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12 octobre 2014
Chapitre à la Communauté de
Scourmont
Ce qu’est un
banquet
Dans
la première lecture de la Messe d’aujourd’hui, le prophète Isaïe utilise
l’image du banquet pour décrire le salut des temps messianiques offert à tous
les peuples. De la même manière Jésus
utilise souvent l’image du banquet de noces dans l’Évangile, lorsqu’il veut
révéler le mystère de l’histoire du salut.
Paul
VI a souvent utilisé cette image, dans un contexte bien concret de justice
sociale et de répartition des ressources naturelles, pour rappeler que toutes
les nations de la terre doivent être conviées au « festin des
nations ». Évidemment, le pape
François va dans le même sens avec son appel constant à une Église pauvre pour
les pauvres.
Réfléchissons
un peu sur le sens de l’image du banquet, qu’on retrouve dans l’Évangile
d’aujourd’hui tout comme dans la lecture d’Isaïe. Et tout d’abord
demandons-nous ce qui distingue un banquet d’un repas de tous les jours.
La
première différence est dans l’invitation. En effet, on ne se présente pas à un banquet sans y être invité. Il s’agit d’un repas festif auquel une
personne invite librement ceux et celles qu’elle veut. Les invités sont libres d’accepter, mais ils
sont en quelque sorte forcés par cette invitation de révéler s’ils sont, oui ou
non, de vrais amis. Ceux qui ne sont pas de vrais amis trouvent toujours des
excuses pour éviter de venir.
Et
puis, un banquet regroupe plusieurs personnes. Pour un hôte ou une hôtesse, c’est un art que de savoir bien choisir ses
invités. Il faut, d’une part, éviter de
réunir à la même table des personnes qui ne peuvent se rencontrer. D’autre part, un banquet peut aussi être une
occasion de réconciliation offerte à des personnes qui ont quelque chose à se
pardonner mutuellement. Ce peut aussi
être l’occasion de nouer de nouvelles amitiés. Je connais une personne qui
s’est fait en quelque sorte une vocation d’inviter à sa table toutes sortes de
personnes ayant des intérêts spirituels ou théologiques communs et qui ne se
seraient probablement pas rencontrées autrement.
Le
troisième élément qui caractérise un banquet c’est que ce n’est pas une chose
que l’on fait normalement tous les jours. Il faut avoir quelque chose ou quelqu’un de spécial à célébrer : ce
qu’on célèbre peut être une arrivée, un départ, une rencontre après une longue
séparation, etc. C’est toujours
l’occasion de faire mémoire de quelque chose qui a une importance spéciale pour
tous les participants.
Une
telle célébration implique un certain engagement de la part de tous. En effet, on ne peut plus se permettre d’être
ennemis après avoir participé ensemble à un banquet, même si on l’était avant.
Un
banquet exige aussi une nourriture spéciale : quelque chose de vraiment
bon et préparé avec amour, qui soit un régal pour les yeux et l’odorat aussi
bien que pour le goût. Ce qu’on mange à
un banquet n’a pas simplement pour but de calmer la faim. (Cf. le film Le
festin de Babette).
Finalement,
un habit de fête s’impose. Une personne
bien éduquée ne va pas à un banquet en « jeans ».
Eh
bien ! Je crois qu’il est assez facile d’appliquer tout cela au banquet
eucharistique, auquel, dans ce cas, nous sommes conviés tous les jours !
Nous
sommes les invités du Seigneur Jésus, qui nous a recommandé de nous réunir
ainsi autour de la table en mémoire de lui. Il s’agit de quelque chose de beaucoup plus important et plus riche que
d’être simplement fidèles à une obligation ou à l’observance d’une règle. C’est
pour nous l’occasion de montrer notre amour pour la personne qui nous invite,
sachant au surplus, que nous sommes toujours invités.
Celui
qui nous a invités, nous a appelés de plusieurs horizons pour nous transformer en une communauté, une Église. C’est au moment de la célébration
eucharistique que notre communauté monastique se manifeste comme Église locale.
Et la présence d’autres fidèles (un petit groupe sur semaine, une foule plus
nombreuse le dimanche), nous rappelle que nous ne sommes pas vraiment Église,
si nous ne sommes pas en communion avec toutes les autres Églises locales dont
la communion entre elles forment la grande « Église ».
Au
moment de notre Eucharistie quotidienne, nous sommes réunis pour célébrer
ensemble quelque chose, ou plutôt quelqu’un. Nous célébrons le mystère pascal de notre rédemption dans le
Christ. Nous voulons conserver vivant le
souvenir de celui qui nous a invités, et écouter de nouveau son message.
Nous
avons une nourriture spéciale, qui est le Corps et le Sang du Christ, sacrement
de l’amour de Jésus pour nous et de l’amour que nous voulons avoir les uns pour
les autres.
Nous
aussi nous avons un vêtement spécial, car nous avons été revêtus du Christ le
jour de notre baptême ; et sans ce
vêtement nous ne pourrions pas célébrer l’Eucharistie.
Tout cela requiert un engagement de notre part : l’engagement à vivre le message reçu, et à manifester dans notre vie de tous les jours les liens rétablis ou raffermis ; l’engagement à transmettre à tous l’invitation ; et finalement l’engagement à rendre possible à tous la participation à ce banquet.
Armand Veilleux
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