20 juillet 2008
Chapitre à la Communauté de Scourmont

 

La prière de l'Esprit de Dieu en nous

 

Nous poursuivons - dans la deuxième lecture de la Messe -- notre lecture de ce beau et riche chapitre 8 de la Lettre de Paul aux Romains. La lecture de dimanche dernier nous parlait de la création tout entière gémissant dans les douleurs de l'enfantement, dans l'attente de la pleine révélation des enfants de Dieu. La lecture d'aujourd'hui parle de la prière de l'Esprit en nous.

Cependant, entre la lecture de dimanche dernier et celle d'aujourd'hui, il y a quelques versets qui ne sont pas sans importance. Ce sont les versets 24 et 25 qui disent que nous avons été sauvés mais " en espérance ". Or, ajoute Paul : " voir ce qu'on espère n'est plus espérer : ce que l'on voit, comment l'espérer encore ? Mais espérer ce que nous ne voyons pas, c'est l'attendre avec espérance ".

Vient ensuite le bref texte que nous avons aujourd'hui : " L'Esprit Saint vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut. L'Esprit lui-même intervient pour nous par des gémissements inexprimables. " En réalité, dans la lettre de Paul, cette phrase commence par : " De même, l'Esprit Saint..." À quoi réfère ce " de même " ? On trouve la réponse dans la suite du texte, où l'on voit que l'Esprit gémit, comme tout le cosmos, et comme nous-mêmes (8, 2.23), quand il intercède pour nous. Ce faisant, il " vient en aide à notre faiblesse " car, dit Paul, " nous ne savons pas quoi demander dans la prière comme in convient ". Il y a donc deux choses que nous ne savons pas : a) nous ne savons pas quoi demander ; et b) nous ne savons pas le faire comme il convient. C'est en cela que correspond notre faiblesse. Et c'est pourquoi l'Esprit vient en aide à notre faiblesse. Nous ne connaissons pas la volonté divine et de nous-mêmes nous pouvons désirer beaucoup de choses qui ne seraient pas conformes à cette volonté. Or, c'est à cette faiblesse que vient en aide l'Esprit Saint qui prie en faveur des croyants et demande en nous et pour nous de que, dans notre " faiblesse ", nous ne savons pas demander.

L'Esprit Saint prit en nous par des gémissements. Le lectionnaire liturgique traduit par " cris " ; mais " gémissements " est plus exact. Le substantif employé ici correspond au verbe employé plus haut pour parler du gémissement de toute la création attendant la pleine révélation des enfants de Dieu, et du gémissement des croyants eux-mêmes dans leur tension vers la fin de leur situation présente et douloureuse. Selon les traductions, ces gémissements sont " ineffables ", c'est-à-dire qu'ils ne peuvent pas être exprimés, oui ils sont " sans paroles ", ce qui est probablement une meilleure traduction. (Comme ce mot ne se trouve nulle part ailleurs dans le NT, ils est impossible de faire des comparaisons.) Si la prière de l'Esprit Saint est sans paroles, c'est qu'elle n'en a pas besoin. Elle est communion des volontés.

Ce texte m'a toujours semblé la plus belle description de la prière que nous ayons dans le Nouveau Testament. Il n'y a en réalité qu'une seule prière dans la Nouvelle Économie du Salut ; c'est cette prière de l'Esprit de Dieu. Tout le reste de ce que nous appelons prière, que ce soit la récitation de formule, que ce soit le silence, que ce soit notre propre parole spontanée adressée à Dieu, que ce soit une danse ou d'autres gestes - tout cela n'est qu'un ensemble de moyens qui nous sont donnés ou que nous développons pour entrer en contact avec cette prière de l'Esprit en nous et la faire nôtre. Ce faisant nous entrons en communion non seulement avec l'Esprit de Dieu en nous, mais avec tous nos frères et nos soeurs qui portent la même prière en mal d'enfantement et aussi en communion avec toute la création, tout le cosmos qui porte le même souffle de Dieu puisqu'il en tire son existence même.

Armand VEILLEUX


 

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