Chapitre pour le 30 août 2009

 

Accueillir humblement la parole de Dieu semée en nous

 

À partir de ce 22ème dimanche du Temps Ordinaire (année B), la deuxième lecture de la Messe est tirée de la Lettre de Jacques. Je ne m’attarderai pas ce matin à étudier toutes les questions soulevées par les exégètes et les historiens autour de cette écrit du Nouveau Testament et de la personne de Jacques. Le Nouveau Testament nous parle de deux, et probablement de trois Jacques distincts. L’auteur de cette Lettre n’est clairement pas Jacques, fils d’Alphée et l’un des Douze. Il n’est pas sûr non plus qu’il fut le « Jacques, frère du Seigneur », qui fut dès le début à la tête de l’Église de Jérusalem.  De toute façon, cette Lettre fait partie du Canon des Écritures, même si elle prit beaucoup plus de temps que tous les autres écrits du NT à se faire reconnaître comme faisant partie de ce canon. (Seulement vers la fin du 4ème siècle en Occident).

La lecture de ce matin est un choix de versets du 1er chapitre, centré sur la Parole de Dieu. Le texte central est sans doute le verset 18 : « Il (le Père céleste) a voulu nous donner la vie par sa parole de vérité, pour faire de nous les premiers appelés de toutes ses créatures ».

La première chose affirmée est que la Parole de Dieu est un don que nous avons reçu – ou que nous recevons sans cesse.  Dans les versets précédents l’auteur disait que « les dons les meilleurs, les présents merveilleux, viennent d'en haut, ils descendent tous d'auprès du Père de toutes les lumières ». Sa Parole est le meilleur de ces dons.  Cette Parole est évidemment son propre Fils fait homme, mais c’est aussi toute la Bonne Nouvelle qui nous a été transmise par son Fils, qui est « Parole de Vérité ». Par Lui, il nous « a donné la vie », dit Jacques.  Rappelons-nous les paroles de Jésus lui-même qui dit qu’Il est venu pour que nous ayons la vie, et que nous l’ayons en plénitude. De plus, Jacques nous présente ce don de la vie comme une volonté du Père : « il a voulu nous donner la vie », donc comme un acte gratuit d’amour. Et cette décision, cette volonté est un appel. « ... pour faire de nous les premiers appelés de toutes ses créatures ». Nous reconnaissons ici facilement des réminiscences de la théologie paulinienne sur la prédestination.  Tout, dans la vie spirituelle, commence par un appel.  Dieu est toujours le premier qui appelle, et nous ne pouvons que répondre.

Jacques dit aussi, au début du texte, que le Père qui nous a donné sa Parole est « le père de toutes les lumières » -- antérieur et supérieur à toutes les formes créées et passagères de lumière ou de clarté.

Jacques nous décrit ensuite quelle doit être notre attitude à l’égard de la Parole qui nous est donnée. La première chose est évidemment qu’il faut l’accueillir. « Accueillez donc humblement la parole de Dieu semée en vous; elle est capable de vous sauver ». Le mot « accueillir » est beaucoup plus fort et beau que simplement « recevoir ». Il s’agit de l’acceptation d’un don. Il s’agit d’un mouvement plein de respect et d’affection vers celui qui nous offre un don. De plus, cette Parole ne nous est pas apportée de l’extérieur.  Elle est semée en nous. Il s’agit de la présence du Père et du Fils qui viennent habiter en celui qui écoute la Parole de Jésus (cf. Jean 15). Cette présence, n’est pas une simple « voix » intérieure.  Elle est beaucoup plus.  Elle est une semence – une semence de vie, qui peut donc nous sauver, puisque le salut consiste dans la communication de la vie divine.

Jacques dit donc que, dans un premier temps il faut accueillir la Parole.  Et il ajoute tout de suite que, dans un deuxième temps, il faut « la mettre en application » : « Mettez la Parole en application, ne vous contentez pas de l'écouter; ce serait vous faire illusion ». Nous pourrions passer notre vie à lire et à méditer l’Écriture Sainte, à faire notre lectio divina, comme on aime dire de nos jours.  Tout cela, dit Jacques, est illusion, si nous ne mettons pas en pratique ce que nous lisons, ou la Parole prononcée en nos coeurs. Cette mise en pratique n’est pas une sorte d’expérience mystique.  Il s’agit de quelque chose de concret.

Jacques est très pratique.  Il donne tout de suite un exemple concret de ce en quoi consiste la mise en pratique de la Parole semée en nos coeurs : « Devant Dieu notre Père, la manière pure et irréprochable de pratiquer la religion, c'est de venir en aide aux orphelins et aux veuves dans leur malheur, et de se garder propre au milieu du monde ».

Ce n’est là qu’un exemple concret, mais le message est clair : La Parole reçue est un geste d’amour de Dieu, un message d’amour.  Notre réponse ne peut être qu’une réponse d’amour ; mais cet amour de Dieu est illusion s’il ne s’incarne pas dans l’amour du prochain.

Je crains que tous les livres et tous les nombreux – sans doute trop nombreux – articles sur la lectio divina oublient cet enseignement pratique.  Notre lecture de la Parole de Dieu ne doit pas être un exercice destiné à nous réchauffer le coeur, mais une attitude dans laquelle nous nous laissons interpeller à vivre dans nos relations fraternelles le message de l’Évangile.

 

Armand VEILLEUX

 

 


 

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