Vie religieuse en général
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L’avenir
de
la
vie
religieuse
et
du
monachisme (Conférence
donnée
à
l’Assemblée
des
Supérieurs
Majeurs
de
Belgique,
à
Gentinnes,
le
3
mai
2005) Le titre de cette communication est très ambitieux. En réalité je ne l’ai pas choisi ; on me l’a donné. Si j’étais prophète, je pourrais peut-être vous
dire
ce
que
sera
l’avenir
de
la
vie
religieuse
et
du
monachisme. Mais je ne suis pas prophète. Je ne puis donc pas vous dire ce que sera l’avenir.
Je
puis
cependant
exprimer
certains
désirs
et
certaines
attentes. Je puis aussi essayer de réfléchir avec vous
sur
la
situation
présente
de
nos
communautés,
en
la
voyant
dans
le
contexte
plus
général
de
l’Église
universelle
aujourd’hui
et
de
l’histoire
de
la
vie
consacrée
à
travers
les
âges.
Cela
peut
nous
amener
à
prévoir
dans
une
certaine
mesure
ce
qui
pourra
se
passer
dans
les
années
et
les
décennies
à
venir,
mais
surtout
à
nous
situer
face
à
un
certain
nombre
de
situations
et
de
défis.
On dit souvent que l’avenir de chacune de nos communautés
comme
de
nos
Ordres
ou
Congrégations
est
entre
les
mains
de
Dieu. Cela est vrai. Mais cet avenir est aussi entre nos mains.
Il
sera
nécessairement
influencé
par
les
décisions
que
nous
prendrons
ou
ne
prendrons
pas.
1. le lien à la culture La vie religieuse ici en Belgique comme, à des degrés différents,
dans
presque
tous
les
pays
de
l’Europe
comme
aussi
des
Amériques,
est
dans
une
situation
de
crise.
Il
serait
ridicule
de
se
le
nier.
Mais
cette
crise
(qui
n’est
pas
nécessairement
quelque
chose
de
négatif)
est
liée
à
une
crise
de
l’Église
dans
son
ensemble
–
aussi
bien
de
l’Église
universelle
que
de
celle
de
nos
pays
–
et
à
une
crise
de
société
–
qui
affecte
tout
particulièrement
l’Europe
qui
essaye
de
naître.
Essayer
de
résoudre
cette
crise
de
la
vie
religieuse
sans
tenir
compte
de
la
crise
plus
générale
serait
s’orienter
dans
une
voie
sans
issue. C’est pourquoi il est urgent que toutes les
personnes
concernées
–
évêques,
supérieurs
religieux,
autorités
civiles
ainsi
que
penseurs
et
théologiens
s’engagent
dans
une
réflexion
commune,
une
analyse
de
la
situation
et
une
recherche
de
voies
nouvelles. Des recherches parallèles ne sont guère utiles. Lorsqu’on étudie l’évolution de la vie consacrée à travers
les
âges,
depuis
les
toutes
premières
générations
chrétiennes,
on
se
rend
rapidement
compte
qu’elle
a
toujours
été
étroitement
liée
à
la
culture,
au
sens
le
plus
général
et
le
plus
profond
du
mot,
et
donc
toujours
affectée
par
les
changements
culturels.
Les
nouvelles
formes
de
vie
religieuse
sont
toujours
nées
à
des
moments
d’importants
changements
sociaux
et
culturels.
Chaque
fois
qu’une
fondation
d’une
importance
particulière
a
été
faite
ou
une
grande
réforme
s’est
produite
dans
l’histoire
de
la
vie
religieuse
ou
monastique,
ce
fut
lorsqu’un
petit
groupe
d’hommes
ou
de
femmes
ont
été
particulièrement
sensibles
à
la
culture
de
leurs
contemporains
et
ont
donné
dans
leur
propre
vie
aux
défis
et
aux
questions
de
leur
temps
une
réponse
qui
valait
non
seulement
pour
eux
mais
aussi
pour
tous
les
autres.
C’est
d’ailleurs
pourquoi
beaucoup
adoptèrent
leurs
réponses
et
se
joignirent
à
eux. Cette longue histoire de la vie religieuse remonte non seulement
jusqu’aux
premières
générations
chrétiennes
mais
jusqu’au
Christ.
Il
est
bien
connu
que
les
premières
formes
de
vie
consacrée,
avant
le
grand
mouvement
de
diversification
du
deuxième
millénaire,
furent
les
diverses
traditions
monastiques
dont
on
place
en
général
les
premières
grandes
fondations
à
la
fin
du
troisième
siècle
ou
au
début
du
quatrième.
Mais
en
réalité
avant
le
grand
essor
du
monachisme
du
quatrième
siècle,
il
y
eut
dans
toutes
les
Églises
locales
des
premiers
siècles
un
grand
mouvement
spirituel
et
ascétique
qui
remonte
au
Christ
lui-même.
Il
y
avait
en
effet
à
l’époque
du
Christ,
dans
toute
l’Asie
et
le
Moyen-Orient
un
grand
mouvement
ascétique
à
l’intérieur
comme
à
l’extérieur
du
judaïsme. Jean-Baptiste, qu’il ait appartenu ou non à
ce
mouvement,
se
situait
dans
ce
courant.
Lorsque
Jésus
descend
dans
les
eaux
du
Jourdain
pour
se
faire
baptiser,
il
assume
tout
ce
mouvement
et
lui
donne
une
signification
nouvelle. Lorsque certains chrétiens des premières générations
voulurent
adopter
comme
mode
permanent
de
vie
les
appels
radicaux
du
Christ
adressés
à
ses
disciples,
ils
trouvèrent
dans
cette
tradition
ascétique
déjà
presque
millénaire
un
mode
d’expression.
De
sorte
qu’on
peut
dire
que
la
vie
religieuse,
dans
sa
première
expression,
est
le
résultat
d’un
processus
d’inculturation
–
la
première
et
la
plus
réussie
de
toutes
les
formes
d’inculturation
–
la
rencontre
du
message
évangélique
avec
une
tradition
enracinée
dans
l’âme
humaine
et
dans
la
culture
du
temps. 2. la suite de l’histoire L’idée que la vie religieuse serait contre-culturelle est
un
mythe
des
années
‘68.
Chaque
fois
que
la
vie
religieuse
a
été
particulièrement
vivante
elle
a
été
profondément
enracinée
dans
la
culture
de
son
temps.
Lorsqu’à
la
fin
du
troisième
siècle
le
monachisme
égyptien
connaît
une
explosion
numérique,
ce
fut
rendu
possible
par
les
réformes
politiques
de
Septime
Sévère
qui
avait
permis
l’établissement
de
diocèses
dans
les
nouvelles
métropoles
le
long
du
Nil
jusqu’en
Haute
Égypte,
et
à
la
réforme
agraire
de
Dioclétien
qui
rendait
possible
pour
la
première
fois
l’apparition
de
grandes
communautés
cénobitiques.
Au
sixième
siècle,
en
Occident,
c’est
dans
le
contexte
de
la
Réforme
gélasienne
rendue
possible
par
le
génie
politique
d’un
roi
barbare
à
demi
civilisé
–
Théodoric,
roi
des
Ostrogoths,
qu’apparaît
saint
Benoît
qui,
à
travers
sa
Règle
et
ceux
qui
l’adopteront
aura
une
telle
influence
sur
les
générations
suivantes,
qu’il
fut
nommé
le
Père
de
l’Europe.
C’est
dans
le
contexte
d’un
grand
mouvement
populaire
de
retour
à
l’idéal
de
simplicité
et
de
communion
de
l’Église
primitive
que
naissent
un
grand
nombre
de
fondations
monastiques,
dont
Cîteaux
sera
la
plus
belle
expression,
avant
que
l’idéal
en
soit
repris
le
siècle
suivant
sous
une
forme
différente
par
les
Ordres
mendiants.
Il y a eu, malheureusement, à la même époque un divorce
entre
la
spiritualité
et
la
science
et
ce
divorce
a
eu
des
conséquences
très
lourdes
aussi
bien
sur
la
vie
chrétienne,
en
particulier
celle
des
religieux
que
sur
le
monde
de
la
science.
La
science
s’est
réfugiée
dans
les
écoles
et
la
spiritualité
dans
les
monastères,
et
elles
ont
poursuivi
par
la
suite
des
chemins
parallèles
pour
le
plus
grand
dam
des
deux.
Les formes de la vie religieuse que nous connaissons aujourd’hui
sont
nées
ou
se
sont
développées
pour
la
plupart
dans
la
longue
période
de
l’histoire
de
l’Église
et
de
la
société
occidentale
qu’on
appelle
la
« Chrétienté ».
Cette
période
est
terminée.
Elle
a
eu
ses
grandeurs
et
ses
limites
intrinsèques ;
mais
qu’on
s’en
réjouisse
ou
qu’on
le
déplore,
elle
est
bel
et
bien
terminée ;
et
tous
les
efforts
pour
rétablir
une
nouvelle
situation
de
« Chrétienté »
dans
ce
sens
sont
pathétiques
et
vouées
à
l’échec.
À la même époque où apparaissaient les grandes réformes
monastiques
du
XIIème
siècle
puis
les
Ordres
mendiants,
commençait,
avec
l’apparition
de
l’approche
scientifique
des
problèmes
ce
qu’on
appellera
plus
tard
la
modernité.
Un
mouvement
que,
malheureusement
l’Église
a
boudé.
C’est
durant
cette
période
de
modernité
particulièrement
au
cours
des
deux
ou
trois
derniers
siècles
que
sont
apparues
plusieurs
formes
plus
récentes
de
vie
religieuse
et
les
grandes
restaurations
monastiques
du
19ème
siècle,
avec,
en
particulier
Dom
Guéranger
en
France
et
les
frères
Wolter
en
Allemagne,
à
Beuron
et
Maria
Laach.
Malgré
tous
leurs
aspects
positifs,
ces
fondations
et
ces
restaurations
s’inscrivaient
dans
un
mouvement
qui
allait
à
contre-courant
du
développement
de
la
société
et
de
la
culture. Puis le génie pastoral de Jean XXIII nous donna Vatican
II
qui
permit
à
l’Église,
au
moins
en
principe,
de
se
voir,
de
se
vouloir
et
de
se
dire
envoyée
au
monde
et
existant
pour
être
un
ferment
d’Évangile
dans
le
monde.
Si vous me permettez une note personnelle : J’appartiens
à
la
génération
de
ceux
qui
ont
attendu
le
Concile
avec
beaucoup
d’espoir,
l’ont
suivi
intensément
et
se
sont
impliqués
de
tout
leur
être
à
le
mettre
en
pratique.
J’étais
jeune
moine
lors
de
l’annonce
du
Concile
par
Jean
XXIII
et
j’ai
reçu
cette
annonce
comme
une
bouffée
d’air
frais.
J’étais
à
Rome
sur
la
Place
Saint-Pierre
lors
de
l’ouverture
du
Concile
et
j’ai
passé
toutes
les
années
du
Concile
à
Rome
comme
étudiant,
en
suivant
avec
intensité
tous
les
événements.
Après
le
Concile,
étant
très
tôt
impliqué
dans
les
organismes
centraux
de
notre
Ordre,
j’ai
investi
toute
mon
énergie
à
travailler
au
renouveau
demandé
par
le
Concile. Je dois dire qu’au cours des dernières années
c’est
avec
une
certaine
tristesse
que
je
vois
un
bon
nombre
des
rêves
engendrés
par
le
Concile
s’évanouir
ou
être
mis
de
côtés
par
des
membres
influents
des
dicastères
romains. 3. Nos pauvretés actuelles Ce n’est certes pas le lieu et le temps d’analyser ce qu’ont
vécu
nos
communautés
et
ce
qu’a
vécu
l’Église
depuis
lors. Il serait tout à fait erroné d’attribuer au
Concile
ou
aux
réformes
provoquées
par
lui
l’affaiblissement
en
nombre
de
la
plupart
de
nos
communautés
et
la
fermeture
de
beaucoup
de
nos
institutions.
Ce
que
le
Concile
avait
demandé
et
ce
à
quoi
nous
nous
sommes
attelés
était
un
renouveau
spirituel ;
mais
ce
renouveau
spirituel
ne
pouvait
se
faire
sans
un
bon
nombre
de
réformes
structurelles
qui,
pour
la
plupart
arrivaient
trop
tard.
De
plus,
la
krisis
(au
sens
étymologique
et
positive)
que
ces
transformations
provoquèrent
eut
comme
conséquence
une
grande
purification.
Nous avons fait l’expérience de Job. Nous nous rendons compte que, privés d’un grand
nombre
de
choses
dans
lesquelles
nous
trouvions
notre
identité
et
dont
nous
étions
fiers,
nous
existons
toujours.
(Nous
refaisons
un
peu
l’histoire
de
Job).
Nos
communautés
et
nos
congrégations,
pour
la
plupart
ne
sont
plus
fortes,
puissantes
et
influentes
comme
au
temps
de
la
Chrétienté,
mais
elles
continuent,
dans
leur
précarité
et
leur
faiblesse
d’être
des
témoins
de
la
sequela Christi. Car c’est là notre vocation : ne rien préférer
à
l’amour
du
Christ,
et
suivre
le
Christ,
dans
une
société
qui
est
elle-même
en
profonde
transformation
et
sans
cesse
à
la
recherche
de
son
identité
–
et
du
Christ,
sans
le
savoir
explicitement. Ce témoignage de l’Évangile nos communautés
peuvent
toujours
le
donner,
que
nous
soyons
de
petites
ou
de
grandes
communautés.
Évidemment
lorsque
nous
cédions
à
la
tentation
de
voir
notre
identité
dans
les
grands
services
que
nous
rendions
à
l’Église
et
à
la
société,
plus
nous
étions
mieux
c’était. Mais si notre identité réside dans ce que nous
sommes
spirituellement,
dans
notre
marche
à
la
suite
du
Christ, que nous soyons cinq ou cinquante ou cent ne
change
rien
à
la
valeur
spirituelle
de
notre
communauté.
L’une des pauvretés que nous vivons, est que nous n’avons
même
pas
une
théologie
renouvelée
de
la
vie
religieuse.
Dans
toute
la
réflexion
théologique
contemporaine
il
n’y
a
pas
eu
un
renouveau
de
la
théologie
de
la
vie
religieuse.
–
Mais
y
a-t-il
eu
un
véritable
renouveau
de
la
théologie
du
mariage ?
ou
du
sacerdoce ?
ou
du
ministère
épiscopal ? Y a-t-il eu, en Europe, depuis le Concile un
véritable
renouveau
de
la
théologie
tout
court ? Peut-être attend-on encore une libération de
la
théologie
(attention
à
l’ordre
des
mots).
Il est même difficile de trouver un nom qui ne fasse pas
problème
pour
désigner
notre
forme
de
vie
chrétienne.
On
parlait
autrefois
de
« vie
religieuse » ;
mais
la
vie
de
tout
le
monde
doit
avoir
une
dimension
religieuse.
On
parlait
d’états
de
perfection ;
mais
tout
le
monde
est
appelé
à
la
perfection.
Perfectae caritatis a bien mis l’accent
sur
l’élément
essentiel
qui
est
la
sequela
Christi.
Évidemment
tout
le
monde
doit
suivre
le
Christ,
comme
tout
le
monde
est
appelé
à
la
perfection
de
la
charité.
Ce
qu’on
a
appelé
jusqu’à
maintenant
la
« vie
religieuse »
--
y
compris
la
vie
monastique
–
n’est
qu’une
façon
particulière
de
vivre
la
vie
chrétienne. Il s’agit de décrire pour chacun de nous en
quoi
consiste
cette
particularité
plutôt
que
d’essayer
de
trouver
un
dénominateur
commun
de
caractère
théologique.
On
préfère
parler
de
nos
jours
de
« vie
consacrée ». L’expression n’est pas plus satisfaisante que
les
autres.
Toute
personne
chrétienne
est
consacrée
à
Dieu
par
son
baptême ;
et
même
tout
être
humain
est
consacré
à
Dieu
par
le
fait
d’être
créé
à
l’image
de
Dieu
et
d’être
appelé
à
être
transformé
à
l’image
du
Fils
de
Dieu.
L’instruction
post-synodale
sur
la
vie
religieuse
a
conservé
comme
titre
Vita
consecrata.
Dans
une
première
rédaction
les
trois
principaux
rédacteurs
avaient
tout
d’abord
pensé
structurer
toute
la
théologie
de
la
vie
religieuse
autour
du
thème
de
la
« beauté ».
Le
titre
proposé
était
« Divinae
pulchritudinis
amatores »
(évidemment
sous
l’influence
d’Urs
von
Balthasar).
Heureusement
plusieurs
des
lecteurs
firent
remarquer
que
cette
vision
théologique
n’avait
de
support
ni
dans
les
textes
conciliaires
ni
dans
les
interventions
faites
durant
le
Synode.
Cette
« vision »
théologique
ne
fut
pas
retenue
(mais
la
mention
de
la
beauté
se
retrouve
plus
d’une
vingtaine
de
fois
dans
le
texte).
Le
texte
de
cette
Constitution
contient
des
richesses,
mais
ne
fait
évidemment
pas
progresser
la
théologie
de
la
vie
religieuse. Mais est-ce nécessaire ? Il est peut-être faux de vouloir élaborer une « théologie
de
la
vie
consacrée »
distincte
de
la
théologie
de
la
vie
chrétienne
en
général.
La
vie
consacrée
n’est
autre
chose
qu’une
façon
de
vivre
la
vie
chrétienne. Si nous arrivons à être d’authentiques chrétiens
et
chrétiennes,
c’est
déjà
beaucoup. Je suis convaincu que si l’on veut trouver dans les textes
conciliaires
des
éléments
pouvant
servir
de
base
pour
une
théologie
de
la
vie
consacrée,
il
faut
les
chercher
dans
Lumen
gentium,
la
grande
Constitutions
sur
l’Église
dans
le
monde
d’aujourd’hui
beaucoup
plus
que
dans
Perfectae
caritatis ;
tout
comme
c’est
dans
Lumen
Gentium
et
non
pas
dans
le
document
conciliaire
sur
la
liturgie,
qu’on
peut
trouver
les
fondements
d’une
théologie
de
la
liturgie. 4. L’évolution du religieux Et dans ce contexte je voudrais signaler quelques aspects
de
l’évolution
de
la
société
qui
affectent
l’Église
et
qui
affecteront
sans
doute
l’avenir
de
la
vie
religieuse. L’un de ces aspects est l’évolution
que
connaît
la
place
du
« religieux »
(c’est-à-dire
de
la
dimension
religieuse)
dans
la
vie
humaine
et
comme
conséquence
le
rôle
joué
par
les
symboles
dans
la
vie
humaine.
Il
s’agit
d’une
évolution
qui
prend
sa
racine
dans
l’enseignement
même
de
Jésus.
Et
cela
affecte
toutes
nos
formes
de
vie
religieuse. Les premiers chrétiens ne pouvaient pas réaliser à quel
point
le
message
de
Jésus
était
révolutionnaire. Ils vivaient dans un monde sacral. Pour ce monde sacral, à l'intérieur comme à
l'extérieur
du
Judaïsme,
le
langage
de
l'appartenance
religieuse
et
rituelle
était
plus
important
que
le
langage
de
la
vie.
Le
centre
de
gravité
était
l'activité
sacrale
et
rituelle,
par
laquelle
les
humains
pouvaient
entrer
en
relation
avec
Dieu. Pour Jésus, le centre de gravité n'était plus
l'activité
rituelle,
mais
bien
la
qualité
de
la
vie
quotidienne. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les
premiers
Chrétiens
étaient
considérés
par
les
païens
comme
des
"athées"! En Occident, depuis le temps de Jésus, le centre de gravité
s'est
constamment
déplacé
de
l'aire
de
l'expression
religieuse
et
rituelle
vers
l'aire
de
la
vie
quotidienne.
La
prise
de
conscience
de
la
liberté
humaine
a
conduit
à
un
sens
plus
profond
de
la
responsabilité.
Le
temple
de
pierre
prend
toujours
moins
d'importance
et
les
temples
vivants
en
prennent
toujours
plus.
Notre vie chrétienne de tous les jours est l'endroit où
nous
sommes
appelés
tout
d'abord
à
vivre
ce
message
d'amour
:
nous
devons
devenir
toujours
plus
conscients
du
fait
que
tout
être
humain,
à
cause
même
de
son
humanité,
est
un
temple
de
l'Esprit. De ce temple, Jésus est la pierre angulaire. Les difficultés que rencontre actuellement l'Église
dans
les
vieilles
chrétientés
d'Europe
occidentale
et
d'Amérique
du
Nord
viennent
peut-être
du
fait
que
sa
lourde
structure
institutionnelle
reposait
souvent
sur
d'autres
bases,
qui
se
sont
effritées.
A côté du phénomène de perte du sens chrétien, qui est réelle
à
notre
époque,
il
faut
remarquer
un
autre
phénomène
tout
différent
quoiqu’en
apparence
fort
semblable,
qui
consiste
précisément
dans
la
continuation
du
glissement
depuis
le
rituel
vers
la
vie
commencé
avec
Jésus. Pour beaucoup d'authentiques Chrétiens de nos
jours
la
"pratique"
religieuse
consiste
avant
tout
à
incarner
dans
leur
vie
de
tous
les
jours
–
sur
leur
lieu
de
travail
comme
dans
leur
famille
–
les
exigences
de
l'Évangile.
À
un
niveau
plus
profond,
ce
qui
est
changé
en
profondeur
c’est
la
relation
avec
la
dimension
religieuse
de
l’existence
et
avec
l’ordre
des
symboles. Lorsque les symboles – comme les symboles liturgiques,
par
exemple
–
ne
parlent
plus,
la
solution
n’est
pas
de
créer
de
nouveaux
symboles,
mais
de
savoir
reconnaître
et
bien
gérer
la
dimension
symbolique
–
la
valeur
symbolique
–
de
tous
les
éléments
de
notre
vie
courante Ainsi toute la dimension rituelle et symbolique de beaucoup
des
éléments
de
notre
vie
religieuse
–
habit,
clôture,
forme
des
édifices
--
s’en
trouve
profondément
changée.
. 5. L’évolution des classes De la même façon, l’importance des classes dans l’Église
s’est
profondément
modifiée
depuis
l’âge
d’or
de
la
« Chrétienté ».
Nos formes de vie monastique et religieuse se sont développées
à
l’époque
de
la
Chrétienté,
comme
je
l’ai
dit
plus
haut.
Cette
période
était
caractérisée
en
grande
partie
par
l’importance
donnée
aux
rangs
et
aux
classes
non
seulement
dans
la
société,
mais
aussi
dans
l’Église. Des distinctions nettes entre clergé et peuple,
entre
moines,
chanoines,
mendiants
et
religieux
en
général
étaient
de
grande
importance.
L’importance
de
ces
distinctions
a
disparu
de
nos
jours.
Ce nivellement a peut-être une origine et une valeur évangélique.
Si
Vatican
II
a
élaboré
une
nouvelle
théologie,
c’est
celle
du
Peuple
de
Dieu. Nous formons tous le peuple de Dieu en y vivant
divers
charismes
et
en
les
vivant
de
façons
diverses. Personnellement je me demande si l’évolution
actuelle
de
l’Église
ne
va
pas
dans
un
sens
où
ces
distinctions
seront
de
moins
en
moins
importantes.
La pratique séculaire selon laquelle les communautés sont
composées
entièrement
de
femmes
ou
d’hommes,
sont
entièrement
actives
ou
contemplatives,
etc.
ne
sera
probablement
pas
la
seule
forme
de
vie
consacrée
dans
l’Église
à
l’avenir. Le fait est qu’une grande partie des groupements
qui
ont
demandé
l’approbation
du
Saint
Siège
au
cours
des
dernières
décennies
ne
sont
pas
des
communautés
au
sens
traditionnel,
mais
des
communautés
comprenant
des
personnes
des
deux
sexes,
des
célibataires
et
des
couples
mariés,
des
laïcs
et
des
prêtres.
Comme
la
demande
d’approbation
est
en
général
présentée
à
la
Congrégation
pour
les
Instituts
Religieux
et
les
Sociétés
de
vie
apostoliques
(appelée
plus
couramment
la
Congrégation
pour
les
Religieux)
celle-ci
a
en
général
trouvé
comme
solution
d’approuver
comme
Institut
religieux
la
partie
de
ce
groupe
faisant
les
voeux
« religieux »
traditionnels,
et
considérant
tous
les
autres
membres
comme
des
associés,
ce
qui
ne
correspond
pas
en
général
à
l’intuition
primitive
du
ou
des
fondateurs. Mais il ne semble pas y avoir d’autre Congrégation
romaine
habilitée
à
approuver
une
société
de
ce
genre. Évidemment l’Opus Dei a trouvé la solution en s’adressant plus haut et en obtenant
d’être
constitué
en
« prélature
personnelle ». Dans notre Ordre [cistercien], où nous n’avions pas dans
le
passé
la
tradition
des
« oblats »
qu’ont
les
Bénédictins,
s’est
manifesté
depuis
une
vingtaine
d’année
un
mouvement
de
plus
en
plus
fort
de
laïcs
demandant
à
être
associés
à
nos
communautés. Ce n’est pas du tout un mouvement que nous avons
provoqué
nous-mêmes
à
cause
du
manque
de
vocations...
Au
contraire
ce
mouvement
est
venu
des
laïcs
et
beaucoup
des
communautés
y
ont
été
plutôt
réticentes
dans
un
premier
temps.
D’ailleurs
il
est
particulièrement
fort
dans
des
pays
où
les
vocations
sont
nombreuses,
au
Nigeria
par
exemple.
Ces
laïcs
ne
désirent
pas
simplement
une
pieuse
association
à
une
communauté
religieuse.
Ce
ne
sont
pas
non
plus
des
personnes
voulant
aider
des
communautés
dans
le
besoin.
Ce
sont
plutôt
des
personnes,
hommes
et
femmes,
personnes
mariées
et
célibataires
qui
se
sont
reconnues
spirituellement
dans
le
charisme
spirituel
de
nos
communautés,
qui
ne
prétendent
pas
jouer
au
moine
ou
à
la
moniale,
mais
désirent
incarner
dans
leur
vie
–
aussi
bien
dans
leur
vie
familiale
que
dans
leur
vie
professionnelle
–
les
valeurs
qu’ils
ont
découvertes
dans
notre
spiritualité.
Je
suis
convaincu
que
l’Esprit
Saint
est
en
train
de
donner
une
nouvelle
expression
au
charisme
cistercien.
Et
je
crois
qu’il
en
est
ainsi
de
beaucoup
de
communautés
et
d’individus. 6. les communautés nouvelles C’est sans doute dans ce contexte qu’il faut parler de ce
qu’on
appelle
les
« Communautés
nouvelles ». En étudiant l’histoire de la vie consacrée,
on
remarque
aussi
qu’aux
moments
charnières
de
l’évolution
historique,
apparaissent
souvent
de
nombreuses
fondations
nouvelles.
La
plupart
disparaissent
et
l’une
ou
l’autre
recueille
en
quelque
sorte
tous
les
fruits
de
cette
évolution.
En
général
les
formes
plus
traditionnelles
qui
ont
la
caractéristiques
de
survivre
à
toutes
les
crises,
s’en
trouvent
elles-mêmes
rénovées
et
revigorées. Donc, à mon avis, il faut avoir à leur égard une attitude
positive,
accueillant
avec
reconnaissance
tout
ce
qu’elles
apportent
de
vie
nouvelle ;
mais
exerçant
aussi
à
leur
égard,
si
elles
l’acceptent
le
rôle
de
témoins
d’une
longue
tradition.
Si
l’on
en
juge
par
ce
qui
s’est
passé
à
toutes
les
époques
semblables
de
crise
et
de
créativité
nouvelle,
plusieurs
de
ces
communautés
disparaîtront ; quelques-unes fleuriront, recueillant les fruits
de
l’ensemble
de
l’évolution.
Mais
il
ne
faut
pas
conclure
trop
vite
–
comme
le
font
certains
évêques
--
qu’elles
sont
LA
voie
de
l’avenir
et
qu’elles
remplaceront
les
communautés
existantes
comme
si
celles-ci
appartenaient
à
un
autre
âge. En même temps, les communautés anciennes doivent
se
laisser
interpeller
et
même
rénover
par
ce
dynamisme
nouveau. Évidemment, parmi les nombreuses communautés dites « nouvelles »,
--
comme
parmi
les
communautés
plus
traditionnelles,
il
y
a
de
tout.
Dans
l’ensemble
elles
ont
–
ce
qui
est
normal
–
à
la
fois
les
qualités
et
les
défauts
de
la
jeunesse.
Elles
ont
une
grande
vitalité,
beaucoup
de
confiance
en
elles-mêmes
et
dans
l’avenir,
un
désir
ardent
de
s’engager
dans
le
travail
d’évangélisation
et
de
conquérir
le
monde ; elles ont aussi comme tous les jeunes, une bonne
dose
de
naïveté
et
il
est
parfois
plutôt
triste
de
les
voir
se
casser
le
nez
alors
qu’un
tout
petit
peu
de
consultation
leur
aurait
évité
de
se
buter
sur
des
écueils
par
trop
évidents. Exemples de cette naïveté : plusieurs de ces communautés
découvrent
soudain
le
goût
d’aller
évangéliser
l’Afrique. Tous ceux qui ont vécu ne fût-ce que quelques
années
en
Afrique
ou
qui
y
sont
allés
d’une
façon
un
peu
fréquente
au
cours
des
vingt
ou
vingt-cinq
années,
savent
à
quel
point
les
situations
y
sont
complexes
et
comment
il
est
facile
à
des
« blancs »
d’y
faire
plus
de
tort
que
de
bien.
Je
trouve
assez
inquiètant
de
voir
partir
de
petits
groupes
de
jeunes
des
communautés
nouvelles
pour
l’Afrique
non
seulement
sans
le
minimum
de
préparation
culturelle,
mais
aussi
sans
avoir
consulté
les
communautés
qui
y
sont
présentes
depuis
de
nombreuses
années.
Pourquoi
chacun
doit-il
réinventer
l’eau
chaude ? L’un des tests pour ces communautés nouvelles ou ce qu’on
appelle
les
nouveaux
mouvements
est
leur
appartenance
à
l’Église
ou
leur
lien
avec
l’Église
locale.
7. le lien à l’Eglise locale La vie religieuse dans le passé a toujours été fortement
liée
à
l’Église
locale.
Vous
pourrez
évidemment
tout
de
suite
m’objecter
que
les
Ordres
anciens
comme
le
mien
étaient
exempts.
L’exemption
–
un
mot
qu’on
ne
retrouve
plus
dans
le
droit
canon
–
signifiait
simplement
que
certains
Ordres
dépendaient
directement
du
Saint-Siège
et
non
de
l’évêque
diocésain
en
tout
ce
qui
concernait
la
vie
interne
de
la
communauté.
Mais
lorsqu’ils
étaient
établis
dans
une
église
locale,
ils
s’inséraient
harmonieusement
dans
la
vie
de
cette
Église
locale.
Il
en
allait
d’ailleurs
à
peu
près
de
même
de
toutes
les
Congrégations
actives.... Dans l’Église contemporaine, le défi est celui de la vitalité
des
Églises
locales.
Si
l’on
croît
que
l’Église
universelle
est
faite
de
la
Communion
entre
toutes
les
Églises
locales,
ce
qui
importera
le
plus
sera
l’intensité
et
la
qualité
spirituelle
de
la
communion,
peu
importe
la
force
ou
la
faiblesse
numérique
des
Églises
particulières.
Si
l’on
donne
plus
d’importance
à
la
puissance
des
structures
ecclésiales,
les
églises
petites
et
faibles
seront
de
plus
en
plus
marginalisées.
Le défi pour les religieux de nos jours est celui-ci. L’insertion
dans
l’Église
locale.
Ce
n’est
un
secret
pour
personne
que
le
très
aimé
pape
Jean-Paul
II
a
mis
une
très
grande
confiance
dans
ce
qu’au
delà
des
Alpes
ont
appelle
les
« mouvements
nouveaux »
--
tels
que
Opus Dei, Légionnaires du Christ, Néo-catéchuménat
--
ayant
une
action
souvent
parallèle,
semble-t-il,
avec
l’Église
locale.
En
tout cas, leurs interactions avec l’autorité
de
l’Église
locale
sont
moins
bien
rodées
que
celles
des
Instituts
d’origine
diocésaine
ou
des
grands
Instituts
religieux
traditionnels
comme
les
Jésuites,
les
Dominicains,
les
Rédemptoristes,
etc.
La vie contemplative se développe dans une Église locale
lorsque
la
vitalité
de
cette
Église
locale
lui
permet
de
se
développer. Ou plutôt, ce n’est que lorsqu’une Église locale
a
développé
sa
dimension
contemplative
qu’elle
peut
faire
éclore
en
son
sein
des
vocations
contemplatives
qui
s’y
développeront
et
s’y
enracineront.
Jusqu’à
cette
maturité
de
l’Église
locale,
toute
fondation
est
une
sorte
de
transplantation
qui
peut
prendre
racines
ou
ne
pas
prendre
racines,
et
qui
peut
en
tout
cas
prendre
plus
d’un
demi-siècle
avant
de
s’enraciner
dans
l’Eglise
locale.
(Cf.
Martini,
qui,
pour
des
raisons
purement
et
profondément
ecclésiologiques
a
toujours
eu
beaucoup
de
difficultés
–
et
ne
s’en
est
jamais
caché
–
avec
l’influence
de
ces
mouvements
sur
l’Église
italienne
dans
son
ensemble,
sans
que
les
évêques
locaux
ne
puissent
beaucoup
intervenir). 8. un charisme de communion Même si certains regroupement supra-diocésains et supranationaux
ayant
leurs
propres
engagements
liés
à
une
vision
d’Église
qui
leur
est
propre
ont
pour
le
moment
le
vent
dans
les
voiles
,
je
crois
que
ce
qui
donnera
une
vitalité
nouvelle
à
l’Église
dans
l’avenir
sera
la
multiplication
de
grandes
familles
spirituelles
reliant
entre
elles
des
personnes
non
seulement
appartenant
à
diverses
formes
de
vie,
mais
maintenant
diverses
appartenances
communautaires
à
divers
niveaux. Le charisme qu’incarne la vie religieuse aujourd’hui
sous
toutes
ses
formes
les
plus
variées
est
aussi
ancien
que
le
christianisme.
Je
suis
absolument
convaincu
qu’il
subsistera
et
fleurira
dans
l’Église
d’aujourd’hui
et
de
demain.
Les
formes
dans
lesquelles
il
s’est
incarné
et
exprimé
jusqu’à
maintenant
pourront
changer
et
changeront
probablement.
Quelles
que
soient
les
formes
que
peuvent
prendre
nos
institutions
dans
l’avenir,
les
défis
qui
se
présentent
à
nous
les
religieux,
quelle
que
soient
nos
formes
de
vie,
il
reste
le
même.
C’est
le
charisme
d’incarner
l’Église
dans
le
monde
d’aujourd’hui.
Parce
qu’elle
est
une
réponse
à
un
appel
d’amour,
elle
est
essentiellement
une
vie
de
communion. Communion avec Dieu dans la prière contemplative, communion
avec
des
frères
ou
des
soeurs
(ou
des
frères
et
des
soeurs)
dans
une
vie
communautaire ;
communion
avec
l’Église
locale
dans
laquelle
nous
vivons
et,
à
travers
elle
avec
l’Église
universelle ;
communion
avec
tous
nos
frères
et
soeurs
en
humanité,
plus
particulièrement
avec
les
plus
petits
et
les
plus
pauvres. Une dimension importante de la communion touche les autres
traditions
religieuses.
Un
élément
important
de
la
réforme
conciliaire
a
été
l’ouverture
au
dialogue
interreligieux.
Quelques
années
après
le
Concile
Rome
a
demandé
aux
grands
ordres
monastiques
bénédictins
et
cisterciens
d’assumer
un
rôle
important
dans
le
dialogue
interreligieux
particulièrement
avec
les
grandes
traditions
religieuses
de
l’Orient
comme
l’hindouisme
et
le
bouddhisme,
qui
ont
une
tradition
monastique
plusieurs
fois
millénaire
et
avec
lesquelles
les
moines
chrétiens
peuvent
entrer
en
dialogue
au
niveau
de
l’expérience
spirituelle
encore
plus
qu’à
celui
des
philosophies
ou
des
théologies.
Ce
dialogue
interreligieux
monastique
a
toujours
été
encouragé
par
le
Secrétariat
romain
pour
les
relations
avec
les
religions
non-chrétiennes
et
plusieurs
fois
par
Jean-Paul
II
lui-même
en
particulier
lors
de
la
visite
de
moines
non-chrétiens
en
Occident
mais
n’a
pas
toujours
reçu
beaucoup
d’encouragements
de
la
part
d’autres
dicastères
romains.
On parle beaucoup de nos jours de la Constitution Européenne
qui
risque
bien
de
n’être
jamais
votée
–
qui
risque
bien
de
n’être
jamais
mise
en
pratique,
puisqu’elle
devrait
pour
cela
être
votée
par
les
25
pays
membres,
ce
qui
serait
un
vrai
miracle.
Avec
cette
Constitution
ou
non
l’Europe
est
en
train
de
se
faire,
péniblement,
lentement
et
douloureusement.
Que
les
racines
chrétiennes
de
l’Europe
soient
mentionnées
dans
ce
texte
a
son
importance
sans
doute
mais
reste
somme
toute
secondaire.
(Hans
Küng
rappelait
récemment
les
racines
islamiques
de
l’Europe
–
cf.
Averroès
en
particulier).
Le
plus
important
est
que
les
valeurs
et
les
principes
chrétiens
animent
cette
Europe
nouvelle
en
gestation.
Que
cela
se
fasse
ou
non
dépendra
de
chacun
des
chrétiens
et
d’une
façon
particulière
de
chacun
des
religieux.
Notre forme particulière de vie chrétienne qu’est la vie
religieuse
est
un
moyen
qui
nous
est
« donné »,
d’être
un
ferment
chrétien
dans
la
pâte
humaine.
Durant
des
siècles
les
religieux
ont
rempli
un
grand
nombre
de
rôles
de
suppléances. Ainsi, durant une grande partie de l’Antiquité
et
du
Moyen-Âge,
alors
que
les
chefs
politiques
ne
pensaient
qu’à
étendre
ou
à
défendre
leurs
empires,
les
monastères
étaient
les
seuls
lieux
ayant
suffisamment
de
stabilité
pour
que
s’y
développe
ou
se
préserve
une
culture
humaine.
Ils
ont
eu
durant
des
siècles
le
monopole
de
l’enseignement,
non
parce
qu’ils
l’avaient
accaparé,
mais
parce
que
personne
d’autre
n’y
pensait
ou
ne
pouvait
s’en
occuper. Puis sont venues les Universités qui ont pris
la
relève.
Au
cours
des
derniers
siècles,
dans
la
plupart
de
nos
pays,
la
majeure
partie
de
l’enseignement
des
enfants,
des
soins
hospitaliers
et
des
aides
sociales
étaient
fournies
par
des
congrégations
religieuses.
Presque
tout
cela
est
maintenant
entre
les
mains
de
l’Était
ou
en
tout
cas
de
laïcs. Ce sont là autant de secteurs où la présence des religieux
est
essentielle,
en
tant
que
témoins
de
l’Évangile
et
de
la
foi
en
Jésus-Christ. Mais ce qui reste et restera toujours la dimension essentielle
de
la
vie
religieuse,
c’est
la
communion
d’amour
avec
Jésus
de
Nazareth,
communion
incarnée
dans
toutes
les
autres
formes
de
communion
que
j’ai
mentionnées. Je suis convaincu que la vie religieuse restera dans son
ensemble
fidèle
à
cette
mission ;
et
je
suis
convaincu
qu’elle
a
un
avenir
important
dans
l’Église
et
le
peuple
de
Dieu. Armand
VEILLEUX,
ocso Abbé
de
Scourmont |
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