25 décembre 2011 – Messe de Minuit

Is 9, 1-6;  Tt 2, 11-14; Lc 2, 1-14

 

 

H o m é l i e

 

Chers frères et sœurs,

 

Au cours de l’année 2012 se tiendra à Rome un Synode de l’Église universel sur le thème de la nouvelle évangélisation.  Au cours de la même période l’Église diocésaine de Tournai célébrera son propre synode sur des thèmes qui se rattachent aussi à l’évangélisation. Or les lectures de la messe de cette nuit de Noël ont beaucoup à nous apprendre sur l’évangélisation et ses méthodes.

 

Le messager -- ou l’ange, comme on dit en grec -- qui apparaît aux bergers leur dit : « Je vous annonce une grande joie ». Cette traduction est très faible, car l’expression grecque utilisée par l’évangéliste Luc est « evangelízomai umín », mot-à-mot : « je vous évangélise une grande joie ». On pourrait encore traduire : « J’ai pour vous la bonne nouvelle d’une grande joie ». On doit déjà noter que l’évangélisation est, de sa nature, l’annonce d’une nouvelle, de quelque chose de nouveau. C’est pourquoi parler de « nouvelle évangélisation » est une sorte de tautologie. L’annonce de la bonne nouvelle est, de sa nature, toujours nouvelle.

 

L’objet de cette bonne nouvelle annoncée aux bergers est une grande joie, et cette joie n’est pas seulement pour eux, les bergers, ni seulement pour les juifs, mais pour tout le peuple. Et quel est l'objet de cette joie ?  C’est, dit l’ange aux bergers, qu’il vous est né aujourd’hui un sauveur, ou, plus littéralement, « un sauveur est né aujourd’hui pour vous ». Quelqu’un est né pour vous sauver, pour vous délivrer, pour vous libérer.

 

Nous avons là l’essentiel de toute évangélisation – qu’elle soit faite à des peuples qui n’ont jamais entendu parler de la foi, ou qu’elle soit faite de nouveau à des chrétiens, fervents ou refroidis. Ce qui est annoncé est très simple : Un enfant est né et notre libération vient de lui et c’est là le fondement de notre joie.  Cette évangélisation pourra être accompagnée de bien d’autres paroles, d’exhortations morales, de catéchismes, de cours d’éthiques, de théologie ou de doctrine sociale, etc.  Rien de cela n’est l’évangélisation – il s’agit de choses qui accompagnent l’évangélisation. La bonne nouvelle c’est tout simplement que Dieu s’est incarné dans un petit enfant et que cette bonne nouvelle doit nous remplir de joie. C’est tout !

 

À qui est faite cette annonce ? À des gens ordinaires qui font leur métier ordinaire.  Ce n’étaient pas des docteurs de la loi ni des prêtres.  Ce n’étaient pas non plus des pauvres sans métier. C’étaient des hommes ordinaires qui faisaient un métier ordinaire.  Pour des bergers, se trouver dans les champs la nuit pour garder leurs troupeaux était une chose tout à fait ordinaire.  C’est là que vient les rencontrer le messager de la bonne nouvelle, leur évangélisateur.  L’évangélisation n’est pas faite ni dans le temple, ni dans les grandes célébrations de masses.  Elle est faite aux gens ordinaires, sur le lieu de leurs occupations de tous les jours ou de toutes les nuits.

 

Qui annonce cette bonne nouvelle ? Un messager ordinaire – car c’est ce que signifie le mot « ange », c’est-à-dire un envoyé, quelqu’un envoyé pour porter cette bonne nouvelle. Cet ange ne s’appelle ni Gabriel, ni Michel, ni Raphael.  Aucun nom ne lui est donné.  Quiconque apporte la joie en transmettant cette bonne nouvelle est ce messager, cet évangélisateur.

 

N’imaginons donc pas une « nouvelle évangélisation » qui soit un truc nouveau, transmis avec des machins nouveaux.  Nous sommes tous appelés à être ces évangélisateurs toujours nouveaux, en recevant et retransmettant cet appel de tous les temps.  C’était d’ailleurs déjà le message d’Isaïe à ses concitoyens vivant en exil, comme nous l’avons entendu dans la première lecture.  Ce fut aussi la salutation de l’ange Gabriel à Marie : « Réjouis-toi, Marie. Tu enfanteras un fils ».

 

Redisons-nous la même chose les uns aux autres.  Réjouissons-nous. Notre salut, le salut de notre humanité, la libération de tous nos esclavages, y compris tous ceux que nous nous sommes inventés nous-mêmes – ce salut, cette libération,  réside dans le fait que notre humanité a été transformée, divinisée, parce que Dieu s’est fait homme.  Il n’est pas venu dans la gloire.  Il est devenu homme comme chaque humain le fait, en naissant d’une femme. Depuis lors, et jusqu’à aujourd’hui, et pour toujours le salut est nôtre, si nous voulons bien le recevoir.

 

Réjouissons-nous. Cherchons notre joie et notre salut non dans quelque chose de grand et d’extraordinaire, mais dans tout ce qui se manifeste dans l’humilité et la simplicité comme vie nouvelle. Et si nous savons transmettre cette joie à nos frères et sœurs en humanité, partout où ils se trouvent, dans les circonstances les plus ordinaires de la vie, alors nous serons ces « nouveau évangélisateurs »  que l’Église recherche.

 

 

Scourmont, le 25 décembre 2011

Armand Veilleux

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Autres homélies pour Noël

 

1998

Messe de Minuit [en français] [en anglais] [en italien]
Messe de l'Aurore [en français]
Messe du Jour [en français]

 

1999

Messe de Minuit : Original français -- Traduzione italiana

 

2000

Messe de Minuit : (original français) (traduzione italiana)

 

2001

Messe de Minuit (original français)

2002
Messe de Minuit (original français) (English translation)

2003
Messe de Minuit (original français)

2004

Messe de Minuit (original français)

 

2005

Messe de Minuit (original français) (traduzione italiana)

2006

Messe de Minuit (français) (español)

2007

Messe de Minuit (original français)

 

2008

Messe de Minuit (original français)

 

2009

Messe de Minuit (original français)

2010

Messe de Minuit (original français) ( en italien )

 

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