Scourmont, 28 janvier 2009

Sagesse 2, 23 ; 3, 1-6.9 ; 1 Jean 3, 14. 16-20 ; Luc 12, 35-38.40

  

Homélie pour les obsèques de Père Eugène

  

            Jésus déclara un jour à ses disciples qu’il était venu non pour être servi, mais pour servir (Mt. 20, 28). Aussi le service doit prendre une place tout importante et même centrale dans la vie de tout chrétien, et donc aussi de tout moine qui s’efforce de vivre aussi pleinement que possible l’Évangile.

 

            Dans l’Évangile que nous venons de lire Jésus recommande à ses disciples de rester sans cesse « en tenue de service », tout comme il leur demande ailleurs de prier sans cesse.  Cela veut dire qu’une vie de prière continuelle n’est pas une vie où l’on se dégage de toutes les activités ordinaires de la vie pour ne faire que prier ;  mais bien qu’une vie de prière continuelle est une vie où règne sans cesse l’union d’amour avec Dieu.  Or, comme saint Jean le répète sur tous les tons, on ne peut aimer Dieu si on n’aime pas ses frères.  Or un amour véritable n’est pas simplement un sentiment du coeur, mais il doit, pour être vrai, s’incarner. « Nous devons aimer, dit Jean, non pas avec des paroles et des discours, mais par des actes et en vérité ».

 

            Dans une vie commune, l’amour prend nécessairement toujours la forme de service mutuel ;  et donc le mot service est un synonyme du mot amour.

 

            Au cours des derniers jours j’ai reçu, de vive voix de la part de quelques personnes, et par email de la part d’un grand nombre d’autres personnes, surtout du Congo, des témoignages concernant Père Eugène.  Ce que tous semblent avoir retenu de lui par-dessus tout est sa grande bonté, et une bonté qui s’exprimait dans une volonté constante de rendre mille-et-un services à quiconque manifestait un besoin.

 

            Il y a bien des façons de servir.  On peut servir pour montrer ses capacités, ou tout simplement pour le plaisir qu’on se donne à soi-même en servant.  Chez Père Eugène, ses services étaient toujours offerts avec une grande humilité et une grande discrétion, sans qu’on ne puisse jamais soupçonner la moindre dose de recherche personnelle.  J’en ai souvent fait l’expérience moi-même, chaque fois que j’allais à Murhesa et que je passais cinq ou six jours avec lui à l’aumônerie.   

 

            Tous ceux qui ont vécu avec lui au Congo se souviendront, d’une part de ses talents exceptionnels comme menuisier, mais aussi de sa capacité de réparer à peu près n’importe quoi, même lorsque les pièces de rechange étaient introuvables, et de garder en fonction des appareils que n’importe quelle autre personne aurait mis de côté de puis longtemps.  Et cela aussi était fait avec grande humilité, comme une chose allant de soi.

 

            Dans l’Évangile que nous avons lu, et où Jésus loue le serviteur qu’il trouvera en état de veille à son retour, il promet de le faire mettre à table et de le servir lui-même.  Déjà le Livre de la Sagesse disait que l’homme que Dieu a mis à l’épreuve et qu’il a reconnu digne, restera avec lui dans son amour et qu’il lui accordera grâce et miséricorde. Nous pouvons donc prier, avec la certitude d’être exaucés, pour que Dieu accueille dans son amour son fidèle serviteur, père Eugène, qu’il le fasse asseoir dans son banquet céleste et le serve Lui-même, comme il l’a promis, pour les siècles des siècles.

 

 Armand VEILLEUX

 

 

 


 

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