Chapitre – 24 août 2008

 

 

Le mystère insondable de Dieu

 

 

Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains (Rm 11, 33-36)

11

33  Quelle profondeur dans la richesse, la sagesse et la science de Dieu ! Ses décisions sont insondables, ses chemins sont impénétrables !
34  Qui a connu la pensée du Seigneur ? Qui a été son conseiller ?
35  Qui lui a donné en premier, et mériterait de recevoir en retour ?
36  Car tout est de lui, et par lui, et pour lui. A lui la gloire pour l'éternité ! Amen.

 

 

            Depuis plusieurs dimanches nous lisons la Lettre de Paul aux Romains comme seconde lecture à l’Eucharistie.  Comme on l’a déjà vu, cette lettre se compose de deux grandes parties : une première section théorique ou théologique qui présente l’Évangile comme puissance de salut pour les Juifs et les Gentils et une seconde partie contenant des directives ou recommandations pratiques à l’intention des croyants.  Les quatre brefs versets que nous avons ce matin comme deuxième lecture constituent la conclusion de toute la première partie.

 

            Durant plusieurs dimanches nous avons lu le beau chapitre 8 décrivant la tension entre la chair et l’esprit et l’action de l’Esprit de Dieu en nous, faisant de nous des enfants de Dieu, et nous permettant de faire nôtre son gémissement qui est aussi celui de toute la création, attendant notre pleine réalisation comme enfants de Dieu.

 

            Puis, depuis quelques dimanches, nous avons le chapitre 9, dans lequel Paul s’efforce, dans une pensée souvent difficile à suivre,  de montrer que le salut est offert à tous et s’obtient par la foi, tout en continuant d’affirmer les privilèges d’Israël. Sans éviter quelques contradictions, au moins dans les expressions, il affirme que l’Israël selon la chair existe toujours et qu’il sera finalement sauvé, puis il affirme par ailleurs que le véritable Israël est désormais constitué de tous les croyants quelle que soit leur origine.

 

            Puis il y a cette belle conclusion que nous avons ce matin, où Paul, quoique assez librement, à la fois Isaïe et le Livre de Job.

 

            Il y a d’abord une exclamation sur la profondeur, la richesse, le caractère insondable et impénétrable des desseins de Dieu. Tout ce que nous pouvons dire de Dieu, y compris ce qu’en disent les théologiens et les formules dogmatiques aussi bien que le témoignage des plus grands mystiques ne sont que des approximations dans notre langage humain d’une réalité qui dépasse infiniment ce langage.  L’affirmation implicite dans cette exclamation de Paul, si elle était prise au sérieux, ferait disparaître toutes les formes d’intransigeance, de fondamentalisme, de peur et de chasse aux sorcières.  Il y a un nombre infini de formes d’expression par lesquelles on peut essayer d’exprimer dans notre langage humain l’un ou l’autre aspect de ce mystère insondable.  Par rapport à cette profondeur insondable du mystère de Dieu, la distance entre la formule dogmatique la plus solennelle et l’effort d’un théologien de quelque siècle que ce soit de dire le même mystère dans d’autres mots, il n’y a jamais tellement de distance.  Le véritable danger est de penser qu’il est possible d’enfermer le mystère dans des formules et de considérer comme hérétique quiconque essaye d’exprimer sa foi dans des formules différentes.

 

            Après cela Paul pose quelques questions rhétoriques qui rappellent celles de Job, à la fin de son Livre : Qui peut prétendre connaître la pensée de Dieu ? Qui peut prétendre être son conseiller ?  Tant que nous ne serons pas face à face, nous n’avons qu’une faible perception du Mystère de Dieu.

 

            Finalement Paul résume tout dans deux petites exclamations :

 

D’abord :  « tout est de lui, et par lui, et pour lui » -- une expression qui, sous une forme un peu différente, sert de conclusion à la prière eucharistique de chaque jour. C’est l’affirmation que Dieu est à l’origine de tout.  Il est l’origine de tout ce qui existe.  De quelle façon ? – cela a finalement peu d’importance.  Les grandes querelles académiques sur l’évolutionnisme et le créationnisme, sont en fin de compte tout à fait futiles et assez ridicules.  Nous sommes sortis des mains de Dieu, nous sommes le fruit de son amour.  C’est la seule chose qui compte.  Comment est apparu la vie humaine ? comme fruit de quel processus ? – C’est tout à fait secondaire. Ce qui est plus important c’est que nous venons de Lui, nous existons par Lui, et nous sommes destinés à retourner à Lui.  Là aussi, le « comment ? » est une question d’une importance assez relative. Ce que sera la vie éternelle, nous ne saurions l’imaginer, même si nous ne pouvons en parler qu’en image.  Jésus lui-même, puisqu’il s’est incarné et nous a parlé dans un langage humain, ne nous en parle qu’en images, qui ne sont précisément que des images. 

 

            Face à la réalité, qui dépasse infiniment toutes ces images, on ne peut que faire nôtre l’exclamation par laquelle Paul conclut ce chapitre et toute la première moitié de sa Lettre : « A lui la gloire pour l'éternité ! Amen. ».  

 

            Il ne suffit pas cependant d’exprimer notre admiration par de tels cris de louange, il nous faut vivre conformément à cette perception que nous avons de la grandeur de Dieu et de ses desseins.  C’est ce que nous entendrons dans la seconde lecture des prochains dimanches, qui sera tirée des chapitres qui constituent la seconde partie de cette Lettre aux Romains.

 

            (Mais je ne pourrai vous commenter ces lectures des prochains dimanches, car je serai au Chapitre Général, qui durera plus de trois semaines).

 

 

Armand VEILLEUX

 

 

 


 

www.scourmont.be