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8 avril 2013 – Annonciation du Seigneur
H O M É L I E
En
cette fête de l’Annonciation du Seigneur, exactement neuf mois avant la
prochaine fête de la Nativité, nous célébrons le moment de la conception de Jésus
dans le sein de Marie, -- le premier moment de l’existence humaine de Dieu. Cet
instant, qui divise toute l’histoire humaine en deux grandes périodes – celle
d’avant le Christ et celle d’après la naissance du Christ – fait, dans
l’Évangile, l’objet de diverses annonces, ou « annonciations ».
Dans
l’Évangile de Matthieu, il y a l’annonce faite à Joseph, que nous avons lue il
y a quelques semaines, à l’occasion de la fête de saint Joseph. Dans l’Évangile de Luc, il y a deux
annonciations, l’une faite à Zacharie et l’autre faite à Marie. L’une ne se
comprend pas sans l’autre, car il y a chez Luc un parallèle rigoureux entre les
deux. Dans l’un et l’autre cas, c’est
le même ange Gabriel qui est envoyé d’auprès de Dieu, portant son message. Dans le premier cas il se tient à la droite
de l’autel de l’encens ; dans le second cas, il se tient devant Marie.
Dans le premier cas il est envoyé à un vieillard marié à une femme également
âgée – un couple stérile. Dans le second cas il est envoyé à une jeune fille fiancée mais
non encore mariée.
L’arbre
généalogique de Zacharie est impressionnant. Il est de famille sacerdotale, de la tribu de Lévi, demeurant à
Jérusalem, en Judée, dans la région la plus religieuse d’Israël. Il est un fidèle observateur de la Loi,
servant au Temple et étant entré en ce jour très spécial pour lui dans le Saint
des Saints pour y offrir l’encens à l’heure du sacrifice du soir, pendant que
le peuple attend au dehors. Dans le cas
de Marie, sa propre généalogie n’est même pas mentionnée, même si elle est
fiancée à un jeune homme de la tribu de David. Elle habite un petit village jamais mentionné dans l’Ancien Testament,
dans la Judée peu religieuse et même presque païenne. Elle est une toute jeune
fille sans importance.
Zacharie est
troublé et son manque de foi lui vaut d’être muet jusqu’à la naissance de son
fils. Marie demande tout simplement
comment « cela se fera-t-il », et loin d’être muette elle chante son
admirable « Magnificat ». Zacharie aura la mission d’imposer à son fils le nom de Jean – mission
qui revenait au père. Mais dans le cas
de Jésus c’est sa mère Marie qui lui donnera le nom de « Jésus » que
lui a révélé l’ange. Jean sera certes
« grand aux yeux du Seigneur », le plus grand des fils de la femme,
dira Jésus ; mais Jésus est le
« Fils du Très Haut ». Sur
Jean descendra l’Esprit Saint après sa naissance ; Jésus naît par l’intervention de l’Esprit
Saint.
On
pourrait allonger cette liste de points de comparaison. L’idée centrale est qu’avec le moment de la
conception de Jésus une ère nouvelle de l’histoire de l’humanité est commencée
– une nouvelle création remplace l’ancienne (ce à quoi se réfère la double mention du « sixième mois »
rappelant les six premiers jours de la création).
Cette
nouvelle création a débuté avec la conception de Jésus en Marie, la nouvelle
Ève, mère de tous les vivants. Ce n’est pas la fin d’une histoire et encore
moins la fin de l’histoire. C’est au contraire un nouveau départ, le début
d’une période de l’histoire à laquelle nous appartenons ; le début d’une
transformation de l’humanité qui doit se poursuivre dans notre société et dans
chacune de nos vies.
Après
Zacharie, Marie et Joseph, plusieurs ont reçu à un moment de leur vie une
« annonciation ». Les Actes des Apôtres nous en racontent
quelques-unes datant de la première communauté chrétienne, en particulier celle
de Paul sur le chemin de Damas. En
réalité, non seulement chaque Chrétien, mais aussi chaque être humain, reçoit
tout au long de sa vie de ces « visites » de Dieu qui lui sont faites
par des « anges de Dieu », c’est-à-dire des hommes et des femmes qui
lui aident à percevoir la volonté de Dieu sur lui. Il y a en particulier, dans
toute vie humaine adulte, un moment où le sens de sa vie ici-bas et le but vers
lequel elle tend lui sont révélés d’une façon intuitive et mystérieuse.
La fête
d’aujourd’hui nous invite à revivre ce moment où, à l’âge adulte, nous sommes
de nouveau nés à nous-mêmes, comme l’enseignait Jésus à Nicodème – le moment où
le sens de notre vie ici-bas nous a été révélé au fond de notre coeur. C’est le
moment où nous avons dû dire notre propre Fiat à la naissance de Dieu
dans notre existence et à l’entrée de notre existence personnelle dans la
dynamique du Mystère pascal.
Armand VEILLEUX
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