Écrits et conférences d'intérêt général



(Dernière mise à jour le 2 octobre 2008)

 

 

 
 

Sur quel pied danser ?

 

            Dans un monastère cistercien de Suisse, une sculpture sur la stalle de l’abbesse montre un Christ en croix, tout joyeux, esquissant un pas de danse avec l’un de ses pieds détaché de la croix, l’autre pied reposant sur la tête d’Adam, lui aussi tout souriant. On pourrait facilement en dégager tout un cours de spiritualité.

 

            Au matin de la création, Dieu, faisant l’homme et la femme à son image,  déposa en eux une semence de vie divine. Cette semence atteint son plein épanouissement en Jésus de Nazareth. Dieu, personne ne l’a connu, dit le Voyant de Patmos ; mais le fils unique l’a révélé.  Depuis lors, pout tout être humain, trois questions inséparables  se posent : qui est Dieu ? qui est Jésus ? qui suis-je ?

 

            Tout au long de l’histoire de l’Église, deux approches christologiques se sont présentées.  L’une qui part de Dieu, l’autre qui part de l’homme. L’une qui attribue à l’homme Jésus tout ce que nous savons ou pensons savoir de la divinité ; et l’autre qui part de l’homme Jésus et découvre à travers lui tout ce que, dans son humanité, il nous a révélé de Dieu... et de nous-mêmes. 

 

            Deux grands courants de pensée on traversé les années durant lesquelles s’est déroulé Vatican II. D’une part, une volonté de s’ouvrir au monde, non seulement pour lui transmettre la Révélation, mais pour découvrir en l’homme tout ce que Dieu y a mis de Lui-même. D’autre part le désir de trouver sa sécurité dans des formulations dogmatiques immuables. Deux images expriment ces deux approches du mystère : ou bien un Christ cloué à une croix élevée bien haut, entre ciel et terre, sur un retable gigantesque au dessus d’un autel où se produisent en secret les mystères, ou bien un Christ montrant une joie débordante, bien que lié à la croix, mais s’appuyant sur son ancêtre Adam pour s’élancer dans une danse de joie.

 

            Ceux qui, comme Gabriel, ont choisi de danser sur ce pied, s’efforcent non pas tellement d’enseigner les hommes et les femmes, mais de se mettre avec eux à l’écoute du Christ et aussi de découvrir les semences de divinité placées par Dieu en l’humanité et dont la culture est une expression.

 

****

Armand Veilleux, est abbé du monastère cistercien de Scourmont (Chimay). De son souci de relire sans cesse la Parole de Dieu dans des contextes culturels en mutation est née une amitié avec Gabriel Ringlet.