24 juin 2008 -Solennité de saint Jean-Baptiste
Is 49, 1-6 ; Actes 13, 22-26 ; Luc 1, 57---80


H O M É L I E


Son nom est Jean

Nous avons eu ces derniers jours une session sur saint Bernard durant laquelle le conférencier a souligné avec insistance l'importance de l'identité personnelle dans l'anthropologie de Bernard et des autres premiers Cisterciens. Or cette préoccupation s'enracine dans une culture biblique où le nom a une très grande importance, et nous en avons de beaux exemples dans la liturgie de ce matin.

L'ange avait dit à Zacharie : " Ta femme Élisabeth t'enfantera un fils et tu lui donneras le nom de Jean ". Donc, après la naissance de Jean, au moment de sa circoncision, le jour où l'on donnait à l'enfant son nom, aussi bien Élisabeth que Zacharie, et malgré les objections de la parenté, disent " son nom est Jean ".

De même, dans la première lecture, nous avons entendu Isaïe : " J'étais encore dans le sein maternel quand le Seigneur m'a appelé. J'étais encore dans les entrailles de ma mère quand il a prononcé mon nom. "

Les livres bibliques essayent souvent de déterminer la signification étymologique du nom de chacun des plus grands personnages du Peuple de Dieu. Mais ce n'est pas cette étymologie, d'ailleurs souvent assez arbitraire et parfois un peu fantaisiste, qui est importante. Ce qui est important est le fait que nous avons chacun un nom, que nous ne sommes pas de simples numéros, ni même de simples individus, mais bien des personnes, toutes différentes les unes des autres.

Nous sommes nés avec des caractéristiques propres - physiques, psychologiques, affectives - et avec des limites qui nous sont aussi propres. C'est dans la mesure où nous devenons chaque jour un peu plus " nous mêmes ", dans la mesure que nous assumons notre identité personnelle qu'il nous est possible d'entrer en relation avec les autres et avec Dieu. Si nous n'assumons pas vraiment et consciemment notre identité, nous ne sommes que des robots. Nous pouvons être des robots agréables ou désagréables, nous pouvons être des robots qui pratiquent à la perfection toutes les règles morales et religieuses. Mais nous ne sommes que des robots. D'où l'importance de nous tenir debout devant Dieu et devant les hommes, humblement mais avec toute notre dignité d'enfants de Dieu, engendrés à son image.

Nous aurons alors peut-être la grâce de faire la même expérience que Job, qui découvrit qu'avec ou sans toutes les richesses et les attributs qu'il avait ou qu'il pouvait avoir perdu, il était la même personne devant la face de Dieu.

Et, finalement, comme nous l'enseigne nos Pères cisterciens, avec leur anthropologie du 12ème siècle, Dieu étant la plénitude de l'être, -- ou bien, pour le dire dans un langage plus moderne, la plénitude du " moi " ou du " je " -- c'est dans la mesure où nous devenons nous-mêmes que nous grandissons dans notre participation à la vie divine ; et c'est en progressant dans la connaissance de nous-mêmes que nous progressons dans la connaissance de Dieu.

Ce n'est là, en aucune façon, une attitude orgueilleuse ou hautaine. C'est l'attitude tout humble de Jean qui, sachant qui il était et quelle était sa mission pouvait dire, le coeur rempli de joie : " Il faut qu'Il croisse et que je diminue ".

Armand Veilleux





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