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29 juillet 2012 – 17ème dimanche
"B"
2 Rois 4, 42-44; Eph 4, 1-6; Jean 6,1-15
H O M É L I E
Dans la Lettre aux Éphésiens, saint Paul
nous invite, ou plutôt nous supplie de suivre fidèlement l'appel que nous avons
reçu. Cela signifie pour lui, vivre dans
l'humilité, la douceur et la patience, nous supportant les uns les autres avec
amour. Cela signifie aussi avoir à cœur
de garder l'unité dans l'Esprit par le lien de la paix.
Or, la première et la troisième
lectures nous enseignent qu'une telle unité n'est pas possible à moins que nous
partagions les uns avec les autres, et que les pauvres soient nourris, et à
moins que, au niveau de l'humanité entière, tous les pauvres soient admis au
banquet des nations. Nous
trouvons d'ailleurs plusieurs allusions aux pauvres dans le récit de l’Évangile
de Jean. Par exemple, les pains
distribués par Jésus ne sont pas des pains faits avec le blé, mais des pains
d'orge, qui étaient la nourriture des pauvres.
De nos jours une très grande partie
de l'humanité vit dans la pire forme de servitude qui soit, la faim. La faim – qui est la plus efficace arme de
destruction massive -- tue chaque année plusieurs dizaines de millions de
personnes, beaucoup plus que le SIDA, la malaria et toutes les autres maladies
infectieuses réunies. Cette servitude
est dans une très large mesure le fruit du contrôle de l'économie mondiale et
donc des ressources vitales par quelques grandes puissances nationales et
multinationales. La solution apportée
par Jésus à la situation de son temps nous indiquera quelle solution est
nécessaire aujourd'hui.
Jésus lève les yeux et voit la foule
nombreuse qui le suit et il perçoit son besoin de nourriture, avant même que
personne n'ait manifesté ce besoin. Ne
devons-nous pas faire la même chose de nos jours : voir les besoins des
millions d'affamés avant que des "catastrophes humanitaires" ne
doivent être utilisées par les réseaux publicitaires pour éveiller nos
émotions? De même, dans notre entourage
immédiat, et dans notre vie de tous les jours.
Dans l’Évangile que nous venons
d’entendre, Philippe, à qui Jésus expose d'abord cette situation d’une foule
qui a faim, ne peut concevoir une solution autre que monétaire et mathématique:
"le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun ait un
petit morceau de pain". C'est
exactement la même logique qui organise des réunions de pays donateurs, pour
récolter des fonds afin de nourrir des peuples réduits à la famine par des
guerres qui ont coûté énormément plus cher. Pour Jésus cette voie de solution n'en est pas
une. Elle ne ferait que maintenir la
servitude et l'humiliation des populations auxquelles on distribue
"généreusement" leur ration quotidienne strictement calculée.
La solution proposée par André, dans
l’Évangile d’aujourd’hui, et qui est celle choisie par Jésus est la solution du
partage. Jésus demande ce qu’on a apporté et il dit de le partager. Il y en a
alors assez pour tous. Le vrai miracle qui s’est produit n’a pas été la multiplication mais la volonté de
partager. De plus, les personnes
présentes n’ont pas été appelées à se présenter à la queue leu leu pour
recevoir leur pitance de la main de généreux bienfaiteurs; elles ont été invitées à s'allonger comme on
le faisait dans les banquets et tout particulièrement pour le repas pascal,
afin de prendre un repas en toute dignité avec des commensaux. Et lorsque tous furent allongés dans l'herbe
abondante (signe de l'abondance du Royaume), Jésus leur a distribué lui-même la
nourriture, comme un hôte le fait avec ses invités.
Lorsque Jésus amène ainsi la foule à
partager le peu de nourriture qu'on a apporté, il y a en a abondamment pour
tous. Le problème de la faim dans le
monde, aujourd'hui comme alors a toujours été un problème de juste répartition plutôt
qu'un problème de ressources. Encore de
nos jours lorsque 6 pour cent de la population mondiale consomme 90 % des
ressources naturelles, nous ne sommes pas devant un problème de ressources ni
un problème démographique. Nous sommes
devant un problème de justice.
Au cours de cette célébration
eucharistique demandons pour nous mêmes et aussi pour les chefs des nations, la
lumière et le courage nécessaires pour mettre en pratique dans nos vies ce
message de Jésus, afin que tous ceux qui sont dans le besoin soient secourus et
afin que tous les peuples soient finalement admis au banquet des nations.
Armand VEILLEUX
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