9 février 2003
Chapitre à la Communauté de
Scourmont
La vie cénobitique (Cst. 13
- suite)
La semaine dernière, nous avons étudié la Constitution 13,
qui a comme titre "La vie cénobitique" et nous avons analysé les
trois numéros de la Cst elle-même présentant les grands principes de ce qui
constitue une authentique vie commune. Chacun
de ces éléments de la Cst est accompagné d'un ou deux "statuts"
qui traitent de l'application de ces principes dans des situations plus concrètes.
La première section de la Cst expliquait que la vie commune
consiste tout d'abord dans l'union des coeurs et des esprits dans la paix
et la charité. À cette section ont
été attachés deux statuts, l'un sur la table commune et l'autre sur les cellules.
On aurait sans doute pu mentionner de nombreux autres points;
mais ceux-là sont ceux qui sont apparus comme plus importants lors
de l'étude des divers projets de Constitutions faite par toutes les communautés
de l'Ordre.
ST 13.1.A
La table commune exprime et fortifie l'union des frères. Aussi, tous participent à la même table, à moins d'une excuse raisonnable.
Dans toutes les cultures le repas est considéré comme une
forme particulièrement importante de communion. Pour saint Benoît les repas en commun étaient aussi importants que
la participation à l'Office divin. Exclure
quelqu'un de la table commune était considéré comme une punition aussi grave
que l'exclure de l'Office. Dans la
société d'aujourd'hui, si l'on sait encore donner beaucoup d'importance à
des banquets et à des grands repas festifs, on a perdu pas mal le sens sacré
de tout repas. Personnellement, je
viens d'une grande famille où l'on prenait tous ensemble, tous les jours,
les trois repas, et où l'on attendait avant de commencer si quelqu'un était
en retard. J'ai l'impression qu'aujourd'hui,
il y a bien peu de familles où l'on prend ensemble tous les repas.
On mange plus facilement sur le coin du comptoir à des heures différentes,
avant de partir pour telle ou telle réunion.
Dans une communauté, où l'expression de la communion fraternelle reste
importante, il convient que nous gardions le sens sacré de la participation
commune au deux repas principaux de la journée.
L'"excuse raisonnable" que prévoit le statut sera presque
toujours une absence pour un service de la communauté, ou encore un raison
de maladie.
ST 13.1.B
S'il y a des cellules, leur usage est déterminé par l'abbé selon la coutume locale. Si elles servent pour la lectio et la prière des frères, qu'elles soient telles qu'elles les favorisent et qu'elles garantissent la dignité des personnes; elles ne doivent pas porter préjudice à la vie commune, et elles demeureront modestes et conformes à la simplicité cistercienne. Il est permis à l'abbé de les visiter.
L'autre statut attaché à ce premier nº de la Cst 13 traite
des cellules des moines. Il n'y a pas lieu ici de refaire toute l'histoire
du dortoir et de la cellule! -- histoire complexe fort liée à des données
culturelles. Au moment où nous avons rédigé nos Constitutions, il n'y avait
pas longtemps que, dans notre Ordre, nous étions passés de la tradition des
dortoirs communs où chacun avait tout simplement sa petite alcôve, aux cellules
privées. La façon dont ce statut est
rédigé laisse voir la grande diversité non seulement de pratique mais aussi
de conception sur ce point d'un monastère de l'Ordre à l'autre et d'une région
à l'autre. Pour certains la vie commune
consiste à tout faire ensemble le plus possible, en particulier la lectio
et même la prière privée, si bien que la cellule, même si elle devenue une
chambrette individuelle, est réservée au repos de la nuit. En d'autres monastères la cellule est considérée
le lieu normal où le moine fait sa lectio et où il poursuit sa prière
continuelle en dehors du temps de travail, des Offices et des repas, sans
que cela n'implique aucunement une orientation érémitique. Il me semble que c'est notre tradition, à Scourmont.
Il faut alors veiller, comme dit le texte, à ce qu'elles demeurent
"dignes" et ne deviennent pas des sortes de "foutoirs"
où l'on empile toutes sortes d'objets dans un désordre croissant, et veiller
aussi à ce qu'elles ne deviennent pas un lieu d'accumulation de "possessions
privées"... sinon d'objets communs (livres en particulier) soustraits
à l'usage commun.
ST 13.2.A
L'abbé apporte le plus grand soin à ce que les malades et ceux qui sont avancés en âge soient traités avec empressement et amour, comme le Christ en personne. S'il est possible, l'onction des malades leur est conférée au milieu des frères
Le deuxième numéro de la Constitution parlait du soin des
frères souffrants. Ce texte s'adresse
à toute la communauté. Le statut qui
lui est attaché fait une obligation spéciale à l'abbé de voir à ce que tous
les frères souffrants reçoivent tous les soins nécessaires, avec empressement
et amour, comme le Christ en personne. On
mentionne aussi l'onction des malades qu'il serait opportun de conférer au
malade lorsqu'il est encore bien conscient, et au milieu de tous ses frères,
plutôt qu'au dernier moment, avant son dernier souffle et en l'absence des
frères.
ST 13.3.A
L'abbé, après
avoir entendu son conseil, peut permettre à un
frère de mener la vie érémitique. L'ermite demeure soumis à l'autorité
de l'abbé. S'il réside hors des limites du monastère il faut le consentement
du conseil et, s'il est clerc, il faut aussi celui de l'évêque du lieu où
il résidera. (Ch. Gl 2002, vote 97)
Enfin, on a rattaché à cette Constitution sur la vie commune
un statut autorisant l'abbé à permettre à un frère de mener la vie érémitique.
C'est une façon de souligner le fait qu'un ermite, si sa vocation est
authentique, demeure un membre à part entière de la communauté, et que sa
communion avec celle-ci doit demeurer toujours aussi réelle et aussi forte,
même si elle n'est plus exprimée par le fait de vivre sous le même toit et
de participer aux mêmes exercices. C'est
pourquoi une telle vocation n'est pas une chose purement individuelle. Non seulement elle requiert la permission de l'abbé, mais celui-ci
ne peut la donner sans prendre l'avis de son conseil. Si le frère doit résider hors des limites du
monastères, il faut non seulement que l'abbé prenne l'avis de son conseil,
mais il a besoin du consentement de celui-ci pour donner son accord.