’hui « comme forme de vie
consacrée » -- que celle-ci : la vie monastique selon la Règle de
saint Benoît. Mais la vie étant plus forte que la loi, un nouveau mouvement de
diversification allait bientôt commencer.
Des évêques qui avaient souvent été
moines voulurent avoir autour d’eux un clergé dont au moins certains
adopteraient, à l’instar des moines, un genre de vie commune où la prière en
commun aurait un rôle important. C’est
ainsi qu’apparut la forme de vie canoniale. Puis, répondant à de nouvelles
situations ecclésiales et des besoins nouveaux d’évangélisation, les formes de
vie monastique se diversifièrent : Cisterciens, Camaldules, Chartreux,
etc. apparurent dès les 11ème et 12ème siècles.
À partir
du 13ème siècle des groupes se formèrent pour répondre à des besoins
pastoraux précis au sein de l’Église tout en vivant le radicalisme évangélique autant
que les formes ascétiques antérieures. Contrairement aux moines qui devaient
vivre du travail de leurs mains, ces nouveaux apôtres désiraient consacrer tout
leur temps et leurs énergies à leur mission pastorale, comptant sur le peuple
chrétien pour se procurer le nécessaire à leur subsistance. C’est pourquoi on les appela les Ordres
Mendiants. Les plus connus sont les Dominicains et les Franciscains.
Le soin
des malades, l’enseignement, l’hospitalité avaient souvent été dans le passé
des tâches qui retombaient sur les monastères. De nouveaux groupes se formèrent dans les siècles suivants avec la
mission précise de répondre à tel ou tel de ces besoins ou de nouvelles
exigences d’évangélisation. Certains de ces groupes doivent leur origine à un
fondateur ou une fondatrice ayant un charisme bien marqué et une spiritualité propre qu’il communiqua à
ses disciples, par exemple les Jésuites, qui doivent leur origine à saint
Ignace de Loyola.
Au 18ème et 19ème siècle de nombreuses communautés naquirent du désir d’une
femme ou d’un prêtre de regrouper quelques personnes pour répondre à des
besoins humains (surtout l’enseignement et le soin des malades) dans leur
localité. D’abord communautés diocésaines plusieurs se répandirent ensuite en
dehors de leur diocèse et de leur pays pour devenir des congrégations
internationales. Il est souvent difficile de voir ce qui les distingue les unes
des autres. De plus, l’enseignement et les soins hospitaliers étant assumés par
la société civile dans la plupart des pays, un grand nombre de ces communautés
se sont réorientées, surtout depuis Vatican II vers des services pastoraux et
sociaux très diversifiés.
Apparurent
à partir du 19ème siècle des sociétés de vie apostolique ayant
plusieurs éléments communs avec la vie religieuse mais ne comportant pas les
« voeux » considérés comme constitutifs de
la vie religieuse. C’est le cas, par
exemple, des Pères Blancs, appelés maintenant Missionnaires d’Afrique. Un peu
plus tard apparurent les Instituts Séculiers, considérés par l’Église comme une
forme authentique de vie consacrée, vivant cependant non en communauté mais au
sein de la société, pour y porter ainsi le message évangélique.
Les formes
traditionnelles de vie religieuse ayant souvent depuis un demi-siècle une force
moins grande d’attraction, diverses communautés sont nées auxquelles on a donné
le nom générique de « communautés nouvelles ». Certaines d’entre
elles incarnent vraiment une forme renouvelée de vie consacrée alors que
d’autres, paradoxalement, constituent un retour à des formes préconciliaires.
Un phénomène vraiment nouveau est l’apparition de « familles
spirituelles » dans lesquelles se retrouvent, autour d’une même spiritualité
et d’un même esprit de famille, des laïcs et des prêtres, des personnes mariées
et d’autres s’engageant au célibat et faisant les vœux religieux traditionnels.
Certains de ces groupes sont de droit diocésain, d’autres de droit pontifical.
La plupart de ces « communautés nouvelles » ont vécu – ou vivent --
comme l’avaient fait toutes les communautés anciennes, le moment difficile et
critique du passage à la deuxième génération.
À côté de
ces communautés, il faut noter des regroupements de laïcs, que les Italiens
appellent de préférence des « mouvements » et dont plusieurs sont
reconnus par Rome comme « Communautés internationales de laïcs ».
Bien que ne relevant pas de la Congrégation romaine « pour les Instituts
de Vie Consacrée et les Communautés de Vie Apostolique », ces mouvements
ont beaucoup en commun avec la vie consacrée. Leur défi principal reste d’apprendre à oeuvrer à l’échelle de l’Église universelle, souvent selon une vision ecclésiale bien
particulière, tout en respectant l’autonomie des Églises locales.
Armand VEILLEUX
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