15 décembre 2002
Chapitre à la Communauté de Scourmont
La composition de la
communauté (Cst. 6)
La dernière
Constitution que nous avons commentée (Cst. 5) décrivait les divers statuts
que peut avoir une communauté locale. Celle
que nous abordons maintenant, et qui fait encore partie d'une introduction
à la première Partie des Constitutions, traite de la composition de la communauté.
En d'autres mots, lorsqu'on dit que les membres de la communauté ont
tel droit ou telle obligation, de qui parle-t-on?
La question est importante, car pour pouvoir gérer dans la sérénité
et la paix toutes les situations pastorales qui peuvent se présenter dans
la vie d'une communauté, il faut que soient dès le point de départ très clairs
les droits et les devoirs de chacun.
C. 6 La composition de la communauté
La communauté est constituée
des frères qui y ont fait profession, des novices et des autres personnes
admises en son sein pour raison de probation ainsi que des oblats.
On affirme
donc ici que la communauté est constituée "des frères qui y ont fait
profession." Cela semble assez
évident, puisque, comme expliqué la dernière fois, la cellule fondamentale
de l'Ordre est la communauté locale et que, par la profession, on s'engage
dans telle communauté bien précise. Parmi
ceux-ci il faut évidemment compter ceux qui s'y sont transférés par un changement
officiel et canonique de "stabilité".
La communauté
est également constituée par des novices qui s'y trouvent. Ceci est tout simplement l'application à notre
situation de ce que dit le droit canon, au canon 646 ("Le noviciat,
par lequel commence la vie dans l'institut..."). Sont ajoutés à cette liste ceux qui sont admis
au sein de la communauté pour une période de probation. Il s'agit des religieux venant d'un autre institut
religieux. Ceux-ci ne sont pas novices,
puisqu'ils ont déjà fait une profession religieuse, mais ils doivent faire
une période de "probation" avant d'être admis à la profession. Durant cette période, leurs droits et leurs
devoirs dans leur communauté de provenance ne sont pas supprimés, mais ils
sont suspendus. Ils convient donc
qu'ils soient considérés comme faisant partie de la communauté où ils veulent
se fixer, à l'instar des novices. Enfin
sont mentionnés les oblats, qui, sans faire des vœux, font réellement partie
de la famille monastique qu'est la communauté.
Il convient
évidemment de préciser que la notion de "communauté" utilisée ici
est plus large que celle du chapitre conventuel dont on parlera plus
tard. Le chapitre conventuel n'est
pas constitué de toutes les personnes qu'on vient de mentionner mais uniquement
de celles qui ont prononcé des vœux solennels -- donc perpétuels -- dans la
communauté (y compris le supérieur provisoire, s`il appartient à une autre
communauté).
ST 6.A
Parmi les profès dont il
est fait mention sont comptés les frères convers qui ont émis leurs vœux avant
le Décret d'Unification de 1965. Ils sont en tout comme les autres frères,
étant saufs leurs droits acquis.
Ces normes générales énoncées dans la Cst. 6 sont précisées par trois Statuts. Le premier traite des frères convers. Le Décret d'Unification de 1965 statuait que : "Il n'y a dans l'Ordre qu'une seule sorte de religieux qui sont tous moines, ayant la même formation monastique, les mêmes droits et les mêmes obligations. Seule sera donc retenue la diversité qu'exige la différence des occupations auxquelles les moines seront destinés, compte tenu soit de l'appel spécial de Dieu soit de leurs aptitudes particulières." Autrement dit, la différence d'occupations au sein de la communauté, fondée soit sur un appel spécial de Dieu soit sur des aptitudes particulières était maintenue, mais ce qui était supprimé était l'existence de classes au sein de la communauté. Par ailleurs, afin de respecter les droits acquis de tous et de n'imposer à personne des obligations qu'ils n'avaient pas acquises au moment de leur profession, le Décret de 1965 disait aussi que " Ceux qui ont déjà fait profession pour la classe des Convers sont libres de rester dans leur propre condition." Ainsi ceux qui désiraient rester frères convers et ne pas assumer les obligations des "moines", en particulier celle de l'Office divin, étaient libres de rester frères convers. Par ailleurs on leur avait déjà donné des droits qu'ils n'avaient pas au moment de leur profession, par exemple celui de participer aux votes du chapitre conventuel, y compris l'élection de l'abbé.
Dans la rédaction de ce Statut 6.A, à Holyoke, en 1984 (voir le Compte Rendu, pages 222-224) nous avons pris de grands soins, d'une part de ne pas ré-instaurer une division de classes dans la communauté (parlant des "frères convers qui ont émis leurs vœux avant le Décret d'Unification de 1965", et n'ouvrant donc pas la possibilité de faire à l'avenir des voeux comme "frères convers") et, d'autre part, d'assurer à ceux qui avaient fait leur profession comme frères convers et qui avaient choisi de demeurer comme tels tous leurs droits acquis sans ajouter aucune obligation autre que celles assumées à leur profession.
ST 6.B
Les oblats participent à
la vie de la communauté en conformité avec les normes du Statut des Oblats
promulgué par le Chapitre Général et selon les coutumes locales.
Quant aux Oblats, qu'il ne faut pas confondre avec les familiers, ils ont des droits et des devoirs bien définis dans le Statut des Oblats. À part cela, la façon dont ils peuvent participer à la vie de la communauté dépend largement des coutumes locales et des situations particulières à chacun.
ST 6.C
Les
frères venant d'autres monastères de l'Ordre de façon prolongée participent
à la vie de la communauté, sauf pour ce qui relève du chapitre conventuel.
Enfin, le Statut 6c mentionne la situation des frères venus d'autres monastères de l'Ordre et vivant de façon prolongée au sein de la communauté, sans nécessairement avoir l'intention de s'y fixer. Ils peuvent être venus pour aider la communauté, ou pour recevoir une formation, ou pour diverses autres raisons personnelles, comme, p. e. l'impossibilité de retourner dans leur pays à cause de situations politiques ou militaires. Ils ne font évidemment pas partie du chapitre conventuel, mais, à part les actes juridiques -- somme toute rares -- du chapitre conventuel, ils participent pleinement à la vie de la communauté.
ST
6.D
Chaque communauté
peut définir, avec prudence, devant la loi civile de sa contrée son statut
et sa composition.
Lors du dernier Chapitre Général (Rome
2002) nous avons ajouté un dernier Statut indiquant que chaque communauté
peut définir différemment son statut et sa composition devant la loi civile
de sa contrée. Cela était rendu nécessaire
du fait que, dans certains lieux, la formulation de nos Constitutions pouvait
conduire à nier à certains des membres de nos communautés (postulants et religieux
venant d'autres communautés, par exemple, certains droits civils).
Nous aborderons la prochaine fois le premier chapitre de cette première partie, qui traitera des divers aspects de la forme cistercienne de vie monastique, ou de la conversatio cistercienne.
Armand VEILLEUX