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Chapitre du 8
octobre 2017
Abbaye de Scourmont
Écouter le jeune Eutyque
Le Livre des Actes des Apôtres raconte comment saint Paul,
un premier jour de la semaine, avant de quitter Troas pour Milet, célébra la
Fraction du Pain avec la communauté locale. Son sermon se prolongea jusque vers
le milieu de la nuit, si bien qu’un jeune homme du nom d’Eutyque, assis sur le
rebord de la fenêtre, s’endormit et tomba du troisième étage. On le retrouva
mort, mais Paul lui rendit la vie (Actes 20, 7-12). Ce récit, déjà plein
d’humour, a fait l’objet de commentaires des plus divers au cours des siècles.
Sauver Eutyque
Il y a quelques années deux auteurs anglophones, Gary
Miller et Phil Campbell, l’un Australien, l’autre Irlandais, publièrent un fort
intéressant livre de conseils aux prédicateurs, sous le titre Saving Eutychus (Sauver Eutyque) avec comme sous-titre « Comment prêcher
la Parole de Dieu et garder les gens
éveillés ». Les auteurs
trouvaient qu’il était humiliant qu’on arrive facilement de nos jours à faire
en quelques minutes d’une homélie du dimanche, ce qui avait demandé environ
quatre heures à saint Paul ! Heureusement pour eux, les auditeurs de nos
homélies ne sont pas assis sur le rebord d’une fenêtre au troisième étage.
Les jeunes d’aujourd’hui et l’Église
Monseigneur Angelo De Donatis, ordonné évêque auxiliaire du
diocèse de Rome en 2015 et nommé récemment Vicaire général de ce diocèse par
l’évêque de Rome, François, offrit, il y a quelques semaines, un commentaire plein
de sagesse et d’humour de ce récit du Livre des Actes. Angelo De Donatis (âge
de 63 ans) est un évêque tout à fait dans la ligne du pape François. Avant d’accéder à sa charge pastorale
actuelle, il a été longtemps curé de paroisse et un directeur spirituel très
recherché. Il connaît bien les jeunes. Son intervention clôturait une longue
réflexion diocésaine de trois mois sur les défis pastoraux pour la prochaine
année. Comparant les jeunes du diocèse
de Rome au jeune Eutyque du récit des Actes, il se demandait si, malgré toutes
les belles initiatives pastorales et liturgiques faites depuis Vatican II, les
jeunes ne s’étaient pas graduellement dirigés vers la fenêtre. Il se demandait
même si plusieurs, tout comme Eutyque, n’étaient pas tombés de la fenêtre et
n’étaient pas, de façon figurée, décédés, privés de toute capacité de rêver.
Pour De Donatis, il est urgent de faire comme Paul fit
cette nuit-là : laisser toutes les autres occupations, descendre au
rez-de-chaussée, là où Eutyque git et lui redonner la vie de l’Esprit. Et De
Donatis d’ajouter que le véritable danger était peut-être que ce n’est pas
seulement Eutyque (i.e. les jeunes) qui s’est endormi, mais toute la communauté
catholique.
Écouter les jeunes en Synode
Le Vicaire général de Rome ajoutait que le problème
fondamental n’était pas qu’on avait endormi le jeune Eutyque, mais qu’on
n’avait pas écouté ce qu’il avait à dire. Qu’on n’avait pas manifesté
d’empathie pour ses questionnements, sa solitude, sa recherche de sens.
C’est ce que le pape François veut faire avec le Synode
d’octobre 2018, dont le thème sera « Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel ». Peut-être
tout aussi important que le Synode lui-même, composé de sages représentants de
l’épiscopat, sera le « pré-synode des jeunes ». François a en effet
convoqué à Rome du 19 au 24 mars 2018 des jeunes du monde entier pour entendre
leur voix. On reconnaît ici une approche identique à celle du Synode sur la
famille : non pas partir de principes abstraits pour en tirer des conclusions,
mais bien écouter d’abord ce qui se vit à la base pour se demander ensuite quelle
réponse l’Évangile a à donner à toutes ces situations concrètes.
C’est un processus qu’il faut porter dans notre prière.
Tout d’abord parce que tout ce qui touche à l’Église est important pour
nous ; mais aussi parce qu’un des aspects du thème du Synode nous touche
de près : « le discernement vocationnel ».
Les communautés monastiques comme la nôtre ont les
vocations que l’Église locale est capable d’engendrer.
Armand Veilleux
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