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Chapitre du 26 octobre Première lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens
(1Th
1,
5-10) En effet,
notre
annonce
de
l'Évangile
chez
vous
n'a
pas
été
simple
parole,
mais
puissance,
action
de
l'Esprit
Saint,
certitude
absolue
:
vous
savez
comment
nous
nous
sommes
comportés
chez
vous
pour
votre
bien.
Et
vous,
vous
avez
commencé
à
nous
imiter,
nous
et
le
Seigneur,
en
accueillant
la
Parole
au
milieu
de
bien
des
épreuves
avec
la
joie
de
l'Esprit
Saint. Cette lecture (deuxième
lecture
de
la
Messe
d'aujourd'hui),
qui
continue
celle
de
dimanche
dernier,
forme
avec
celle-ci
l’introduction
à
cette
belle
Lettre
de
Paul
aux
Thessaloniciens.
Je
voudrais
en
retenir,
pour
notre
réflexion
de
ce
matin,
le
thème
de
la
Parole,
qui
est
tout
à
fait
d’actualité
en
ce
moment
où
se
conclut
à
Rome
le
Synode
sur
la
Parole
de
Dieu. Monsieur Dominique Ponneau, qui nous commentait ces jours-ci de grands chefs-d’œuvre
de
la
peinture,
nous
rappelait
–
à
juste
titre
–
que
le
Christianisme
n’est
pas
une
religion
du
Livre,
mais
bien
une
religion
de
la
Parole.
Et
la
distinction
est
de
taille.
Tous
les
fondamentalismes
consistent
à
croire
que
toute
la
vérité
se
trouve
réunie
dans
un
livre
qu’il
suffit
d’apprendre
par
coeur
et
qui
nous
apporterait
la
réponse
immédiate
à
tout,
sans
même
avoir
besoin
d’interprétation. Le Livre – la Bible –
est
important
pour
nous
parce
qu’il
nous
transmet
la
Parole. Ce livre nous transmet la Parole en mots humains,
sous
la
plume
de
plusieurs
auteurs
ayant
chacun
sa
préoccupation
et
sa
propre
compréhension.
La
source
de
notre
vie
n’est
pas
le
livre
comme
tel,
le
texte
écrit,
mais
la
Parole.
Au commencement était
le
Verbe
–
la
Parole
–
et
la
Parole
était
en
Dieu
et
la
Parole
était
Dieu. Cette Parole s’est faite chair. Elle s’est incarnée. Jésus nous a révélé la Parole, le Verbe, non
seulement
à
travers
les
quelques
paroles
que
les
Évangélistes
nous
ont
rapportées,
mais
à
travers
sa
vie,
à
travers
ce
qu’il
a
vécu.
C’est
là
le
sens
profond
de
l’Incarnation.
La
transmission
de
la
Parole
de
Dieu
se
fait
à
travers
la
vie :
elle
est
toujours
une
parole
incarnée,
assimilée
dans
l’existence
et
retransmise
à
travers
le
partage
de
l’expérience.
Si
nous
avons
reçu
la
foi,
c’est
que
ce
dynamisme
lancée
par
l’Incarnation
du
Verbe
en
Jésus,
est
parvenu
jusqu’à
nous
à
travers
une
suite
ininterrompue
de
témoins. Il suffit de comparer
les
Évangiles
pour
voir
que
les
Évangélistes
n’ont
pas
voulu
et
non
pas
essayé
de
nous
donner
une
description
historique
de
Jésus
et
de
son
enseignement.
(Il
suffit
de
voir
comment
ils
nous
rapportent
les
mêmes
faits
ou
les
mêmes
paroles
de
façons
souvent
fort
diverses).
Ils
ont
mis
par
écrit
leur
expérience
–
ce
qu’ils
ont
vécu
avec
Jésus. Tout comme Jésus avait partagé avec eux son
expérience
de
sa
vie
intime
avec
le
Père
et
l’Esprit
et
les
avait
aidés,
en
particulier
à
travers
des
paraboles,
à
comprendre
qui
était
son
Père.
Leur
témoignage,
parce
qu’il
est
celui
de
ceux
qui
ont
vécu
avec
Jésus
est
un
témoignage
« fondateur »
pour
toutes
les
générations
suivantes. Mais l’Évangélisation dans son sens le plus
profond,
tout
au
long
des
générations
suivantes,
ne
consiste
pas
simplement
à
transmettre
un
écrit
–
ou
des
écrits
–
ou
le
contenu
verbal
de
ces
écrits.
L’Évangélisation
consiste,
pour
chaque
génération
–
pour
chaque
chrétien
ou
chrétienne
–
à
se
laisser
pénétrer
par
la
Parole,
à
la
vivre
et
à
la
transmettre
à
d’autres
à
travers
cette
vie. Ce qui, selon les vocations d’un chacun, pourra
comprendre
ou
non,
une
« prédication »
verbale. C’est là, me semble-t-il,
exactement
la
vision
de
l’évangélisation
que
Paul
exprime
dans
ce
qu’il
écrit
aux
Thessaloniciens.
Il
les
félicite
d’abord
d’avoir
accueilli
la
Parole,
au
milieu
de
bien
des
épreuves. Ainsi, leur dit-il, il l’ont
imité
et
ils
ont
imité
le
Seigneur. Dans le langage du Nouveau Testament « imiter »
ne
veux
pas
dire
regarder
ce
que
fait
quelqu’un
et
essayer
de
le
copier.
L’imitation
du
Christ
consiste
à
souffrir
avec
lui
par
fidélité
à
son
message. Aucun des Thessaloniciens
n’était
allé
prêcher
en
Grèce
et
en
Macédoine,
et
pourtant
Paul
leur
dit
qu’à
partir
de
chez
eux
la
parole
du
Seigneur
a
retenti
et
s’est
répandue
à
travers
toute
la
Grèce
et
toute
la
Macédoine,
si
bien
que
lui,
le
grand
prédicateur,
n’a
plus
rien
à
dire.
Ils
l’ont
fait
essentiellement
à
travers
la
façon
qu’ils
ont
reçu
la
Parole
qu’ils
l’ont
transmise,
le
témoignage
de
leur
vie
étant
connu
de
tous. L’Écriture Sainte, omniprésente
dans
notre
prière
monastique,
et
qui
nourrit
notre
vie
à
travers
la
lecture
que
nous
en
faisons
sans
cesse
a
évidemment
une
importance
capitale
dans
notre
vie.
Mais
nous
ne
devons
pas
oublier
que
le
Verbe
de
Vie
dont
elles
témoigne
nous
est
parvenu
à
travers
l’expérience
vécue
de
milliers
de
générations
de
croyants
et
aussi
à
travers
l’expérience
vécue
de
tous
les
croyants
d’aujourd’hui ;
et
que
c’est
notre
devoir
de
maintenir
cette
chaîne
vivante
en
laissant
nos
vies
s’imprégner
de
la
Parole.
Ne
nous
laissons
pas
trop
influencer
par
une
« mode »
récente
qui
veut
transformer
ce
qui
a
toujours
été
dans
la
tradition
monastique
une
attitude
constante
d’écoute
en
une
méthode
ou
une
technique
à
laquelle
on
donne
le
nom
de
lectio
divina,
qu’on
pense
pouvoir
enseigner,
comme
on
enseigne
d’autres
techniques
de
prière. (Personnellement, je trouve plutôt ahurissant
qu’on
ait
demandé
à
un
des
Pères
synodaux
de
donner
au
Synode
sur
la
Parole
de
Dieu
une
« démonstration »
de
la
façon
de
faire
la
lectio
divina !). Il est merveilleux de
voir
comment
Dieu
a
voulu
se
transmettre
aux
hommes
et
aux
femmes
à
travers
des
hommes
et
des
femmes
ayant
chacun/chacune
leurs
limites,
parfois
grandes.
Dominique Ponneau nous a parlé ces derniers jours du grand peintre Caravaggio, qui n’était certes pas un enfant de choeur. Il a eu une
vie
extrêmement
agitée
et
même
dissolue
et
a
eu
presque
constamment
maille
à
partir
avec
la
justice.
Et
pourtant
il
a
su
transmettre
dans
ses
tableaux
une
humanité
exquise
et
une
compréhension
profonde
du
message
du
Verbe
incarné.
Et
c’est
sans
doute
une
signe
de
la
largeur
d’esprit
des
hommes
d’Église
de
l’époque
de
l’avoir
constamment
invité
à
créer
des
oeuvres
d’art
religieux
malgré
les
problèmes
de
sa
vie
privée. Si nous sommes d’authentiques
croyants
et
vivons
notre
foi,
la
Parole
de
Dieu
passe
á
travers
nous
et
se
transmet
à
nos
contemporains
et
aux
générations
futures,
que
nous
nous
en
sentions
dignes
ou
non.
C’est
le
Message
qui
compte
et
non
le
messager.
Armand VEILLEUX
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