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8 décembre 2012 – Solennité de l'Immaculée Conception
Gen 3,9...20; Éph 1, 3...12; Luc 1, 26-38
H O M É L I E
Les lectures de ce matin sont d'une richesse
extraordinaire. Elles nous présentent
une fresque grandiose de l'Histoire du Salut depuis le moment de la création
jusqu'à la plénitude des temps. Et la
lettre aux Éphésiens nous fait remonter encore plus haut, avant même la
création du monde, au moment où nous avons tous été choisis dans le Christ pour que nous soyons,
dans l'amour, ses fils et ses filles, saints et irréprochables devant lui.
Au début de la création, il y a un homme et une
femme, Adam et Ève, créés à l'image de Dieu, qui malheureusement compromettent
gravement cette image en eux. Lorsque
les temps sont accomplis, il y a encore une femme et un homme, Marie et Jésus,
qui restaurent cette image pour toute l'humanité. Et nous savons par le récit
grandiose de l'Apocalypse qu'à la fin des temps, dans la Jérusalem céleste, il y aura de nouveau une femme et son fils, la femme couronnée
de douze étoiles et son fils qui règnera sur le trône de gloire pour toujours.
Dans le récit de la Genèse et celui de l'Évangile
d'aujourd'hui, les parallèles et les contrastes sont frappants. Dans le premier cas il y a le serpent qui
trompe; dans le second il y a l'ange de
Dieu qui apporte le message de salut. Dans le premier cas il y a la malédiction, dans le second la
bénédiction. Dans le premier cas il y a
la peur et l'autojustification; dans le second il y a la confiance et
l'abandon.
Dans le récit de la Genèse, ni Adam ni Ève
n’acceptent la responsabilité de leurs actes : à Dieu qui lui demande des
comptes, Adam répond « C’est la femme... » ; et la femme répond : « C’est le serpent... ». Marie au contraire répond : « Voici
la servante du Seigneur ».
Adam et Ève se laissent facilement détourner de
l’unique parole que le Seigneur leur avait adressée. Marie dit : « Qu’il me soit fait
selon sa parole ».
Toute cette histoire est une hymne à la grandeur
de l'humanité telle qu'elle est jaillie des mains de Dieu. Il avait créé l'homme et la femme pour être
ses enfants. La beauté de leur être créé
consistait en leur fragilité. Ils ne sont
pas des dieux, ils sont des êtres créés, limités, et donc vulnérables devant
les forces du mal et du néant. Dès le
début de leur existence tout semble compromis. Ils semblent perdre la bataille. Mais Ève, la vivante et la mère de tous les vivants sera fidèle à son
nom et ne laissera pas les forces de la mort vaincre la vie dont elle est
dépositaire.
Dieu a mis une inimitié entre la femme et les
forces de la mort représentées par le serpent. La vie sera finalement plus forte
que la mort et après une longue évolution et une longue attente, la Vie
connaîtra la victoire totale et définitive sur la mort en une autre femme, une
autre Ève, une toute jeune fille nommé Marie, qui devient la Mère de Celui qui
est la Vie même. Finalement apparaît, la
femme qui est totalement fidèle à son nom, celle en qui la Vie a totalement
vaincu les forces du serpent, la pleinement vivante, la mère de la Vie et
de tous les vivants. C'est cette
victoire de la Vie en elle, dès le premier instant de son existence, que nous
célébrons aujourd'hui. Ainsi l'hostilité
entre le serpent et la femme, établie par le créateur, s'est soldée par la
victoire totale de la Femme.
Le récit de la Genèse est une représentation symbolique de la lutte de
tous les jours en chacun de nos coeurs entre le bien et le mal, entre la vie
qui ne cesse de vouloir croître en plénitude et la mort qui nous rappelle vers
le néant -- entre le serpent qui a fait en nous un nid dont il ne veut pas se
laisser déloger, et l'Esprit de Dieu qui veut nous couvrir de son ombre et
faire naître en nous la vraie vie. Il y
a en chacun de nous Adam, qui se laisse bêtement entraîner vers la
transgression et qui, tout penaud, dit: "je me suis caché parce que
j'étais nu"; et Ève qui s'est, bien
sûr, laissée tromper, et qui a même entraîné Adam dans son erreur, mais qui
maintiendra vivante l'inimitié entre elle et le serpent jusqu'à ce qu'elle lui
écrase la tête.
Cette victoire n'est pas seulement la
sienne; elle est celle de toute l'humanité. Aussi, dès le moment que cette
victoire de la Vie sur les forces du mal a été confirmée par la disposition de
Marie à laisser la Vie la pénétrer, l'oeuvre de notre rédemption peut commencer
et déjà Luc, dans son Évangile, fait apparaître la naissance du Précurseur.
Le récit de Luc se termine par les
mots. "Alors l'ange la quitta." Marie reste seule avec son
secret. Bientôt elle nous partagera ce
secret; c'est ce que nous célébrerons à
Noël.
Armand
VEILLEUX
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