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18 janvier
2008
Chapitre
à
la
Communauté
de
Scourmont Le silence dans la liturgie monastique J’ai été amené récemment à écrire un
bref
article
sur
la
place
du
silence
dans
la
liturgie
monastique,
pour
une
revue
liturgique
à
laquelle
j’avais
collaboré
il
y
a
de
nombreuses
années.
Il
y
aura
un
numéro
complet
de
cette
revue
sur
le
silence
dans
la
liturgie,
et
on
m’a
demandé
de
transmettre
l’expérience
monastique
en
ce
domaine.
Je
voudrais
donc
vous
partager
ce
matin
seulement
quelques
points
touchés
dans
cet
article. De nos jours beaucoup de liturgistes
et
de
pasteurs
insistent
sur
l’importance
de
moments
de
silence
au
cours
des
célébrations
liturgiques.
Ils
trouvent
d’abord
que
cela
donne
aux
célébrations
une
certaine
dimension
contemplative.
Ils
trouvent
que
c’est
aussi
important
de
donner
aux
participants
dont
la
plupart
n’ont
qu’une
célébration
liturgique
par
semaine
(la
messe
dominicale),
ou
encore
moins
souvent,
des
plages
de
silence
durant
lesquelles
ils
peuvent
assimiler
ce
qu’ils
ont
entendu
dans
les
lectures
ou
dans
l’homélie
et
aussi
avoir
de
bons
moments
de
prière
personnelle. Or, la situation dans nos communautés
monastiques
est
très
différente.
De
fait,
au
moment
de
la
réforme
liturgique
postconciliaire,
certaines
communautés
ont
essayé
d’introduire
dans
la
célébration
des
moments
assez
longs
de
silence,
par
exemple
après
les
lectures
et
même
après
chaque
psaume.
Or,
dans
la
pratique,
cela
n’a
jamais
très
bien
fonctionné,
et
en
tout
cas
cela
n’a
pas
duré.
Et
je
ne
crois
pas
que
ce
soit
parce
que
les
Offices
étaient
plus
longs. Je crois qu’on sentait spontanément que cela
modifiait
la
nature
de
l’Office
monastique.
Je
dois
m’expliquer !
Au coeur de la vie du moine se trouve
non
pas
le
silence
mais
la
Parole.
Il
essaye
de
faire
de
toute
sa
vie
une
prière
continuelle,
s’efforçant
de
mettre
en
pratique
l’unique
précepte
évangélique
sur
la
prière,
qui
est
celui
de
prier
sans
cesse.
Or
cette
prière
continuelle,
qui
doit
se
poursuivre
tout
au
long
des
occupations
de
la
journée,
ne
consiste
pas
à
réciter
des
prières
ni
à
penser
constamment
à
Dieu,
mais
bien
à
rester
dans
une
communion
aussi
constante
que
possible
avec
la
Parole
prononcée
en
son
coeur
par
l’Esprit
Saint :
Abba. C’est en se laissant absorber dans le silence
où
naît
la
Parole
du
Père,
qu’il
est
engendré
à
son
propre
être
de
fils. Pour que cette prière se réalise, ou
plutôt
pour
qu’elle
soit
donnée
et
reçue
–
car
elle
est
toujours
un
don
gratuit
--
un
certain
nombre
de
conditions
sont
nécessaires.
La
première
est
celle
d’un
effort
constant
de
purification
du
coeur.
Il
y
a
aussi
certaines
conditions
extérieures
qui
la
rendent
possible.
Le
mode
de
vie
monastique
comporte
un
certain
nombre
de
pratiques
destinées
à
la
favoriser,
entre
autre
la
solitude
et
la
pratique
du
silence. Les moines s’efforcent donc de maintenir dans
leur
monastère
--
avec
un
succès
qui
varie
selon
les
lieux
et
les
temps,
et
qui
n’est
jamais
total
–
une
atmosphère
de
silence.
Un moyen essentiel utilisé par les
moines
pour
rejoindre
la
Parole
au
coeur
du
Silence
de
Dieu
est
un
contact
aussi
fréquent
que
possible
avec
les
écrits
de
l’Ancien
et
du
Nouveau
Testament
qui
nous
transmettent
cette
Parole
telle
qu’elle
a
été
reçue,
vécue
et
retransmise
par
une
longue
tradition
de
témoins.
Le
moine
ne
lit
pas
l’Écriture
pour
y
trouver
un
enseignement
moral,
théologique
ou
même
spirituel,
mais
avant
tout
pour
entrer
en
contact
avec
la
Parole
par
l’intermédiaire
de
l’expérience
de
témoins
privilégiés
afin
d’en
faire
lui-même
son
expérience. Plusieurs fois par jour le moine se
retrouve
à
l’église
avec
ses
frères
pour
célébrer
avec
eux
l’Office
Divin
et
l’Eucharistie.
Ont
peut
dire
que
ces
moments
rompent
le
silence,
en
quelque
sorte.
Ce
sont
des
moments
où
ils
disent
et
chantent
ensemble
le
contenu
de
leur
silence,
où
ils
écoutent
ensemble
la
Parole
que
tout
au
long
du
jour
ils
s’efforcent
d’écouter
au
fond
de
leur
coeur. Ils rompent le silence extérieur pour communier
dans
leur
effort
de
pénétrer
dans
le
Silence
de
Dieu. Cette prière commune est conçue comme une célébration. Saint Benoît, le père des
moines
d’Occident,
donne
à
cette
prière
commune
le
nom
d’Opus Dei. L’Office monastique
est
donc
conçu
comme
un
travail,
une
activité
commune,
et
non
pas
comme
un
environnement
destiné
à
favoriser
ou
à
nourrir
une
méditation
personnelle
des
textes
chantés
ou
écoutés. Le silence est important dans une célébration
monastique,
mais
c’est
tout
d’abord
le
Silence
dans
lequel
se
déroule
la
célébration
et
le
Silence
dans
lequel
il
fait
entrer,
et
non
pas
un
ensemble
de
plages
de
silence
introduites
plus
ou
moins
artificiellement
tout
au
long
de
la
célébration. La célébration devra se dérouler avec
une
grande
sérénité,
parfois
très
joyeuse
comme
à
certaines
grandes
fêtes,
parfois
plus
réservée
ou
même
douloureuse
en
certaines
circonstances. L’important est que la communauté se retrouve
toujours
soudée
dans
cette
célébration
qui
doit
avoir
son
propre
rythme
et
sa
propre
vie.
Cette
célébration
ne
consiste
pas
en
une
série
de
textes
ou
de
chants
destinés
à
nourrir
une
prière
individuelle.
Il
s’agit
au
contraire
de
l’expression
collective
de
la
prière
que
tous
s’efforcent,
chacun
pour
sa
part,
de
vivre
tout
long
de
la
journée.
L’Office Divin devra avoir une vie,
être
animé
par
un
souffle
et
donc
suivre
un
certain
rythme. Ce rythme impliquera des moments de pause entre
les
lectures
et
les
chants.
Ces
moments,
on
hésite
à
les
appeler
« silences »,
car
au
donne
alors
au
mot
silence
un
sens
tout
autre
que
celui
du
Silence
dans
lequel
se
déroule
toute
la
célébration. Il ne faudrait pas non plus voir en cela une
alternance
entre
la
prière
commune
et
la
prière
personnelle. Il s’agit d’un bout à l’autre, y compris dans
les
moments
dits
de
silence,
d’une
prière
commune,
d’une
activité
collective
de
prière,
d’un
opus
communautaire. Le moine a avec le silence, tout au
long
de
sa
vie
quotidienne,
une
relation
assez
différente
de
celle
qu’ont
la
majorité
des
chrétiens
dans
leurs
vocations
respectives. Il est donc normal que sa relation au silence
dans
la
liturgie,
aussi
bien
dans
l’Eucharistie
que
dans
l’Office
Divin,
soit
assez
différente
de
celle
de
ses
soeurs
et
frères
ayant
une
vocation
différente.
Armand
Veilleux
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