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Chapitre
du
7
mars
2010
La convocation des frères au conseil Commentaire de RB 3 Étant donné que, pour Benoît, l’abbé
n’est
pas
un
père
spirituel
charismatique
autour
duquel
se
sont
regroupéS des disciples, mais un membre de la communauté auquel
un
service
est
confié
au
sein
de
cette
même
communauté,
il
est
normal
que,
tout
de
suite
après
avoir
parlé
du
ministère
de
l’abbé
il
parle,
dans
le
troisième
chapitre
de
sa
Règle,
de
la
consultation
des
frères. Cela est tout à fait conforme avec la conception
du
cénobitisme
qu’il
a
décrite
dès
son
premier
chapitre. Dans la conception de Benoît, la communauté
n’est
ni
une
monarchie
ni
une
démocratie.
L’abbé
n’est
pas
un
monarque
pouvant
décider
comme
il
veut
et
imposer
à
la
communauté
sa
volonté
propre
en
tout
domaine.
La
communauté
n’est
pas
non
plus
une
collection
d’individus
pouvant
se
mettre
d’accord
sur
n’importe
quel
projet,
fût-il
partagé
par
tous,
et
encore
moins
un
groupement
où
la
majorité
pourrait
imposer
sa
volonté
à
une
minorité.
Le sommet de ce bref chapitre est le
verset
8
qui
dit
que : Nul, au monastère, ne suivra le
désir
de
son
propre
coeur. Le mot latin traduit par désir est
voluntas. Donc,
personne
au
monastère
–
ni
l’abbé
ni
aucun
des
moines,
ne
doit
suivre
sa
volonté
propre.
Au
contraire,
en toute chose... tous suivront
ce
maître
qu’est
la
règle
(magistram
regulam). Ce qui constitue une communauté est qu’un groupe de frères – ou de soeurs
–
sont
réunis
sous
une
Règle
commune.
Cette
Règle
commune
c’est
tout
d’abord
l’Évangile,
mais
c’est
aussi
l’interprétation
de
l’Évangile
et
son
application
à
la
vie
monastique,
telle
qu’on
la
trouve
dans
la
Règle
de
saint
Benoît,
puis,
pour
nous
moines
d’aujourd’hui,
l’interprétation
et
l’application
qu’on
en
trouve
dans
nos
Constitutions
et
autres
Statuts
de
l’Ordre
et
dans
les
directives
élaborées
au
niveau
de
la
communauté
locale. Benoît donne à l’abbé la responsabilité
de
prendre
la
décision
finale
chaque
fois
qu’une
décision
doit
être
prise
qui
concerne
la
communauté
ou
engage
celle-ci.
Dans
cette
prise
de
décision
l’abbé
doit
agir
en
conformité
avec
les
orientations
et
les
directives
données
par
ce
qu’il
appelle
la
magistra
regula. Ceci exige
une
instance
constante
de
discernement,
ou
de
jugement. Il y a en effet des choses qui s’imposent, parce
qu’elles
sont
des
exigences
de
l’Évangile
ou
de
la
Règle. Il n’y a pas alors aucune décision à prendre
sinon
celle
de
se
conformer
à
cette
exigence.
Mais
il
y
a
aussi
constamment
des
situations
sur
lesquelles
il
faut
porter
un
jugement. Benoît utilise d’ailleurs le verbe « juger »
(judicare).
L’abbé
après
avoir
consulté
les
frères
fera
« ce
qu’il
jugera
le
plus
utile »
ou
encore
« jugera
le
plus avantageux ».
Mais il doit se souvenir que, « de
tous
ses
jugements »
il
devra
rendre
compte
« à
Dieu
le
très
juste
juge »
(aequissimo
iudici Deo). Benoît prévoit deux types de situations
différentes :
les
questions
très
importantes
et
les
questions
moins
importantes.
Dans
les
premières
toute
la
communauté
doit
être
convoquée ;
dans
les
autres,
il
suffira
de
prendre
le
conseil
des
anciens.
Évidemment
la
détermination
de
ce
qui
est
plus
important
et
de
ce
qui
l’est
moins
relève
d’un
jugement
subjectif.
C’est
pourquoi
aussi
bien
le
Droit
Canon
que
les
Constitutions
de
l’Ordre,
sur
la
base
d’une
expérience
séculaire,
ont
déterminé
un
certain
nombre
de
décisions
que
l’abbé
ne
peut
pas
prendre
sans
avoir
d’abord
entendu
l’avis
de
la
communauté
ou
de
son
conseil,
et
d’autres
qu’il
ne
peut
pas
prendre
sans
avoir
reçu
le
consentement
de
l’un
ou
de
l’autre,
selon
les
cas.
À
part
ces
cas,
somme
toute
pas
tellement
fréquents,
il
peut
toujours
et
même
il
doit
consulter
ou
bien
tous
les
frères
ou
tel
ou
tel
en
particulier
selon
la
nature
des
décisions
à
prendre
et
les
compétences
d’un
chacun. Ce qui intéresse le plus Benoît en
ce
chapitre
c’est
l’esprit
dans
lequel
tout
cela
doit
être
vécu. Et il l’exprime dans une série de recommandations
aussi
bien
à
l’ensemble
des
frères
qu’à
l’abbé.
Pour les questions importantes, il
demande
que
tous
soient
convoqués
« pour
cette
raison
que
le
Seigneur
révèle
souvent
à
un
plus
jeune
ce
qui
est
préférable ».
Cela
indique
déjà
que
le
but
de
la
consultation
n’est
pas
de
plaire
à
tout
le
monde
ou
de
trouver
la
solution
qui
déplaira
au
plus
petit
nombre
possible. Le but est de découvrir ce qui est pour le bien
de
l’ensemble.
C’est
tout
autre
chose
qu’un
débat
parlementaire
où
l’on
essaye
de
faire
valoir
sa
position
personnelle
et
au
besoin
de
l’imposer
à
la
minorité. C’est pourquoi tous sont invités par Benoît
à
donner
leur
avis
« en
toute
humilité
et
soumission ».
« Soumission »
veut
dire
qu’on
est
prêt
à
accepter
la
décision
finale,
quelle
qu’elle
soit
et
même
si
elle
ne
coïncide
pas
à
notre
point
de
vue. À l’abbé la recommandation instante
de
Benoît
est,
d’une
part,
de
faire
tout
« avec
conseil »
et,
d’autre
part,
de
toujours
agir
avec
la
crainte
de
Dieu,
dans
le
respect
de
la
Règle,
sachant
qu’il
aura
à
rendre
compte
de
ses
décisions. Dans la pratique, en ce qui concerne
la
marche
quotidienne
de
la
communauté,
l’abbé
déléguera
sa
responsabilité
de
prendre
les
décisions
à
plusieurs
personnes
différentes,
selon
la
nature
des
situations
et
leurs
fonctions.
La
même
obéissance
est
alors
due
à
chacun
de
ses
frères,
dans
le
domaine
de
sa
compétence,
qu’à
l’abbé
lui-même.
Par
ailleurs
un
aspect
de
la
responsabilité
de
l’abbé
est
de
protéger
la
communauté
contre
les
initiatives
affectant
la
vie
de
toute
la
communauté
que
pourrait
prendre
tel
ou
tel
frère
suivant
sa
volonté
propre. Dans n’importe quelle communauté tout
ceci
se
vit
dans
l’harmonie
et
la
sérénité
dans
la
mesure
où
tous
renoncent
à
suivre
ou
imposer
leur
volonté
propre
pour
se
mettre
tous
ensemble
à
la
recherche
quotidienne
de
la
volonté
de
Dieu. Armand VEILLEUX
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