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25 octobre
2009 –
Nous sommes le temple de Dieu Nous avons fêté hier
la
fête
de
la
Dédicace
de
notre
église.
Dans
un
contexte
monastique,
la
fête
de
la
Dédicace
d’une
église
est
celle
de
la
communauté
qui
célèbre
dans
cette
église. Comme vous le savez, c’est l’idée fondamentale
qui
circule
dans
les
sermons
de
saint
Bernard
pour
la
Dédicace.
Au
cours
des
derniers
mois
j’ai
été
rendu
encore
plus
sensible
à
cela
en
participant
à
la
consécration
de
deux
églises
monastiques,
celle
Kibungo,
au
Rwanda,
l’été
dernier,
et
plus
récemment
celle
de
Koningsoord
(autrefois
Berkel).
Je
voudrais
donc
continuer
à
réfléchir
sur
ce
thème
ce
matin. Dès le début du premier
sermon
pour
la
Dédicace,
Bernard
dit
à
ses
frères :
« Cette
fête
est
vôtre,
tout
à
fait
vôtre.
Vous
êtes
consacrés
à
Dieu
qui
vous
a
choisis
et
vous
a
fait
siens...
Lorsque
l’évêque
a
consacré
cette
maison,
il
l’a
fait
à
cause
de
nous :
non
seulement
ceux
qui
étaient
alors
présents,
mais
tous
ceux
qui
serviront
le
Seigneur
en
ce
lieu
durant
les
siècles
à
venir »
Dans le cinquième sermon,
après
une
longue
introduction
sur
la
maison
de
Dieu,
il
pose
cette
question :
« Quelle
est
la
maison
de
Dieu ?
Quel
est
son
temple ?
Quelle
est
sa
cité ?
Quelle
est
son
épouse ? Et il répond : « Je le dis avec crainte
et
respect :
c’est
nous.
Oui,
nous
sommes
tout
cela
dans
le
cœur
de
Dieu. Nous le sommes par grâce et non à cause de nos
mérites. »
(V,
8). Il pourrait être intéressant
de
mettre
cet
enseignement
de
Bernard
en
relation
avec
ce
que
saint
Benoît
dit
de
l’oratoire
du
monastère,
dans
le
chapitre
52
de
la
Règle. Tout d’abord il ne faut pas se laisser tromper par le mot « oratoire »
qui,
dans
le
langage
moderne,
signifie
plutôt
un
lieu
plus
petit
et
plus
privé
qu’une
véritable
église,
comme,
par
exemple,
la
petite
chapelle
d’une
communauté
religieuse
ou
celle
d’un
château. Chez Benoît, le mot a encore son sens premier
et
étymologique.
C’est
tout
simplement
le
lieu
où
l’on
prie.
On sait à quel point
le
"lieu"
a
de
l'importance
pour
Benoît. Le moine vit dans une communauté et cette communauté
est
enracinée
dans
un
lieu
concret.
Le
nouveau
venu,
à
chaque
étape
de
sa
formation
promet
sa
stabilité
dans
ce
lieu.
Et,
à
l'intérieur
du
monastère,
il
y
a
des
lieux
prévus
pour
les
diverses
activités
de
la
journée
monastique
:
des
lieux
pour
travailler,
pour
étudier,
pour
manger,
et
aussi
un
lieu
où
la
communauté
se
réunit
pour
prier
en
commun. Il serait erroné de
penser
que,
pour
Benoît,
l'oratoire
est
le
seul
lieu
de
prière
du
moine. L'ensemble de la Règle montre bien que, pour
Benoît
comme
pour
toute
la
grande
tradition
monastique
–
antérieure
et
postérieure
à
lui
–
l'obligation
fondamentale
du
moine
en
ce
qui
concerne
la
prière,
est
celle
de
la
prière
continuelle.
De
plus,
au
chapitre
19
de
sa
Règle,
consacré
à
la
façon
de
psalmodier,
il
avait
affirmé
que
"Nous
avons
la
certitude
que
Dieu
est
partout
présent."
Benoît
connaissait
aussi,
évidemment,
la
parole
de
Jésus:
«Quand
tu
veux
prier,
entre
dans
ta
cellule,
ferme
la
porte,
et
prie
ton
Père
dans
le
secret". La solitude du cœur et de la cellule doit être
le
lieu
privilégié
de
la
prière
personnelle
du
moine. Selon saint Grégoire le Grand (Dialogues 2,35)
Benoît
avait
coutume
de
prier
dans
sa
cellule,
en
regardant
le
ciel
par
la
fenêtre,
avant
que
les
moines
ne
se
lèvent
pour
les
Vigiles. Pour Benoît, l'oratoire est essentiellement
le
lieu
de
la
prière
commune.
Ce
qui
fait
que
dès
qu'on
y
entre
on
est
psychologiquement
dans
l'attente
de
la
communauté.
Par
ailleurs
Benoît
prévoit
que
tel
ou
tel
frère
puisse
vouloir
désirer
demeurer
à
l'oratoire
pour
y
poursuivre
là
sa
prière
personnelle. Benoît lui demande de prier alors en silence,
dans
le
secret
de
son
cœur,
dans
les
larmes
de
componction
et
avec
l'intensité
du
désir
de
son
cœur
(intentione
cordis), et non pas à haute voix, de façon à ne pas déranger
un
autre
frère
qui
voudrait
faire
la
même
chose. Revenons à saint Bernard.
Faisant
allusion
à
David
qui
voulait
construire
un
temple
à
Dieu,
Bernard
dit
que
Dieu
nous
a
donné
une
maison
magnifique,
qui
est
notre
corps,
pour
lequel
il
a
créé
un
univers
admirable.
Nous
devons
donc
nous
soucier
nous
aussi
de
construire
une
maison
à
Dieu. « Ne te semble-t-il
pas
indigne,
dit
Bernard,
ne
de
pas
te
préoccuper
de
construire
un
temple
à
Dieu,
alors
qu’il
t’a
fait
cette
demeure ? »
Alors,
demande
Bernard
à
ses
auditeurs :
« Quels
sont
nos
plans ?
En
quel
lieu
construirons-nous
cette
demeure ?
Qui
en
sera
l’architecte ? »
Il
répète
que
le
temple
matériel,
dont
on
célèbre
la
dédicace,
a
été
fait
pour
nous,
afin
que
nous
y
vivions
et
non
pour
le
Très
Haut,
car
celui-ci
n’habite
pas
des
temples
faits
de
mains
d’homme.
Et
comment
élever
un
Temple
à
celui
qui
peut
dire
en
toute
vérité
« Je
remplis
le
ciel
et
la
terre ».
Je
serais
dans
le
trouble
et
l’angoisse,
dit
Bernard,
si
je
ne
l’avais
entendu
dire
lui-même :
« Mon
Père
et
moi
viendrons
et
nous
ferons
chez
lui
notre
demeure ».
Si Dieu remplit le ciel et la terre,
seule
son
image
peut
le
contenir.
Or,
notre
âme
peut
le
contenir
–
elle
est
capax Dei -- puisqu’elle a été créée à son image.
Nous
retrouvons
ici
le
thème
très
important
de
l’image
de
Dieu
qui
domine
toute
la
christologie
et
l’anthropologie
et
donc
aussi
la
spiritualité
des
Pères
latins
aussi
bien
que
des
Pères
grecs.
Selon
cette
doctrine,
nous
avons
été
créés
à
l’image
de
Dieu
et
à
sa
ressemblance. En tant que créatures privilégiées, nous étions
destinés
à
participer
à
la
vie
divine.
Ces
dispositions
ont
été
contrecarrées
par
le
péché. Mais quels que soient nos péchés, l’image de
Dieu
demeure
en
nous,
même
si
elle
a
été
recouverte
de
poussière
ou
de
boue.
Notre
âme
demeure
capax Dei, capable de le contenir dans la contemplation
et
la
communion.
Tout
cela,
évidemment,
parce
que
le
propre
Fils
de
Dieu,
qui
était
in forma Dei, n’a pas hésité à renoncer
à
son
privilège.
Il
est
descendu
(Phil.
2,6-7),
il
s’est
fait
l’un
de
nous.
Il
a
accepté
de
perdre
sa
forma, sa beauté. Il a été défiguré au point ne pas être reconnu
(Is.
53,2).
Il
est
s’est
anéanti,
se
faisant
obéissant
jusqu’à
la
mort
et
la
mort
de
la
croix. C’est pourquoi, etc. Ainsi nous a été montré et tracé le chemin
du
retour
à
l’image.
Déformés
par
le
péchés,
devons
être
ré-formés,
transformés
à
l’image
du
Christ
ressuscité.
Vous reconnaîtrez facilement
là
l’intuition
fondamentale
de
notre
document
sur
la
formation
(notre
Ratio) :
toute
la
formation
monastique
consiste
à
être
configurés
(re-configurés)
à
l’image
du
Christ.
Et
cela
ne
se
fait
pas
dans
quelques
années
de
« formation
initiale ».
C’est
le
travail
de
toute
une
vie,
jamais
achevé
avant
le
passage
sur
l’autre
Rive. Armand Veilleux
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