Écrits et conférences d'intérêt général



 

 

 
 

La Nouvelle Évangélisation à laquelle nous convie Benoît XVI est la mission de tous les Chrétiens. Il serait malheureux qu’elle soit confisquée par quelques mouvements nostalgiques du passé.

 

 

Quoi de neuf ?

 

Durant les premières années de son pontificat Jean-Paul II parlait souvent du besoin d’inculturer le message évangélique. Cette notion d’inculturation n’était pas nouvelle.  Elle était d’abord apparue dans le document final de la première assemblée de la Fédération des Conférences épiscopales d’Asie à Taipei en 1974. Bien avant, dès 1962, le père J. Masson, s.j. avait parlé d’un « catholicisme inculturé » (NRT 84 [1962] p. 1038).

 

Inculturation

 

L’inculturation n’est pas simple adaptation de la foi à une culture.  Il n’y a véritable inculturation que lorsqu’il y a une authentique rencontre entre l’Évangile et une culture. Dans cette rencontre les deux pôles se trouvent enrichis : le donné évangélique acquiert un nouveau mode d’expression et la culture s’en trouve purifiée et acquiert une nouvelle finalité.

 

Quelques années plus tard apparût,  dans les textes pontificaux, la notion de « seconde évangélisation ». Cette notion n’était pas nouvelle non plus. Elle avait été longuement développée par le théologien et sociologue québécois Jacques Grand’Maison dans deux gros volumes portant précisément le titre de « Seconde Évangélisation, publiés en 1973. L’idée était simple et profonde à la fois.  Lorsqu’une culture qui avait été évangélisée au cours des siècles précédents subit des changements radicaux, on est en présence d’une nouvelle culture et celle-ci doit, à nouveau, être confrontée à l’Évangile.

 

Nouvelle évangélisation

 

De cette notion de seconde évangélisation on est passé ensuite à celle de nouvelle évangélisation, qui apparaissait de plus en plus fréquemment dans les discours de Jean-Paul II vers la fin de son pontificat.  Le mot évangélisation signifiant l’annonce de la bonne nouvelle, il y a, du point de vue grammatical, une tautologie dans l’expression nouvelle évangélisation.  Peut-il y avoir une authentique évangélisation qui ne soit pas l’annonce toujours nouvelle du message évangélique ?

 

Ce qui rend toutefois cette notion tout à fait d’actualité de nos jours, c’est le phénomène contemporain des bouleversements continuels et toujours plus rapides de toutes les cultures.  Ç’est sans doute pourquoi Benoît XVI a jugé nécessaire de créer un nouveau dicastère romain pour la Nouvelle Évangélisation.

 

Une culture chrétienne ?

 

Durant longtemps l’Occident a été globalement chrétien, et les cultures occidentales ont été fortement marquées par le christianisme. Si bien qu’on a pu penser qu’il y avait une culture chrétienne et que l’évangélisation consistait à la répandre dans le reste du monde.  En réalité il n’y a pas une culture chrétienne à côté des autres.  Ce qui a existé, ce sont des cultures christianisées, et toujours jusqu’à un certain point. Dans la mesure où ces cultures sont toujours en voie de transformation, la Bonne Nouvelle de l’Évangile doit leur être sans cesse à nouveau proposée.

 

Porter la Bonne Nouvelle est la mission de quiconque l’a reçue. Cette annonce toujours nouvelle est la mission de tous les chrétiens.  Or, depuis l’annonce par le Pape de la création du nouveau dicastère et celle de la première Assemblée générale de ce dicastère à Rome en octobre prochain, les sites Internet de « Nouveaux Évangélisateurs » ne cessent de proliférer.  Il serait vraiment triste que cette nouvelle initiative romaine, très encourageante en elle-même, ne conduise indirectement à la création d’une distinction entre les anciens et les néo  évangélisateurs.  Surtout si ceux qui s’attribuent ce dernier titre prétendent rétablir une culture dite chrétienne du passé et se veulent donc décrochés de la culture contemporaine en attente d’une Bonne Nouvelle toujours nouvelle.

 

Armand VEILLEUX