|
|
||
|
|||
21 avril 2012 – Abbaye de Scourmont
Consécration monastique de Père Frédéric
RUBWEJANGA
Michée 6, 6-8 ; Hébreux 10, 5-10 ;
Marc 10, 17-21
Homélie
Cher
Père Frédéric,
Chers
Frères et Sœurs,
Il y a des phrases de l’Écriture que
nous avons entendues ou lues plusieurs fois, qui ont eu chaque fois pour nous un sens un peu différent et que nous avons pu
percevoir un jour comme un appel personnel. Ainsi en fut-il pour saint Antoine, le père des moines en Égypte, à la
fin du quatrième siècle. Né d’une famille chrétienne, il s’en allait un jour à
l’église pour la célébration liturgique, cherchant d’un cœur particulièrement
ardent quel était la volonté de Dieu sur lui. Le texte d’Évangile qu’on lut ce jour-là dans la liturgie était la
parole de Jésus au jeune homme qui l’interrogeait sur ce qu’il devait faire
pour avoir en héritage la vie éternelle, et que nous venons de lire :
« Va, vends tout ce que tu as,
donne-le aux pauvres… puis viens et suis-moi. » Antoine avait sans doute entendu cette phrase
plusieurs fois auparavant, mais ce jour-là il la perçut comme un appel
personnel. Il alla, vendit les
propriétés qu’il avait reçues de ses parents, conservant tout juste ce qu’il
fallait pour prendre soin de sa jeune sœur. Plus tard une autre parole de l’Écriture lui fit faire un nouveau
pas : « Laisse demain prendre soin de lui-même ». Ce fut l’occasion d’un nouveau détachement et
ainsi en fut-il pour le reste de sa vie.
Cher Père Frédéric, c’est sans doute
cette parole de l’Écriture « Viens
et suis-moi » qui vous a fait quitter votre famille et entrer au petit
séminaire lorsque vous étiez encore adolescent. Vous avez perçu la même parole
du Christ dans la voix de l’évêque qui vous a appelé au sacerdoce, puis, après
de nombreuses années d’enseignement et de formation des futurs prêtres, vous
avez perçu le même appel du Christ dans la voie du Pape qui vous appelait à
l’épiscopat. Après quinze ans d’épiscopat, avant d’entreprendre une nouvelle
étape au service de l’Église au Rwanda, vous avez voulu passer quelques mois de
repos sabbatique ici à l’abbaye de Scourmont. Au cours de ce séjour, vous avez sans doute de nouveau entendu la même
voix au fond de votre cœur, le même appel à continuer à suivre le Christ d’une
autre façon. Vous m’avez demandé tout
simplement : « Est-ce qu’un évêque peut devenir
moine ? ». Vous avez alors commencé une nouvelle étape de votre cheminement
spirituel, étape qui vous a conduit jusqu’au geste que vous posez aujourd’hui, par
lequel vous vous engagez publiquement devant l’Église, représentée par toute
l’assemblée présente, à continuer votre suite du Christ au sein de la communauté
monastique de Scourmont. Il est clair
qu’il ne s’agit pas, dans votre cheminement spirituel, d’une rupture, mais de
la continuation d’un cheminement à la suite du Christ commencé durant votre
enfance et qui se prolongera, nous l’espérons tous, encore de nombreuses années
au sein de notre communauté.
La lecture de la Lettre aux Hébreux,
que nous avions comme seconde lecture, aussi bien que le texte du prophète
Michée, que nous avions comme première lecture de cette Eucharistie, nous
montre bien qu’avec l’incarnation du Fils de Dieu, l’économie des sacrifices de
la Loi ancienne est terminée. Le seul
sacrifice que nous puissions offrir à Dieu est celui de faire sa volonté,
c’est-à-dire d’unir notre volonté à la sienne. Et comme Jésus de Nazareth nous
en a donné l’exemple, c’est en marchant à sa suite, c’est-à-dire en se faisant
ses disciples, que nous pouvons aller vers le Père, entrer dès ici-bas dans ce
cheminement qui se continuera en vie éternelle.
Le récit de l’appel à le suivre fait
par Jésus à celui qu’on appelle le « jeune homme riche » tient une
place importante dans chacun des trois évangiles synoptiques. Chacun des
évangélistes lui a donné un éclairage particulier. Pour bien percevoir toute la
portée de ce récit, il faut remarquer qu’à ce moment, dans la vie du Christ,
celui-ci rencontrait de plus en plus d’incrédulité et même d’opposition de la
part des Juifs. Il était en route vers
Jérusalem où il allait être crucifié, comme il l’avait déjà annoncé trois
fois. Il faut prendre cela en
considération pour bien saisir la portée de l’invitation de Jésus au jeune
homme qui l’interrogeait sur la vie éternelle : « Viens,
suis-moi ». Il l’appelait à entrer
dans son mystère pascal.
Il y a autre chose de très important
dans la réponse de Jésus à ce jeune homme qui se montrait intéressé par la vie
éternelle. Jésus lui rappelle d’abord le noyau central de la Loi, le
Décalogue. Mais il ne mentionne pas du
tout les premiers préceptes du Décalogue se rapportant à Dieu. Il ne mentionne
que ceux qui se rapportent au prochain, indiquant ainsi bien clairement que la
vie éternelle qui l’intéresse n’est pas une vie après la mort que l’on pourrait
gagner par les mérites de ses actes durant la vie présente, mais bien le
« règne » de Dieu commencé ici-bas dans la justice et la charité.
Cher Père Frédéric, puisque vous
désirez poursuivre votre marche à la suite du Christ au sein de la communauté
monastique de Scourmont, je vous invite à prononcer votre engagement
définitif dans cette communauté; et tout d’abord je vais vous demander de
nous exprimer vous-même ce désir.
|
|
||
|
|||