Homélie
pour le mercredi de la 4ème sem. de Carême,
2008
Exode
32, 7-14 ; Jean 5, 31-47
Abbaye
de Soleilmont
Il
y a quelques jours j’avais une conversation avec Père Charles Dumont qui me
parlait de ses lectures récentes. Il
venait de relire un ouvrage de Hanna Arendt, une des plus profondes philosophes
du vingtième siècle. Il me rappelait
comment Hanna Arendt reprochait à la pensée chrétienne sur le thème de l’action
et de la contemplation d’avoir été trop dépendante, depuis le temps d’Augustin
de la pensée platonicienne. Pour elle,
la pensée est une action et toute action vraiment humaine est une
contemplation. C’est une vision qui me
rejoint beaucoup, et c’est pourquoi j’étais très heureux de retrouver au début
de l’Évangile d’aujourd’hui cette phrase de Jésus que j’ai toujours
aimée : « Mon Père travaille sans cesse et je fais de
même » !
Il
n’est pas sans importance de remarquer que cette phrase de Jésus vient au début
d’un discours où il parle de son amour du Père et de son union avec lui, et de
l’amour et l’union auxquels nous sommes nous aussi conviés, si nous savons
sortir de nous-mêmes.
Hier,
dans la vision d’Ezéchiel que nous avions comme première lecture, nous avons vu
Ézéchiel de plus en plus englouti par les eaux de la vie (d’abord jusqu’à ses
cheville, puis jusqu’à ses genoux, puis jusqu’à la ceinture...) Allant,
toujours plus loin de lui-même, s’oubliant pour se laisser envahir par ces
eaux, il revint sur le rivage où il se trouvait au point de départ pour y
découvrir les arbres et les fruits qui y avaient toujours été et qu’il n’avait
pas vu auparavant.
Dans
la première lecture d’aujourd’hui, qui est d’Isaïe, Dieu est présenté comme la
plus tendre des mères qui ouvre ses bras et saute de joie quand ses fils et ses
filles retournent de l’exil
L’Évangile
nous fait pénétrer dans un niveau encore plus profond. Jésus nous invite à
être un avec notre Père des cieux, tout comme lui il est un avec son Père. Il nous invite à être non seulement des
objets de sa miséricorde, mais à partager la miséricorde qu’il a pour tous les
autres comme pour nous – non seulement à faire sa volonté, mais à n’avoir qu’un
vouloir, qu’une volonté, qu’un amour avec lui : ce qui est la forme la
plus radicale d’obéissance.
Cette
transformation radicale de nos coeurs, qui demeure le but de notre vie
monastique, nous sera offerte comme grâce spéciale de notre célébration du
mystère pascal. C`est aussi une grâce
qui nous est offerte dans chaque célébration eucharistique.
Ouvrons
nos coeurs à cette grâce.