|
|
||
|
|||
13
décembre 2015 – 3ème dimanche de l'Avent "C"
So
3, 14-18; Ph 4, 4-7; Lc 3,
10-18
H O M É L I E
Les deux premières
lectures que nous avons entendues, celle du prophète Sophonie et celle de saint
Paul aux Philippiens, nous invitent à la joie. C’est pourquoi ce troisième
dimanche de l’Avent est appelé « dimanche de la joie »
(« dimanche Gaudete »
disait-on à l’époque du grégorien).
Cet appel à la joie peut
nous sembler incongru dans le monde actuel où il a en tant de guerres, tant de
massacres absurdes de populations innocentes, tant de drames vécus par des
milliers et même des millions de personnes déracinées de leur pays et obligées
de chercher ailleurs un pays d’asile.
Or il se fait que le
prophète Sophonie, qui nous appelle à la joie dans la première lecture,
écrivait lui-même en temps de guerre. Son appel à la joie repose non pas sur la
victoire sur l’ennemi, mais sur le fait que le Seigneur fera lui-même rebrousser
chemin à l’ennemi. La joie ne sera pas
dans l’écrasement de l’ennemi, mais dans le renoncement à la guerre.
Quant
à Jean-Baptiste, il est difficile, à première vue, de voir dans sa vie et son
message un appel à la joie. Mais tout dépend de notre façon de concevoir la
joie. Lorsque nous pensons joie, nous pensons à des festivités et à des
banquets, à de bons mets et de bons breuvages. Or, Jean ne buvait que de l'eau et son régime se limitait à un menu de
sauterelles et de miel sauvage !
Lorsque
nous pensons joie, nous pensons à des vêtements élégants, alors que la
garde-robe de Jean était composée d'un vêtement de poil de chameau et d'une
ceinture de cuir !
Lorsque
nous pensons joie, nous pensons à un comédien ou un amuseur sachant faire rire
et aidant ses auditeurs à se sentir bien dans leur peau. Pour Jean, la racine
de la joie se trouve dans la conscience de faire la volonté de Dieu.
Dans le texte d’Évangile lu
dimanche dernier, nous entendions Jean-Baptiste dire aux foules : « Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez
sa route. Tout ravin sera comble, toute
montagne et toute colline seront abaissées. » Les foules semblent avoir compris son
message car elles lui demandent – comme nous venons de l’entendre, -- «
Que devons-nous faire ? »
En réalité il y a trois
groupes distincts de personnes qui posent la même question à Jean-Baptiste. L’Évangéliste Luc veut sans doute montrer par
là le caractère universaliste de l’appel à la conversion. Il y a tout d’abord les Juifs de race et de
religion, qui constituent évidemment la majeure partie de cette foule. Puis, il y a les publicains qui sont des Juifs
de race, mais qui sont marginalisés par leur compromission avec le pouvoir
étranger qui occupe la Palestine. Enfin il y a des soldats qui ne peuvent
être que des soldats romains (recevant leurs ordres directement du gouverneur
Pilate), et qui ne sont donc pas des Juifs, mais qui sont quand même venus
écouter le message de Jean et sans doute se faire baptiser par lui.
À toutes ces personnes,
Jean-Baptiste répond de façon concrète à la question toute pratique qu’ils posent et qui est : « Que devons-nous faire ? ». Il ne s’agit donc pas de savoir quoi
penser ou quoi croire. Il s’agit de
savoir quoi « faire ». Tout le
message de Jésus ira dans le même sens. La question ultime, ici-bas comme au jour du jugement, sera toujours
« Comment as-tu agi ? » et plus précisément « Comment as-tu agi à l’égard de
ton prochain ? ».
Dans les trois réponses
de Jean aux divers groupes, il ne mentionne aucune pratique religieuse, mais il
souligne plutôt les exigences de la justice et tout particulièrement du partage,
à commencer par le partage des choses les plus essentielles à la vie : le
vêtement et la nourriture. Cette
attitude de partage exige évidemment tout d’abord qu’on ne pratique pas le vol
comme Jean le rappelle aux publicains et qu’on ne fasse violence à personne,
comme il le rappelle aux soldats.
Ce message de l’Évangile
nous rappelle donc que la vraie joie ne vient pas du fait de posséder une
grande quantité de biens, mais de la communion qui s’incarne dans le partage et
dans le respect de la justice, qui est le respect de chaque personne perçue
comme enfant de Dieu. Ainsi, dès le
début de l’Évangile est affirmé le principe – qui sera répété par la suite de
multiples façons : qu’une communion avec Dieu est impossible sans la
communion avec notre prochain.
Quant à cette communion
avec notre prochain elle ne peut se ramener à de vagues sentiments de sympathie
ou de gentillesse, mais elle implique le respect total de la justice et même le
partage des biens matériels lorsque ce partage est nécessaire pour faire
disparaître les déséquilibres.
Armand VEILLEUX
|
|
||
|
|||