14 décembre
2003 – Chapitre à la Communauté de Scourmont
Élection
abbatiale – confirmation (Cst. 39 suite)
Il nous reste à traiter
encore de quelques questions relatives à l’élection abbatiale – et cela est un
peu d’actualité, puisqu’il y aura quelques élections dans l’Ordre au cours des
prochaines semaines.
C. 39.5
Pour qu'il y ait élection, la majorité absolue des
voix est requise en ne comptant ni les bulletins nuls ni les abstentions. Si
cette majorité n'est pas obtenue aux premier et second scrutins, l'on procède à
de nouveaux scrutins jusqu'à ce qu'elle soit obtenue. Le président d'une
élection, avec le consentement du chapitre conventuel, a la faculté de limiter
le nombre des scrutins pour le bien de la communauté. Pour une postulation, les
deux tiers au moins des suffrages sont requis.
Il y a tout d’abord la
question de la majorité requise. Pour
une élection il faut la majorité absolue, c’est-à-dire plus de la moitiés des
voix (ce qui n’est pas nécessairement la moitié plus un, si le nombre des
électeurs est impair), sans compter ni les bulletins nuls ni les
abstentions. Évidemment la situation
idéale est que l’abbé soit choisi à l’unanimité ou en tout cas par une majorité
très forte, puisque cela manifeste un réel consensus. Mais il faut bien prendre conscience qu’une
élection est un geste collégial. C’est
la communauté qui élit et non pas un nombre d’individus ; de sorte que celui qui est élu avec tout
juste la majorité nécessaire est élu par la communauté au même titre que celui
qui est élu à l’unanimité. Il est
possible qu’il y ait dans une communauté deux ou trois personnes ayant tout ce
qu’il faut pour faire un bon abbé, et il est alors normal que les voix se
partagent entre eux. Il est normal qu’il
y ait, avant et durant l’élection, plusieurs « candidats ». L’important est qu’après l’élection il n’y
ait plus qu’un candidat, c’est-à-dire celui qui a été élu, peu importe la
majorité, grande ou faible, avec laquelle il a été élu, car il a été élu par la
communauté, même si je n’ai pas voté
pour lui. Je crois que si quelqu’un
n’est pas disposé à accepter comme abbé celui qui aura été choisi par la
communauté, il serait logique et honnête qu’il s’abstienne de participer à
l’élection.
Pour postuler quelqu’un
qui ne remplit pas toutes les conditions pour être élu (en général il s’agira
d’une question d’âge ou d’années de profession), il faudra les deux tiers des
voix. Une situation un peu difficile
peut être créée lors d’une élection si la majorité des voix va vers un moine
qui a besoin d’être postulé mais qui n’obtient pas les deux tiers – ce qui rend
difficile qu’un autre ait plus de la moitié...
Un point délicat dans
notre législation est la question du nombre de scrutin. Le droit universel prévoit que, dans les
élections en général,si les deux premiers scrutins ne donnent pas de résultat,
le vote se portera sur les deux candidats qui ont obtenu le plus grand nombre
de voix ou, s’ils sont plusieurs, sur les deux plus âgés ; et si, après le
troisième scrutin, les candidats restent à égalité, le plus âgé sera considéré
comme élu. Dans nos Constitutions nous
n’avons pas retenu ce principe. Nous ne
nous limitons pas à deux ou trois scrutins, mais nous poursuivons aussi
longtemps que quelqu’un n’a pas été élu, sans limiter le choix aux candidats
qui ont le plus de voix. Pour une
communauté où l’on vit constamment ensemble et où la dimension cénobitique est
très importante, il conviendrait assez peu que l’élection soit le résultat
d’une simple procédure. Il est important
qu’il y ait une vraie majorité des voix, non pas tellement pour que le candidat
sente qu’il a la confiance de la communauté, mais surtout pour permettre à la
communauté d’arriver graduellement, fût-ce au cours même d’une longue élection,
à une majorité.
Si cette majorité n’est
pas obtenue après plusieurs scrutins, le président peut arrêter l’élection,
mais seulement avec le consentement
du chapitre conventuel (car une fois l’élection commencée, c’est le collège des
électeurs qui est totalement maître de la procédure et non le président, qui
est extérieur au collège). En ce cas, on
nomme un supérieur ad nutum. Ce qui est une façon de laisser à la
communauté le temps d’arriver à un consensus.
Il ne convient pas alors de parler d’une « élection manquée ». Il s’agit plutôt d’une communauté qui, dans
une circonstance particulière, a besoin de plus de temps pour arriver à un
consensus.
Ce supérieur ad nutum ne peut pas être nommé pour une
période déterminée d’avance (un an ou trois ans), ce qui serait une
contradiction dans les termes (ad nutum
signifiant qu’il est supérieur jusqu’à ce qu’on lui fasse signe que son mandat
est terminé). La communauté ayant le droit d’élire son abbé, le Père Immédiat
a le devoir de faire une élection dès
qu’il devient clair que la communauté est prête ; et l’on ne peut prévoir
d’avance dans combien de temps elle sera prête.
Confirmation : Toute élection dans l’Église (à part celle du
Pape !) doit être confirmée par une autorité supérieure. Par cette confirmation l’autorité supérieure
ne porte pas un jugement sur le choix fait par la communauté, mais confirme la
validité de l’élection après s’être informée que celle-ci a été faite
conformément à toutes les règles établies et que l’élu n’a pas d’empêchement à
être élu. Dans notre Ordre, c’est l’Abbé
Général qui donne cette confirmation.
C’est après cette confirmation que l’élu peut être installé et assume
alors pleinement sa charge.
Dans le cas d’un abbé
ou d’une abbesse (mais pas dans celui d’un prieur ou d’une prieure titulaire),
viendra ensuite la bénédiction abbatiale.
Cette bénédiction n’ajoute absolument rien à l’autorité de l’élu. Il s’agit d’une célébration liturgique où
l’on implore la bénédiction du Seigneur sur le nouvel abbé. Une telle célébration est aussi importante
pour permettre à la communauté d’exprimer et de souder son consensus dans
l’acceptation de l’élu ; ce qui peut être important surtout s’il n’a pas
été facile d’arriver à un consensus au moment de l’élection. Cette bénédiction est aussi en général une
occasion d’exprimer le sens d’appartenance de la communauté à l’Ordre, par
l’invitation des abbés et abbesses des monastères voisins et d’exprimer ainsi la responsabilité
collégiale de tous les abbés et abbesses à l’égard de l‘ensemble de
l’Ordre. Ce sens d’appartenance à
l’Ordre a d’ailleurs en général été exprimé lors de l’élection elle-même par la
présence de deux ou trois « témoins » provenant en général d’autres
monastères de l’Ordre.