15 septembre 2003 – Fête de saint Eleuthère, patron du diocèse de Tournai

2Cor 4, 1-2, 5-7 8,18-23; Mt 13,1-9.

Homélie donnée à la Cathédrale de Tournai

 

H O M É L I E

 

            Nous célébrons aujourd’hui la fête d’un grand pasteur, qui fut l’évêque de ce diocèse de Tournai, et qui en est le patron.  Il est donc tout à fait à propos que les deux lectures que nous venons d’entendre parlent de la parole de Dieu et de sa transmission.

 

            Dans l’Évangile, nous avons entendu la parabole du semeur et de la semence tombée en des sols de qualité très variée.  Dans ses paraboles Jésus nous parle en général de son Père, du Royaume des cieux ou de la Parole de Dieu.  Malheureusement nous sommes tellement centrés sur nous-mêmes que nous sommes facilement portés à interpréter ces paraboles comme si elles parlaient de nous et de notre réception du message de Jésus.  En lisant la présente parabole, nous y voyons facilement une exhortation à être une bonne terre et non pas un terrain rocailleux et rempli de ronces.  À vrai dire, nous avons une certaine excuse en faisant cela puisque c’est ainsi que l’Église primitive a interprété cette parabole et en a même attribué l’interprétation à Jésus lui-même (vv 10-23). Mais dans le texte même de la parabole, tel que nous venons de le lire, toute l’attention est portée non pas à la terre mais à la Parole elle-même.

 

Dans le texte de Matthieu, cette parabole suit immédiatement le récit dans lequel les membres de la famille de Jésus voulaient se saisir de lui et le ramener à la maison, parce qu’ils pensaient qu’il avait perdu la tête.  La parabole est donc en réalité une réflexion de Jésus sur son ministère.  Sa Parole – la Parole de Dieu – est reçue de diverses façons.  Chez certaines personnes, elle trouve un coeur de pierre et ne croît pas du tout ; chez d’autres, elle croit avec difficulté,  mais elle croît tout de même.  Et quand elle aura atteint sa pleine croissance, ce sera la Fin.  En somme, il s’agit d’un message d’espérance.

 

            L’agriculture ou le jardinage peuvent être une bonne école de patience, de confiance et d’abandon.  Une fois qu’on a travaillé le sol, qu’on y a déposé les semences et qu’on l’a arrosé, on n’a plus qu’à attendre avec patience.  Durant un premier temps il n’y a aucun moyen de savoir de façon certaine si la semence croîtra ou non.  Ensuite on ne peut savoir dans quelle mesure elle croîtra.  On peut agir de diverses manières sur les conditions qui favorisent la croissance, mais non ne peut intervenir aucunement dans le processus même de croissance. Dieu lui-même exerce une telle patience à l’égard de son oeuvre.

 

            Nous retrouvons chez Paul, dans sa deuxième Lettre aux Corinthiens, cette même révérence à l’égard de la Parole.  Elle est un trésor que nous portons, certes, dans des vases d’argile ;  mais un trésor que nous devons partager, une lumière qui a resplendi sur le visage du Christ et qui a brillé aussi dans nos coeurs, et que nous voulons faire briller au milieu des ténèbres.

 

            Nous tous qui avons, dans des circonstances diverses, à transmettre la Parole, demandons la grâce de le faire avec la même révérence, la même espérance et le même détachement.