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octobre 2011 – Dédicace de l’Église de Scourmont
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Rois 8, 22-23.27-30 ; Heb. 12, 18...24 ; Jean 10, 22-30
H O M É L I E
Chers Frères de Scourmont,
L’histoire
de nos vocations est propre à chacun de nous et bien différente dans chaque
cas. Cependant je ne crois pas que pour
aucun d’entre nous ici présents, elle ait été le fruit d’une intervention
extérieure et bruyante du ciel. Sans
doute, nous pouvons nous appliquer ce que l’auteur de l’Épître aux Hébreux écrit
à ses lecteurs : « Frères, quand vous êtes venus vers Dieu, il n’y avait rien
de matériel comme au Sinaï, pas de feu qui brûle, pas d’obscurité, de ténèbres,
d’ouragan, pas de son de trompettes... ». Mais à nous s’applique aussi la suite du texte : « Vous êtes
venus vers Dieu... vous êtes venus vers Jésus, le médiateur d’une alliance
nouvelle... »
Oui,
nous sommes tous ici ensemble, formant l’Église de Scourmont, parce que Dieu
nous a appelés chacun de nous par notre nom, venant de divers horizons, avec
toutes nos différences, pour être le lieu visible de sa présence en « ce
monde ». Non seulement de sa
présence dans le monde en général, mais dans ce monde bien concret du Hainaut,
dans ce petit coin de la Belgique, aujourd’hui, en cette deuxième décennie du
troisième millénaire.
Comment
devons-nous vivre cette mission en ce moment où la voix de l’Église est faible
et où, de toute façon, elle est peu entendue et peu reçue, qu’elle soit faible
ou forte ? Cherchons notre modèle
en Jésus de Nazareth, en relisant attentivement le récit d’Évangile que nous
venons d’entendre.
Jésus
était dans le Temple de Jérusalem, au moment où l’on célébrait l’anniversaire
de la dédicace du Temple, tout comme nous célébrons aujourd’hui la dédicace de
notre Église. C’était l’hiver – tout
comme, de nos jours, la saison que connaissent l’Église et nos communautés
monastiques en Occident, c’est aussi l’hiver. Jésus ne cherche pas un feu extérieur près duquel se blottir ; il se réchauffe à partir de sa propre chaleur
intérieure, en marchant vigoureusement de long en large dans le Temple. Sa singularité attire, et on se groupe autour
de lui. On lui demande une parole : Dis-nous clairement qui tu es. Si tu es le Messie, dis-le clairement. Jésus n’a rien à leur dire en paroles. Tout ce qu’il a à leur dire il l’a déjà dit
par ses actions et sa vie.
Tout
cela est rempli de leçons pour nous. Et
l’une de ces leçons est que nous devons refuser de céder aux demandes de
justifier l’Église, de nous justifier nous-mêmes, de justifier notre style de
vie et même de l’annoncer. L’Évangélisation
– qu’on la veuille ancienne ou nouvelle – ne consiste pas à annoncer l’Église,
mais bien à annoncer le Christ. Nous
n’avons pas non plus à annoncer la vie monastique. Nous avons tout
simplement à annoncer le Christ à
travers notre vie monastique, par l’authenticité de ce que nous
vivons.
Jésus
termine sa réponse en disant : « ... personne ne peut rien arracher
de la main du Père. Le Père et moi, nous
sommes UN. » C’est pour cela que
Jésus peut être, comme le disait la fin du texte de la Lettre aux Hébreux lu il
y a un instant, « le médiateur d’une alliance nouvelle ». Il est médiateur par son sang répandu pour
nous ; et ce sang, « parle plus fort que celui d’Abel ».
Nous
vivons dans un monde où, en diverses parties du globe, beaucoup de sang est
répandu. Et chaque fois qu’une personne
humaine est tuée par une autre, c’est Abel qui est de nouveau tué par Caïn. Il
est criminel de se réjouir de la mort d’une personne, fût-ce celle d’un
criminel ou d’un dictateur. Le sang
d’Abel crie vengeance ; mais le sang du Christ, dit la Lettre aux Hébreux,
crie plus fort que le sang d’Abel, plus fort que le cri de vengeance. Son langage est celui de l’Unité.
Si
nous voulons être fidèles à Celui qui nous a réunis, soyons nous aussi, de toutes
les façons qu’il nous est possible de l’être, des médiateurs, des agents
d’unité, par notre vie encore plus que par nos paroles.
Armand VEILLEUX
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